Une motion référendaire pour que les Français puissent s’exprimer
Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union européenne -
Par Éliane Assassi / 2 octobre 2012Une lettre d’Eliane Assassi à tous les élus de gauche du Sénat.
Le Parlement débat depuis le 2 octobre de la ratification par la France du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) au sein de l’Union économique et monétaire.
Qu’il soit favorable ou non à ce texte, chaque lecteur de ce texte communément dénommé « pacte budgétaire » reconnait la contrainte nouvelle forte qui pèsera sur les Etats signataires et leur peuple.
Certains estiment cette contrainte justifiée au regard des impératifs budgétaires, c’est le débat sur la réduction de la dette, d’autres dont je suis estiment que l’austérité préconisée par cet accord européen aura pour conséquence, non seulement de plonger de nouvelles familles dans la précarité et la crainte du lendemain, de renforcer les inégalités face à la santé et la vieillesse, mais aussi de ralentir progressivement l’économie et de provoquer une aggravation de la situation des pays européens.
L’austérité n’est pas la bonne voie pour le développement de l’Europe, de cette Europe de solidarité et de justice sociale à laquelle une large majorité de nos concitoyens aspirent.
La contrainte nouvelle imposée à notre pays comme aux autres pays concernés exige un grand débat national.
Cette contrainte ne peut être banalisée.
Il ne s’agit pas d’une simple prolongation ou d’un simple renforcement du traité en vigueur.
Il s’agit d’une étape nouvelle.
Les Etats signataires sont en effet placés sous tutelle des autorités européennes, tutelle garantie par la Cour de Justice de l’Union Européenne.
La tutelle est budgétaire avec un renforcement des contraintes imposées depuis le Traité de Maastricht jusqu’au Pacte de Stabilité avec, en particulier, la création de mécanismes de sanctions automatiques contre les Etats s’écartant des règles édictées par le TSCG.
Fait nouveau aussi, un contrôle juridictionnel par la Cour de Justice de l’Union Européenne pourra être engagé à la demande d’une des parties contractantes. Cette disposition est de toute évidence source de tensions nouvelles entre pays européens
Mais la tutelle est également politique puisque l’article 9 souvent occulté dans le débat évoque une coordination des politiques économiques en demandant par exemple à chaque Etat d’informer les autorités européennes de « toutes les grandes réformes de politique économique qu’ils envisagent d’entreprendre ».
Chacun l’aura compris, ce traité vise à étendre à l’ensemble des pays signataires un mécanisme de contrôle, de sanction comparable à celui déjà en vigueur vis-à-vis de la Grèce.
Les budgets nationaux se trouvent ainsi sous le contrôle des institutions européennes, dans le cadre de l’orientation libérale qui prévaut aujourd’hui en Europe. La mise sous tutelle concernera également les collectivités locales au travers de la réduction progressive de la dotation globale de fonctionnement. La tutelle s’imposera également aux budgets sociaux. C’est aussi l’ensemble des services publics qui demain seront concernés par l’austérité du pacte budgétaire.
Une telle décision ne peut se faire sans l’intervention directe du peuple.
Le Conseil Constitutionnel a décidé le 9 août dernier qu’une révision de notre constitution n’était pas nécessaire pour sa mise en application. La « règle d’or » que le TSCG porte en son sein ne sera pas inscrite dans la constitution mais fera l’objet d’une loi organique débattue à la fin du mois d’octobre au Sénat.
Néanmoins, la souveraineté budgétaire de notre pays fondée sur l’article 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui édicte le contrôle des finances de la Nation par le peuple et lui seul est bafouée.
L’acte qui a constitué la rupture démocratique fondamentale avec l’ancien régime autocratique est remis aujourd’hui en cause.
Ce principe fondateur de notre république ne peut être défait sans la consultation du peuple.
C’est pourquoi Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, Cher(e) Collègue, je vous invite à vous associer à la motion référendaire que nous vous proposons de déposer à l’occasion de l’examen par le Sénat du projet de loi de ratification du TSCG le 10 octobre prochain au Sénat.
Cette motion, si elle était adoptée par le Sénat, serait transmise à l’Assemblée Nationale suspendant momentanément le débat en cours.
Les parlementaires représentent le peuple. Il est de leur devoir quand ils estiment que des choix engagent le destin du peuple, de confier à ce dernier et à lui seul le pouvoir de décider.
Je vous prie d’agréer, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, cher(e) collègue, l’expression de ma considération distinguée.