L’extension de l’aéroport de Lille-Lesquin est incompatible avec le "tournant écologique" annoncé pour ce nouveau quinquennat
Courrier au Président de la République -
Par Eric Bocquet / 9 mai 2022Alors que le second quinquennat d’Emmanuel Macron débute le 13 mai prochain, Eric Bocquet a souhaité porter à son attention le projet de l’extension de l’aéroport de Lille-Lesquin, qui fait l’unanimité contre lui chez les riverains et les élus du secteur.
Monsieur le Président,
Je m’adresse à vous au sujet du projet d’extension de l’aéroport de Lille-Lesquin.
Ce projet est porté par le SMALIM, nouveau gestionnaire de l’aéroport, avec le groupe de BTP Eiffage. La Métropole européenne de Lille (MEL) et la Région Hauts-de-France en sont propriétaires. Le projet prévoit 100 millions d’euros d’investissements et le doublement du nombre de passagers, qui devrait passer de 2 à 4 millions par an à l’avenir, multipliant le nombre de mouvements aériens ainsi que la pollution.
En janvier 2021, l’Autorité Environnementale (AE), saisie par le Préfet du Nord, a rendu un avis dans lequel elle relève des risques dans le domaine de la protection de la qualité de l’air et de l’eau, en raison de la présence des champs captants qui alimentent en eau potable une grande partie des communes de l’agglomération lilloise. Elle s’y inquiétait également de l’artificialisation des sols, avec l’imperméabilisation de 17 hectares, ainsi que des risques pour le climat et la biodiversité. L’AE préconisait encore l’adoption d’un couvre-feu nocturne de 7 heures de repos continu pour lutter contre le bruit et garantir la quiétude des populations riveraines de l’aéroport dans un secteur densément peuplé.
En janvier 2022, une enquête publique a été diligentée par la préfecture du Nord. 1 400 citoyens y ont répondu et se sont prononcés contre le projet à plus de 90 % ; les conseils municipaux de la grande majorité des communes de la MEL ont adopté une délibération pour s’opposer aux aménagements prévus ; les associations de riverains et de protection de l’environnement ont également exprimé leur refus de cette extension.
Dans son ensemble, ce projet relève d’une conception dépassée de la problématique des transports et des déplacements car l’aéroport de Lille-Lesquin demeure un aéroport régional dont 70 % des destinations se situent à moins de 3 heures de Lille en TGV.
En dépit de tous ces éléments et contre toute attente, la commission chargée de l’enquête publique vient de rendre un avis favorable dans un rapport publié le 25 avril dernier. Cette position n’a pas manqué de surprendre tant il est incompréhensible que ce rapport ne tienne aucun compte des remarques formulées par l’Autorité Environnementale, ni lors l’enquête publique, et qu’il soit favorable au projet initial dans sa quasi-intégralité. Même l’idée d’instaurer un couvre-feu nocturne, qui permettrait de limiter pour les riverains les risques de troubles psycho-sociaux liés aux activités aéroportuaires, n’a pas été retenue.
Il est également regrettable que ce projet ait été approuvé lors d’une réunion du bureau exécutif de la Métropole européenne de Lille, par ailleurs co-propriétaire de l’aéroport, sans que le conseil communautaire représentant l’ensemble des 95 communes ne soit consulté, bien que ce sujet soit particulièrement sensible.
Alors que vous avez, Monsieur le Président, clairement exprimé votre volonté de donner un tournant écologique à votre nouveau mandat, il me paraît important de vous alerter sur ce projet qui présente des effets délétères pour l’environnement et la population.
Dans l’attente d’un avis de votre part sur la pertinence de ce projet,
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma haute considération.
Éric Bocquet