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Les débats

Dans ce domaine comme dans d’autres, les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions

Influence de la France à l’étranger -

Par / 25 mars 2015

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’influence de la France à l’étranger ? « Vaste programme ! », comme a pu dire le général de Gaulle en d’autres temps, et sur un autre sujet.

Nos collègues du groupe UMP nous invitent à cette réflexion, à l’heure où il est parfois de bon ton, dans certains milieux, de déplorer le déclin auquel notre pays serait inexorablement voué.

De quoi s’agit-il ?

De l’image de la France à l’étranger ? Celle-ci est, par nature, éminemment subjective, donc diversement perçue suivant les pays, la période historique et les rapports que nous entretenons avec tel ou tel peuple.

De l’influence de notre pays sur le cours des événements à travers le monde ? Dans ce cas, l’action diplomatique du Gouvernement et les grands principes qui la guident seraient en question.

Dans le court laps de temps de six minutes qui m’est imparti – auquel je me tiendrai, madame la présidente –, je ne me lancerai pas dans une analyse de politique étrangère, réservée aux trop rares débats que nous avons sur ce sujet. Je me limiterai simplement à quelques éléments tangibles et concrets sur lesquels nous avions eu l’occasion de porter des appréciations lors de la discussion budgétaire.

Les crédits affectés sont effectivement un élément objectif – bien qu’il ne soit pas le seul – à partir duquel on peut examiner l’action d’un département ministériel dont le rôle est précisément de promouvoir les valeurs, la culture, la langue de notre pays, mais aussi de défendre ses intérêts politiques et économiques dans le monde.

Monsieur le ministre, vous avez récemment eu l’occasion de rappeler devant notre commission des affaires étrangères les quatre objectifs que vous vous fixiez dans ce domaine. Parmi ceux-ci, vous avez notamment cité « le redressement et le rayonnement de la France » – ce que l’on pourrait d’ailleurs comprendre comme étant une critique implicite de l’action menée par vos prédécesseurs.

Dans le contexte international troublé que nous connaissons, ce sont des objectifs ambitieux et difficiles à atteindre. Ils nécessitent de la conviction, certes, mais surtout des moyens importants ou, tout au moins, suffisants. Or, paradoxalement, pour conserver le statut de puissance d’influence de notre pays, le budget qui nous avait été présenté à la fin de l’année dernière prévoyait de réduire les crédits affectés à quelques programmes et, conséquence de moyens diminués, de redéployer la présence française vers de nouvelles sphères d’influence.

Cela s’est ainsi traduit par la programmation de la suppression de 450 postes entre 2015 et 2017, dont 220 dès cette année. Certes, notre réseau diplomatique est encore le troisième au monde, mais, en poursuivant sur cette pente, en supprimant des postes chaque année, le rayonnement auquel nous prétendons aura plus de difficultés à s’exercer dans le monde actuel.

C’est aussi dans ce cadre rétréci que, pour limiter les effets négatifs de cette déflation des effectifs, il avait été décidé de redéployer une centaine d’agents du ministère vers des zones géographiques prioritaires, comme les pays dits « émergents ».

De même, la réduction de nos contributions aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix, auxquelles nous participons pourtant de plus en plus fréquemment, a été une décision allant à l’encontre de la place que nous tenons et du rôle international que nous prétendons jouer.

Le rayonnement de notre pays repose également sur notre capacité à développer l’éducation. Dans ce domaine aussi, les crédits regroupant l’ensemble des moyens octroyés aux politiques culturelles, linguistiques, universitaires et scientifiques ainsi que ceux qui sont destinés au service d’enseignement français à l’étranger ont été diminués.

Il faut cependant apprécier à sa juste mesure la création de l’Institut français, qui est un excellent vecteur de notre action culturelle à l’étranger, sans oublier les outils performants que sont Campus France et France expertise internationale.

Enfin, la faiblesse de notre aide publique au développement illustre malheureusement le décalage qui existe trop souvent entre les paroles et les actes. En effet, pour la cinquième année consécutive, les crédits qui ont été engagés au titre de 2015 ont baissé. Le résultat de ce constat est malheureusement que, dans le combat pour l’éradication de la pauvreté et pour le développement, notre position parmi les grandes nations et notre image dans le monde se sont fortement détériorées. Nous sommes devenus le cinquième bailleur, après les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et le Japon. Quand on se souvient que notre pays était au deuxième rang dans le milieu des années quatre-vingt-dix, on ne peut que déplorer la voie suivie.

Les efforts, modestes, que nous consacrons au développement des pays et des peuples qui en ont le plus besoin ne sont pourtant pas qu’une affaire de finances publiques et de budget contraint ; ils révèlent une conception de l’aide au développement qui ne se fonde pas sur la solidarité internationale, ni sur de grands principes ni sur des valeurs dont un pays comme le nôtre aurait quelque titre à se prévaloir.

Je tempérerai ces quelques critiques en reconnaissant néanmoins vos efforts en matière de diplomatie économique, ce qui contribue à la promotion de nos intérêts et à l’attractivité de notre pays.

Je terminerai mon propos en relevant avec satisfaction le fait que le ministre des affaires étrangères soit désormais également chargé de la politique touristique de notre pays. C’est une reconnaissance de l’importance de ce que ce secteur apporte à notre économie, mais aussi de son rôle social, éducatif et culturel, et, bien entendu, de sa contribution au rayonnement de notre pays dans le monde.

Monsieur le ministre, notre groupe reconnaît tout votre talent et nous ne doutons pas de vos convictions et de votre bonne volonté, mais nous regrettons profondément que votre Gouvernement ne se donne pas, dans ce secteur comme dans d’autres, les moyens à la hauteur des ambitions et des principes qu’il affiche.

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