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Les débats

La précarité financière des étudiants conduit 34 % d’entre eux à renoncer à se soigner

Sécurité sociale des étudiants -

Par / 3 décembre 2013

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la situation sanitaire et sociale des étudiants est aujourd’hui préoccupante.

Plus de la moitié des jeunes vivent avec moins de 400 euros par mois, se situant en dessous du seuil de pauvreté. La crise économique, on le sait, touche particulièrement les jeunes et fragilise évidemment les étudiants, ce qui doit nous amener à une vigilance accrue.

Corollaire ou conséquence, les mesures de déremboursement qui se sont succédé concernant les médicaments ou la hausse du forfait hospitalier ont contribué à l’augmentation des frais de santé et alimenté la dégradation de la situation.

La précarité financière des étudiants conduit ainsi 34 % d’entre eux à renoncer à se soigner et à sacrifier leur santé au nom d’arguments économiques. Autre chiffre : 19 % des étudiants ne bénéficient d’aucune assurance complémentaire de santé, alors qu’ils sont trois fois plus nombreux que la population générale.

C’est donc un fait, les étudiants sont particulièrement fragilisés en termes d’accès aux soins ; ils méritent une attention toute particulière.

La France a créé un régime spécifique de sécurité sociale pour les étudiants par la loi du 23 septembre 1948, cela a été rappelé. Il s’agit d’un régime délégué, affilié au régime général de sécurité sociale et géré par des mutuelles étudiantes.

L’idée était de reconnaître l’autonomie des étudiants et de leur donner un droit à une prévoyance sociale particulière, au sein de laquelle ils sont représentés. Cette représentativité leur permet de participer et de décider directement de la gestion de ce régime, de valoriser les problématiques qui sont les leurs, dans leurs intérêts et la reconnaissance de leurs spécificités.

Nous partageons cette volonté d’autonomisation des étudiants. Nous militons en effet pour l’octroi d’une allocation d’autonomie pour les étudiants, qui leur permettrait de s’assumer entièrement, sans dépendre financièrement de leurs parents ni compromettre la réussite de leurs études par un travail étudiant.

Cependant, de ce principe louable ont découlé de grandes difficultés objectives de gestion de ce régime. Au nom de l’autonomie étudiante, on a créé un système extrêmement complexe et peu lisible, dont les étudiants sont finalement les premières victimes.

Le système actuel est loin d’être satisfaisant, les difficultés de gestion restant légion. C’est un constat que nous partageons tous, et rares sont ceux qui n’en ont pas fait l’expérience, pour eux-mêmes ou pour leurs enfants.

M. Ronan Kerdraon. Tout à fait !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les modalités d’affiliation sont extrêmement complexes et les situations nombreuses, ce qui nuit à la lisibilité du dispositif.

C’est d’autant plus vrai que ce secteur est géré par plusieurs acteurs mis en concurrence : mutuelle nationale ou mutuelle régionale s’affrontent sur la gestion du régime général, mais également sur les couvertures de santé complémentaires facultatives qu’elles proposent.

Le brouillage est également renforcé par le fait que, le régime étudiant étant un régime de transition entre l’affiliation au régime des parents et celui du futur régime professionnel, s’ensuivent des changements qui peuvent être extrêmement complexes et se traduire par de longues périodes sans affiliation ou sans carte de sécurité sociale.

Viennent enfin s’ajouter des problèmes dans la qualité du service rendu : longues files d’attentes, difficultés à contacter les mutuelles en cas de problèmes, etc. Comme ils ont été évoqués, je ne m’y étendrai pas.

Quelles réponses apporter face à ces difficultés objectives ? La question est délicate et ne doit pas, selon nous, conduire à des conclusions hâtives et des solutions radicales.

Elle devrait, en revanche, nous inciter à nous interroger plus longuement sur les moyens dont disposent ces mutuelles pour mener à bien leur service : sont-ils réellement suffisants pour faire face à la complexité et la diversité des situations ? Ce qui est certain, c’est qu’un équilibre doit être trouvé entre la préservation d’un régime de sécurité sociale général et la reconnaissance légitime de l’autonomie étudiante.

Nous pensons en réalité que le maintien d’une sécurité sociale unifiée avec représentation de tous les acteurs concernés au sein des instances du régime général aurait été la meilleure solution. Les régimes délégués sont autant de régimes particuliers qui, in fine, affaiblissent le régime général de la sécurité sociale au détriment des affiliés, en l’occurrence les étudiants.

Cependant, ce n’est pas dans la réforme des mutuelles étudiantes et la suppression du régime délégué que se situe à notre sens l’enjeu d’une réforme en matière de santé étudiante. Si réforme il doit y avoir, c’est une réforme globale de la sécurité sociale en général, notamment en ce qui concerne les élections des administrateurs qui, je le rappelle, n’ont pas eu lieu depuis dix-sept ans !

Les dysfonctionnements du système de sécurité sociale étudiante, sans être occultés, ne sont finalement que secondaires. Ils ne sont que les symptômes d’une maladie, et non son origine. Ils sont la traduction matérielle de l’absence d’une véritable politique de prévention et d’accès aux soins pour les étudiants, que la réduction des moyens budgétaires pour 2014 va encore accentuer.

Outre une revalorisation urgente des moyens, il faut adopter sans plus tarder des mesures d’exonération de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance, ou TSCA,…

Mme Annie David. Ça…

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … au moins pour les étudiants, afin de ne pas aggraver la situation des jeunes face à la santé. Nous avons défendu cette disposition lors des débats relatifs au dernier projet de loi de finances. Le Sénat l’a adoptée, mais elle est restée sans suite à l’Assemblée nationale, ce que nous ne pouvons que regretter.

Enfin, des mesures de simplification des conditions d’accès à la CMU et à l’aide pour une complémentaire de santé, dont les étudiants précaires sont exclus, doivent permettre à chaque étudiant boursier de bénéficier de ces dispositifs. À nos yeux, il s’agit de mesures bien plus fondamentales que la réforme du régime de sécurité sociale étudiante.

Mes chers collègues, telles sont selon nous les priorités pour la santé étudiante, parce que la jeunesse est le moment privilégié où se forgent les habitudes en matière de santé, pour toute la vie.

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