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Les débats

Pôles d’excellence rurale

Par / 23 juin 2009

Monsieur le ministre, vous avez annoncé, fin 2008, vouloir lancer un nouvel appel à projets de pôles d’excellence rurale pour soutenir la mutualisation de services publics innovants -comme les relais de service publics ou encore les maisons de santé- ainsi que le développement durable des territoires.

Ces pôles ont connu, lors de leur lancement, un vif succès comme en témoignent les 800 dossiers déposés en 2005. Ils étaient destinés à soutenir des initiatives locales, créatrices d’emplois et innovantes, autour de partenariats public-privé. Sur le territoire, 379 projets ont reçu le label en 2006. Dans le département des Côtes d’Armor quatre projets ont été labellisés concernant notamment l’amélioration de l’offre de soins, la production de biocarburants, l’agriculture durable et les nouveaux marchés, le cheval en Penthièvre. Le temps a manqué pour préparer les différentes actions parce que les difficultés s’accumulent parfois -coordination, permis de construire, normes, comités de défense contre les projets ; tout cela pénalise les finances et la bonne volonté des acteurs locaux. Les objectifs des PER correspondent à des faiblesses réelles du territoire et ils traduisent la volonté de compenser des politiques insuffisantes.

Par exemple, l’amélioration de l’offre de soins et la construction de trois maisons de santé répondent à un grave souci des élus locaux. Maire d’une commune proche de ce PER, je vais devoir accueillir la semaine prochaine un médecin roumain, car il est devenu impossible de faire venir des médecins français dans nos secteurs et ce n’est pas la loi HPST qui va régler le problème, loin s’en faut ! Construire des maisons de santé, c’est bien, à condition que des professionnels veuillent bien s’y installer demain !

« Le cheval en Penthièvre », un projet d’animation équestre autour du haras national de Lamballe tente de compenser l’affaiblissement progressif des effectifs des haras nationaux et la politique d’abandon du Gouvernement. A intervalle régulier, des menaces de fermeture définitive pèsent sur les deux seuls haras bretons subsistants : Lamballe et Hennebont.

Les pôles n’auraient pas besoin d’exister s’il n’y avait eu auparavant toutes ces politiques d’abandon de la ruralité. Le texte de loi relatif aux territoires ruraux voté en 2005 n’avait pas apporté de solutions efficaces. L’ensemble des projets labellisés, représentant un investissement global de 1,2 milliard, devait permettre de créer 35 000 emplois dont 13 000 directs, la participation de l’État étant de 235 millions. Dans votre bilan, monsieur le ministre, vous vous félicitez d’avoir mis en place « un outil concret au service de la relance grâce aux investissements et aux créations d’emplois », alors que lors du conseil des ministres du 13 mai, vous annonciez la création de seulement 6 000 emplois directs sur les 13 000 prévus. Moins de la moitié ! Aujourd’hui qui peut assurer que ces territoires ruraux connaissent la relance et le nouveau dynamisme tant souhaité lors de la mise en place de ces pôles ? De nombreux PER en sont encore au stade de la mise en place ! Comment le Gouvernement peut-il présenter un bilan si positif ?

Comme vous souhaitez lancer une troisième vague d’appel à projets, il est nécessaire de mettre en lumière les limites de cette politique. L’Union nationale des acteurs et des structures du développement local a émis quelques réserves sur le mode de sélection des projets. Au lieu d’encourager la coopération entre les territoires, ce système les met en concurrence. Il serait bon de définir de nouvelles modalités de sélection des projets candidats car le but est d’aménager le territoire harmonieusement et de manière solidaire.

Les pôles d’excellence rurale ne prennent en charge que l’investissement, non le fonctionnement des équipements réalisés. Leur rôle risque ainsi d’être trop ponctuel et de laisser à terme la charge totale des projets aux collectivités locales.

Cette labellisation s’ajoutant à de nombreuses procédures existantes comme les pays, les projets européens Leader Plus animés par les groupes d’action locaux ou le volet territorial des contrats de plan État-région, risque de perdre en lisibilité. La sélection des pôles, par l’État, est faite au détriment des collectivités territoriales, alors que ces dernières sont sollicitées pour compléter le plan de financement, notamment les régions, collectivités chefs de file pour l’aménagement du territoire et le développement économique. Les délais de mise en oeuvre des projets paraissent inadaptés aux contraintes locales : à ce jour, 357 PER ont effectivement engagé leur projet d’investissement, mais seuls 100 l’ont fait en totalité.

Il parait prématuré d’engager une nouvelle vague d’appel à projets tant que les projets labellisés n’auront pas été menés à terme. Je m’interroge aussi sur la gouvernance des différents pôles, PER ou pôles de compétitivité : l’imposition des partenariats publics-privés donne une place prépondérante aux entreprises privées, ce qui accentue la disparité entre les territoires. Ceux qui sont dotés d’entreprises dynamiques et pouvant investir dans les partenariats vont profiter de cette aubaine, au détriment des territoires qui ne le sont pas. La ruralité a besoin d’une égalité de traitement dans de multiples domaines. Complémentaire des zones urbaines, elle mérite mieux que des pôles d’excellence rurale. L’excellence est un « éminent degré de qualité, en un genre ». Sans vouloir atteindre ce niveau ponctuel et créer quelques arbres pour cacher la forêt, nous demandons le maintien des services de proximité et des services publics dans leur globalité : soins, sécurité, écoles, poste, communications, déplacements, soutien aux activités économiques, touristiques et agricoles. Nous sommes loin du compte et ce ne sont pas la réforme territoriale et la volonté de l’État de contraindre les dépenses des collectivités locales qui contribueront au renouveau des espaces ruraux. Il faut faire plus et mieux.

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