Groupe Communiste, Républicain, Citoyen, Écologiste - Kanaky

Les débats

Il faut garantir un prix de vente rémunérateur pour les producteurs

Sauvegarde et valorisation de la filière élevage -

Par / 23 novembre 2016

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, malgré les mesures d’urgence adoptées, l’élevage traverse une crise profonde et durable. Le retour de ce débat illustre encore une fois la nécessité de prendre des mesures structurelles pour sauvegarder ce pan de notre agriculture, mais aussi de notre patrimoine. Les plans de soutien ne suffisent plus pour éviter le plan social massif qui s’annonce dans nos campagnes ! Toutes les filières de l’élevage sont menacées, victimes de la dégradation rapide des prix d’achat des productions, qui ne permettent pas aux agriculteurs de s’en sortir.

Pourtant, nous le savons tous, l’élevage modèle nos paysages et nos régions. Il évite la désertification, maintient de la vie, crée des emplois. Or la déréglementation des relations commerciales entre producteurs, abatteurs et distributeurs, la consécration du principe de libre négociation des conditions générales de vente, ont ruiné bon nombre de producteurs. Les marges des producteurs sont en régression, celles de la grande distribution explosent ! Pourtant, aucune mesure législative forte n’a été proposée, alors que nous attendions la remise en cause de la loi Chatel.

Nous l’avons souligné, et nous ne sommes pas les seuls à l’avoir fait. En effet, il y a peu, M. Xavier Beulin lui-même affirmait que « le tout-marché ne fonctionne pas, qu’il faut revoir la PAC et remettre une sauvegarde du revenu agricole ». Il est temps d’en prendre acte : la politique agricole commune est en plein déclin au profit de l’idéologie ultralibérale, comme en témoigne l’exemple particulièrement éloquent de la suppression des quotas laitiers au 1er avril 2015.

Devant cette situation de dépendance économique, il est urgent de garantir un prix de vente rémunérateur à l’ensemble des producteurs. Nous demandons depuis des années l’instauration d’un coefficient multiplicateur élargi à tous les produits de l’élevage, qui créerait un lien direct entre le prix payé au producteur et le prix de vente au consommateur.

Lors de précédents débats, nous avions aussi rappelé la mise en place en France d’un quantum pour le blé en 1945. Pendant des décennies, les cinquante premiers quintaux de blé vendus par chaque exploitation étaient payés à un prix fort garanti par l’État, le reste de la production étant soumis aux lois du marché.

Un tel système, qui a fonctionné en France pendant des années pour la production de jeunes bovins, subsiste aux États-Unis. On pourrait aujourd’hui utiliser le budget consacré aux primes de la PAC pour assurer un complément de prix d’achat pour la première tranche de production de chaque éleveur.

Nous aurions tout intérêt à approfondir ces pistes de réflexion à l’échelon tant national qu’européen si nous voulons véritablement sauver notre agriculture. Comme nous l’avons maintes fois répété, il faut exiger l’instauration de prix minimaux européens, rétablir les quotas, défendre un modèle agricole vertueux, renforcer l’étiquetage. Il faut opérer ce changement de modèle avant qu’il ne soit trop tard et agir dans le bon sens pour enrayer cette crise structurelle.

Ce que vit aujourd’hui le secteur agricole est la conséquence d’un parti pris : celui du libéralisme. Or, dans l’agriculture, l’élevage, l’alimentation, pratiquer un libéralisme sans limites consistant à tendre vers les prix les plus bas, quelles qu’en soient les conséquences sociales et environnementales, est voué à l’échec, tant une telle orientation est mortifère. Abandonner le CETA et le TAFTA irait assurément dans le bon sens.

De même, la culture du tout-export conduit à une dépendance aux marchés extérieurs. Il serait sans doute plus judicieux, comme le soulignent de nombreux observateurs, de construire par exemple, dans toute l’Europe, un secteur de l’élevage indépendant des végétaux importés, comme le soja argentin, le maïs brésilien ou nord-américain, et répondant aux exigences de qualité des consommateurs et à celles de respect des normes environnementales et sociales des citoyens.

Il importe également de rassurer le consommateur en instaurant une certification des abattoirs. La question du bien-être animal doit être posée à tous les échelons de la chaîne de production. Tout cela participera véritablement de la valorisation de l’élevage.

Il faut aussi aller plus loin dans le soutien à l’installation des jeunes agriculteurs. Or, selon la Confédération paysanne, le Gouvernement a confirmé la mise en place d’une surprime à l’investissement au titre de la dotation jeune agriculteur. L’attribution de cette nouvelle surprime, dont la création fait suite à l’abandon des prêts bonifiés, est conditionnée au respect d’un niveau d’investissement minimal de 100 000 euros. En pleine crise, le ministère fait donc le choix d’inciter les agriculteurs à s’endetter davantage. Selon nous, c’est une erreur. Pouvez-vous nous donner, monsieur le ministre, des précisions sur ce point ?

Pour favoriser l’installation, nous pensons qu’il faut mettre en œuvre une politique de partage du foncier comportant un système de location-vente de terres aux jeunes, ainsi qu’un prêt bonifié à taux zéro.

L’agriculture reste un métier d’avenir. Cette année, plus de 500 nouveaux agriculteurs se sont installés en Bretagne. Toutefois, ils doivent être accompagnés, car, au-delà de la technique, de l’économie de l’exploitation, ces nouveaux chefs d’entreprise doivent pouvoir effectuer leurs propres choix en fonction du contexte.

En Bretagne, les différents partenaires – chambres d’agriculture, région, Jeunes Agriculteurs… – proposent un accompagnement spécifique au travers notamment d’un point accueil installation et un dispositif de conseil et de formation, le plan de professionnalisation personnalisé. Celui-ci comprend une formation, des stages, une présentation des systèmes d’exploitation agricoles aux niveaux européen et international. Il s’agit de véritables outils de professionnalisation, gages pour les agriculteurs de réussite de leur future vie professionnelle. Serait-il possible, monsieur le ministre, de s’inspirer de tous ces exemples locaux pour aider la filière de l’élevage ?

Aux yeux du groupe CRC, il s’agit de prendre en main l’outil de production, mais aussi de lutter contre l’isolement ; contre l’individualisme, en continuant à se former, en participant à des réflexions de groupe. Nous croyons en la dimension collective. C’est elle qui aidera les agriculteurs à sortir de l’ornière, à progresser ensemble dans la solidarité. L’installation des jeunes éleveurs doit rester une priorité. Surtout, l’humain doit demeurer au cœur des projets.

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