Trop de textes sont examinés en urgence
Bilan de l’application des lois -
Par Éliane Assassi / 23 juin 2020Monsieur le président, je veux tout d’abord remercier la présidente Valérie Létard de la qualité de son rapport qui nous éclaire, une nouvelle fois, sur le déséquilibre qui existe entre le pouvoir législatif et l’exécutif – le Parlement n’est souvent qu’une simple chambre d’enregistrement !
Trop de textes sont examinés en urgence, puisque cette procédure touche plus des deux tiers des projets et propositions de loi. Nous déplorons nous aussi le recours trop important aux habilitations : comme le relève le rapport de Valérie Létard, le nombre d’ordonnances publiées dépasse, sur la période 2012-2018, celui des lois adoptées en procédure ordinaire.
Par ailleurs, nous sommes très inquiets de la récente décision du Conseil constitutionnel qui permet de donner une force législative à une ordonnance prise sur la base d’une habilitation, mais non ratifiée par le Parlement dans les temps – cela mérite un véritable débat. Ce glissement toujours plus fort vers un renforcement du pouvoir exécutif, notamment présidentiel, pose des questions importantes.
Concernant la remise des rapports du Gouvernement au Parlement, le taux est très faible, puisque seuls 12 % des rapports prévus lors de cette session ont été remis. En outre, seuls 11 % des rapports dont le Sénat est à l’initiative ont été déposés contre 69 % pour ceux qu’a demandés l’Assemblée nationale.
Ma question est relativement simple : alors que le Sénat a obtenu, sur notre initiative, un rapport sur la relance des trains de nuit dans le cadre de la discussion de la loi d’orientation des mobilités et alors que ce rapport doit être remis avant le 30 juin, quand pourrons-nous, monsieur le ministre, en disposer ? Comment les parlementaires seront-ils associés à la mise en œuvre de la relance du ferroviaire, alors que les enjeux écologiques sont encore plus prégnants qu’auparavant ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente Assassi, je retiens de votre intervention trois questions.
Tout d’abord, vous avez raison de dire que ce débat est utile. Il permet au Gouvernement de rendre des comptes au Sénat sur le degré d’application des lois. C’est un moment important et une exigence tant pour votre assemblée, qui n’est pas seulement chargée de voter la loi, que pour nous.
Ensuite, j’ai bien noté la différence qui existe dans le taux de remise des rapports entre ceux dont l’initiative revient au Sénat et ceux dont l’initiative revient à l’Assemblée nationale. Je ne manquerai pas de regarder ce sujet attentivement avec mes collègues du Gouvernement pour que le processus de transmission de ces rapports soit amélioré.
Enfin, en ce qui concerne votre question relative à l’étude sur les trains de nuit prévue par la loi d’orientation des mobilités, il est en effet prévu dans le rapport annexé à cette loi que « l’État étudie le développement de nouvelles lignes […], en veillant à son articulation avec le programme de régénération et de modernisation du réseau ferroviaire et en précisant, en particulier, les conditions d’une amélioration de l’offre des trains de nuit au regard de leur intérêt pour répondre aux besoins de désenclavement des territoires les plus éloignés des grands axes de circulation ainsi que de liaisons nationales et intraeuropéennes et pour réduire l’empreinte écologique. » Cette étude doit en effet être transmise au Parlement avant le 30 juin 2020.
Conformément aux orientations de cette loi, le ministère de la transition écologique et solidaire étudie jusqu’au 30 juin le développement des nouvelles lignes de trains d’équilibre des territoires. Cette étude concerne aussi bien le jour que la nuit.
Concernant la nuit, la première phase de l’étude a consisté à réaliser une comparaison avec les autres réseaux européens qui sont dans une logique de redéveloppement des trains de nuit – Autriche, Suède, Norvège. Un échange approfondi a notamment eu lieu avec les chemins de fer autrichiens qui sont à la pointe dans ce domaine. Des échanges se sont également déroulés avec différents constructeurs, le matériel roulant constituant un élément clé pour l’exploitation de telles lignes.
Quatre segments de marché ont été identifiés pour constituer des liaisons de nuit potentielles : relations intérieures ou internationales entre grandes agglomérations, relations entre chapelets de villes, dessertes touristiques saisonnières et dessertes d’aménagement du territoire.
Le rapport de cette étude technique devrait être disponible dans les prochains jours. Il intégrera des préconisations, ainsi que des propositions de suite à donner l’étude. Je pense à des auditions qui n’ont pu être réalisées au printemps en raison de la crise sanitaire. Il était notamment prévu d’entendre les exécutifs régionaux qui sont des opérateurs centraux sur ces questions, ainsi que des associations. Ces auditions sont nécessaires pour valider les résultats de l’étude technique. Il est proposé de les organiser au début de l’automne selon des modalités à définir et de transmettre par la suite l’ensemble de ces éléments au Parlement.