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Les questions cribles

Une effarante gabegie humaine et budgétaire

Politique audiovisuelle extérieure -

31 mai 2011
Une effarante gabegie humaine et budgétaire
Une effarante gabegie humaine et budgétaire

Lors de la naissance de France 24, s’était imposée la nécessité stratégique d’une chaîne française d’information internationale permettant de relayer à l’échelle de la planète une autre vision du monde. L’ambition était de promouvoir le rayonnement des valeurs universelles issues des Lumières dont notre pays s’est historiquement fait le champion et de donner un nouvel élan à la francophonie.

Or, loin de renforcer l’image de notre pays, la holding Audiovisuel extérieur de la France a trop longtemps offert le désolant spectacle d’une stérile guerre des chefs. L’État, majoritaire au conseil d’administration, a contribué par son silence à l’installation de ce climat délétère.

Dans le même temps, on affaiblit RFI, pourtant reconnue sur la scène internationale, du Moyen-Orient à l’Afrique en passant par la jungle colombienne ; on démantèle dans la précipitation, et à marche forcée, ce fleuron de la radio au profit d’un hypothétique développement de France 24, toujours sans projet et sans convention d’objectifs et de moyens, donc sans boussole, mais avec un réel déficit, alors même que cette chaîne était censée se passer des dotations budgétaires de l’État dès 2012 !

Devant cette situation ubuesque, je m’étonne que l’on ait fait si peu de cas des salariés et de leur comité d’entreprise. La cour d’appel de Paris remet d’ailleurs en cause l’absence de concertation quant au projet de rédaction unique.

Et que dire du déménagement de RFI dans des locaux inadaptés, dont le coût pour l’État est évalué à plus de 21 millions d’euros ?

On peut aussi comprendre les inquiétudes de la chaîne TV5 Monde, qui rencontre un succès incontestable, mais qui se trouve embarquée malgré elle dans cette funeste galère.

Alors qu’une enquête de l’inspection générale des finances est en cours et que la mission d’information de l’Assemblée nationale a expressément demandé qu’aucune décision irréversible ne soit prise avant qu’elle n’émette ses avis, comptez-vous, monsieur le ministre, assumer la responsabilité de l’État actionnaire majoritaire en exigeant la suspension de mesures précipitées, qui mettent en péril l’audiovisuel extérieur de la France ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, la réponse que je vous ferai s’adressera également à Mme Claudine Lepage, à qui j’ai conscience de ne pas avoir répondu assez précisément.

Tout d’abord, monsieur Renar, on n’affaiblit pas RFI. Cette chaîne était véritablement dans une mauvaise passe. Lors d’un déplacement à Bamako, voilà cinq ans, j’ai pu constater moi-même à quel point RFI avait véritablement perdu, déjà à ce moment-là, des parts de marchés et de prestige.

Il importait de reconquérir un certain nombre de marchés perdus, sans s’évertuer à demeurer sur des pôles où l’audience de RFI n’était guère significative, comme celui la Pologne.

L’idée était de recentrer RFI sur ses points forts et de la redynamiser. Cette partie du programme est, quoi qu’on dise, en cours d’accomplissement. On rassemble, on mutualise, on déménage pour un prix relativement élevé, en effet, mais cela permettra de faire l’économie de ce que l’on paie actuellement à Radio France. Tout cela va dans le sens d’une meilleure organisation du travail.

Ensuite, c’est par moi que l’inspection générale des finances a été saisie, et je réponds par là même sur ce point à M. Duvernois. Je lui ai demandé précisément de nous permettre de voir plus clair sur le « combat des chefs », sur la stratégie générale, sur la lenteur avec laquelle s’établissent le contrat d’objectifs et de moyens et le contrat d’affaires, lenteur que je suis le premier à déplorer.

Grâce à l’inspection générale des finances et à la mission d’information parlementaire, qui doivent remettre l’une et l’autre leurs conclusions avant la fin du mois de juin, je serai enfin en mesure d’exercer la plénitude des pouvoirs de la tutelle en toute connaissance de cause, ce qui n’est pas encore tout à fait le cas pour l’instant.

Pour ce qui est de TV5 Monde, dont vous saluez, monsieur Renar, le succès dans l’ensemble du monde, je souhaite, pour ma part, qu’elle mutualise, elle aussi, plus nettement ses travaux avec ceux des autres éléments de la holding.

La réforme de l’audiovisuel extérieur est en cours, elle avance ; il ne faut pas l’arrêter au moment précis où elle commence à porter ses fruits.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour la réplique.

M. Ivan Renar. J’ai bien noté vos précisions, monsieur le ministre, mais je reste insatisfait.

Nous avons toujours été hostiles à la nomination-révocation des responsables de l’audiovisuel public. La « guerre des ego » et la « lutte des places » en démontrent toutes les limites puisqu’elles ont fragilisé et décrédibilisé l’audiovisuel extérieur.

La création de France 24 est un réel défi et un vrai pari. Or, loin de le relever, nous assistons à une effarante gabegie humaine et budgétaire, et je maintiens les propos que j’ai tenus tout à l’heure.

France 24 peine à s’imposer, alors que RFI, dont l’influence et le prestige auraient pu être valorisés, voit ses moyens s’éroder. Notre collègue Claudine Lepage a développé ce point.

Dans un moment où l’actualité internationale est des plus sensibles, les habitants de notre planète aspirent à mieux comprendre les enjeux géopolitiques de notre monde. L’audiovisuel extérieur de la France se doit de répondre à leur attente en contribuant au pluralisme des expressions et des analyses.

Lors de la création de France 24, nous avions contesté l’alliance avec le secteur privé, qui a d’ailleurs vite débouché sur le retrait de TF1 de l’actionnariat de France 24.

Monsieur le ministre, il n’est jamais trop tard pour bien faire !

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