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Les questions d’actualité

Avec le vote de la loi, le contrôle de l’action du gouvernement est constitutionnellement l’autre grande prérogative du Sénat. Celle-ci s’exerce notamment au travers des questions d’actualités (deux jeudis par mois), des questions orales, avec ou sans débat, et des questions écrites.

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Votre projet de loi ne prévoit rien d’autre que la liberté d’exploiter

Loi Macron -

Par / 11 décembre 2014
Votre loi va diviser la France, les travailleurs et la gauche
Votre projet de loi ne prévoit rien d’autre que la liberté d’exploiter

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique.

Monsieur le ministre, vous avez présenté hier votre projet de loi pour la croissance et l’activité. Il consacre la déréglementation sociale à tous les étages, conformément, une nouvelle fois, aux vœux du Medef. (Murmures sur les travées de l’UMP.)

Pourtant, il y a quelques jours, dans un élan de sincérité aussitôt réprimé, vous avez reconnu l’échec du pacte de responsabilité, inspiré par les mêmes !

M. Roger Karoutchi. Ah oui !

M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, pourquoi persister dans l’erreur ?

Pourquoi déposer ce projet de loi fourre-tout, sur lequel d’ailleurs le Conseil d’État émet d’importantes réserves ? Ce texte n’a en fait qu’un seul fil conducteur : la dérèglementation du code du travail et de la régulation publics.

Pourquoi asservir encore davantage les salariés et satisfaire les exigences du patronat en généralisant le travail du soir et du dimanche, car, vous le savez bien, le volontariat, en l’espèce, ce n’est que de la blague ?

Pourquoi libéraliser les transports en autocars, au détriment des petites lignes ferroviaires ?

Pourquoi ne pas renationaliser les autoroutes, sachant que la rente autoroutière a permis aux grands concessionnaires du bâtiment et des travaux publics de s’engraisser depuis la privatisation ?

Pourquoi privatiser les aéroports de Nice et de Lyon, après celui de Toulouse ?

Pourquoi privatiser nos entreprises de défense GIAT et Nexter ?

Votre projet de loi ne prévoit rien d’autre que la liberté d’exploiter. C’est un texte contre les libertés de 99 % de la population.

Pourquoi mettre en cause les prud’hommes et dépénaliser le délit d’entrave ? Pourquoi donner aux patrons le pouvoir unilatéral de fixer l’ordre des licenciements dans les plans de sauvegarde de l’emploi ? Toutes ces mesures figurent dans votre projet de loi !

Pourquoi instaurer l’insécurité juridique pour tous ? Pourquoi mettre en concurrence les professions réglementées et prévoir une justice sur mesure pour l’entreprise, en créant le statut d’avocat en entreprise ?

Pourquoi le projet de loi ne prévoit-il rien contre le recours aux travailleurs détachés ? Pourquoi vous contentez-vous de mots contre le travail détaché illégal, alors que c’est le principe même de la directive sur les travailleurs détachés qui est en cause ?

Je vous le dis, monsieur le ministre, votre projet de loi va diviser la France, les travailleurs, la gauche. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Philippe Dallier. C’est déjà fait !

M. Pierre Laurent. Si vous continuez à trahir vos électeurs, cela aura de graves conséquences lors des prochains rendez-vous électoraux.

M. le président. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Pierre Laurent. J’invite tous les sénateurs de gauche,…

Mme Catherine Procaccia. Ils ne sont pas nombreux !

M. Pierre Laurent. … tous ceux à qui l’égalité tient à cœur, à ne pas accepter ce énième recul de civilisation.

Monsieur le ministre, je vous demande d’entendre la colère qui monte déjà de toute la gauche (Protestations sur les travées du groupe socialiste. – Exclamations sur les travées de l’UMP.) et du monde syndical. Je vous demande de retirer votre projet de loi avant qu’il ne soit trop tard. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Monsieur le sénateur, à la série de vos « pourquoi », j’ai envie de répondre « Parce que », mais la caricature est telle que je me dois de vous répondre de manière précise !

Je ne sais pas de quoi vous parlez. Je ne sais d’ailleurs même pas si vous avez lu le texte qui a été déposé hier en conseil des ministres. (Protestations sur les travées du groupe CRC. – Exclamations amusées sur les travées de l’UMP.)

Mme Éliane Assassi. L’utilisation du mépris n’a jamais fait avancer le débat !

M. Emmanuel Macron, ministre. En effet, vous avez déploré l’absence de sanctions contre les travailleurs détachés, monsieur le sénateur, alors que le texte prévoit de les accroître. Vous ne l’avez donc pas lu !

Monsieur le sénateur, de quelle France parlez-vous ? Et quelle gauche voulez-vous ?

Mme Éliane Assassi. Pas la vôtre !

M. Emmanuel Macron, ministre. Telle est la bonne question.

Aujourd’hui, 30 % des Français travaillent le dimanche.

M. Pierre Laurent. C’est bien suffisant !

Mme Michelle Demessine. C’est déjà trop !

M. Emmanuel Macron, ministre. La France dont nous parlons travaille donc et consomme le dimanche. Et elle travaille trop souvent sans compensations.

Ce projet de loi permettra de donner plus de libertés sur le terrain et d’offrir des compensations partout où c’est possible. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Nous ne nous payons pas seulement de mots en ces lieux, monsieur le sénateur, nous proposons une véritable mesure de justice et d’égalité !

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas vrai !

M. Emmanuel Macron, ministre. La France dans laquelle nous vivons vous et moi, monsieur le sénateur, est un pays dans lequel les accès aux territoires sont insuffisants et où on ne peut pas se déplacer comme on veut. Pour ceux qui n’ont pas d’argent, qui ne peuvent pas prendre le train ou qui n’ont pas de véhicule particulier, l’ouverture des lignes d’autocar est une mesure de justice. C’est aussi une mesure d’activité.

Mme Éliane Assassi. Il faut augmenter les salaires !

M. Emmanuel Macron, ministre. Cela se fait chez nos voisins, et c’est une bonne mesure. Dès ce matin, des industriels du secteur se sont d’ailleurs engagés à créer des emplois. Vous devriez vous en féliciter !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Où sont les emplois ?

M. Emmanuel Macron, ministre. La gauche qui est derrière ce projet de loi, monsieur le sénateur, n’est pas celle qui regarde vers le passé et qui rêve d’une France qui n’existe plus.

M. Roger Karoutchi. Ah !

M. Emmanuel Macron, ministre. C’est la gauche qui regarde la France telle qu’elle est dans le monde d’aujourd’hui, mais peut-être ne vous plaît-elle pas…

M. Jackie Pierre. Cela s’appelle la droite ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. Emmanuel Macron, ministre. La véritable gauche doit y recréer des égalités d’accès et offrir plus de capacités aux Français. Elle doit offrir plus de droits réels. Il n’est pas besoin d’offrir de l’argent public pour cela, monsieur le sénateur, ou d’en revenir aux vieilles lunes !

Pour finir, j’évoquerai les prud’hommes. Doit-on se féliciter d’une justice trop lente, dont les résultats sont incertains et qui est profondément injuste du fait de son fonctionnement ? Oui, les prud’hommes sont une belle idée, mais c’est une belle idée qui ne marche pas.

Mme Michelle Demessine. Si, elle marche ! Pas pour les employeurs, mais pour les salariés.

M. Emmanuel Macron, ministre. Nous devons donc mieux faire fonctionner cette belle idée. François Rebsamen, Christiane Taubira et moi-même avons souhaité conserver le principe paritaire, mais nous réduirons les délais, nous améliorerons la formation des juges, afin que le droit du travail soit moins instable et fonctionne mieux pour les salariés les plus fragiles…

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. … et pour les PME.

M. Jean-Pierre Raffarin. Enfin un ministre de droite ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. Emmanuel Macron, ministre. Plus d’égalité, plus de justice : c’est cela la gauche ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe CRC.)

M. Manuel Valls, Premier ministre. Vous, mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRC, vous votez tous les jours avec la droite !

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