Les questions d’actualité
Allez-vous abandonner votre arithmétique comptable au profit d’une équation plus positive ?
Fermetures de classes en milieu rural -
Par Céline Brulin / 10 février 2021Monsieur le ministre, nous vous avions alerté sur les conséquences prévisibles de vos calculs budgétaires en matière scolaire. Eh bien, c’est pire !
Ici, ce sont des suppressions de classes au collège : celui de Blangy-sur-Bresle, par exemple, en Seine-Maritime, en perd 2 sur les 17 que compte l’établissement. Là, c’est une baisse considérable d’heures d’enseignement : au lycée de Lillebonne, par exemple, le résultat de la soustraction donne 110 heures de moins pour une réduction de seulement 22 élèves. Ce théorème vaut aussi en primaire et en maternelle, y compris en éducation prioritaire.
« Après avoir subi le traumatisme de deux confinements, l’éducation nationale va nous faire subir un troisième électrochoc », m’écrit le maire de Brachy, commune qui vient de réaliser un nouveau groupe scolaire.
Savez-vous pourquoi cette commune a agi ainsi ? Pour répondre à vos injonctions de regrouper les écoles – injonctions qui font si mal à nos territoires ruraux et qui se voient bien mal récompensées. Une classe devrait ainsi fermer dans cette commune.
Je pourrais multiplier les exemples dans toutes les académies de France. Partout, émerge la demande d’une carte scolaire qui prenne en compte la situation sanitaire et le besoin d’accompagnement renforcé des élèves, à l’image des plus de 200 élus normands qui vous lancent un appel en ce sens.
La crise sanitaire n’est pas derrière nous ; les inégalités scolaires et sociales encore moins.
Monsieur le ministre, allez-vous abandonner l’arithmétique de choix comptables, déconnectés de la réalité, pour faire une équation positive de la carte scolaire ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, nous continuons de créer des postes à l’école primaire, alors même qu’il y a moins d’élèves.
Votre département comptera un millier d’élèves en moins l’année prochaine, et nous y créons près de vingt postes. À la rentrée prochaine, le taux d’encadrement va battre un record historique en Seine-Maritime : il n’y aura jamais eu autant de professeurs par rapport au nombre d’élèves à l’école primaire.
M. Laurent Duplomb. Et il n’y aura jamais eu autant de professeurs qui ne sont pas devant les élèves !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. C’est vrai pour chaque département de France.
Vous me demandez, madame la sénatrice, si nous tenons compte de la crise sanitaire. La réponse est oui ! Lors de la dernière rentrée, nous avons appliqué le principe « ni fermeture de classes ni fermeture d’écoles sans autorisation du maire ».
Ce principe, comme nous l’avions dit, vaut toujours pour les fermetures d’écoles. Et même s’agissant des fermetures de classe, il y a de fortes consultations. En ce qui concerne les exemples que vous avez cités, les consultations continueront, et cela jusqu’à la veille de la rentrée, puisque nous tenons compte du nombre d’élèves.
Nous mettons en œuvre des mesures qualitatives, loin de l’esprit comptable que vous nous prêtez. (M. Jacques Grosperrin s’exclame.) Dans votre département, par exemple, le dédoublement des grandes sections de maternelle continue, avec douze élèves par classe, donc.
De même, comme dans bien d’autres départements, les classes de grande section, de CP et de CE1 ne compteront pas plus de vingt-quatre élèves. Ce sont des progrès considérables. Jamais l’école primaire n’avait fait l’objet d’une telle priorité budgétaire. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
Ce n’est pas une opinion, mesdames, messieurs les sénateurs : c’est une réalité, que chacun peut vérifier dans le projet de loi de finances pour 2021.
Le taux d’encadrement à l’école primaire atteint un niveau historique. Bien évidemment, quelques classes peuvent fermer çà et là pour des raisons complexes de démographie rurale.
Par ailleurs, je n’encourage pas particulièrement le regroupement d’écoles. Chaque cas est particulier et doit être traité en liaison avec le maire. La consigne est le travail conjoint avec les maires, et toute exception doit m’être signalée, bien sûr dans la recherche du consensus et dans l’intérêt des élèves. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour la réplique.
Mme Céline Brulin. Monsieur le ministre, s’agissant des records historiques, je voudrais vous signaler, même si vous le savez mieux que moi, que la Seine-Maritime est encore en retard en matière de taux d’encadrement par rapport la moyenne nationale.
Vous n’avez absolument pas évoqué les collèges et les lycées. Nous assistons à un véritable carnage ! Entendez les demandes ! Accordez des postes, accordez des heures.
Cessez d’en appeler aux heures supplémentaires : douze millions d’heures supplémentaires n’ont pas été compensées ni assurées en 2019. Ce sont autant d’enseignements qui ont fait défaut à nos jeunes. C’est absolument intolérable dans cette période où les élèves alternent entre présentiel et distanciel.