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Monsieur le ministre, vous restez enfermé dans votre dogme néolibéral

Nouveau plan d’aide de l’État en faveur d’Air France -

Par / 7 avril 2021
Monsieur le ministre, vous restez enfermé dans votre dogme néolibéral

Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la relance, vous avez annoncé une nouvelle aide de 4 milliards d’euros et une montée de l’État au capital d’Air France-KLM à hauteur de 29,9 %, qui lui permettra de redevenir le premier actionnaire de la compagnie.

Depuis le début de cette crise, notre groupe n’a cessé de plaider pour des prises de participation de l’État dans les grandes entreprises stratégiques. Vous nous avez répondu que cela était impossible. Votre position a manifestement changé, mais vous avez perdu un an.

Ce soutien à Air France risque de coûter cher en contreparties exigées par la Commission européenne, au détriment des salariés et des usagers.

S’agissant des créneaux qu’Air France va devoir céder à ses concurrents, vous vous félicitez d’avoir obtenu 18 créneaux plutôt que les 24 demandés initialement par la Commission européenne. Mais exiger d’une entreprise en difficulté qu’elle cède des créneaux, même peu fréquentés et même à des compagnies répondant à certaines exigences fiscales et sociales, ce qui n’est pas de l’avis de la Commission européenne, ne fera que l’affaiblir davantage.

Monsieur le ministre, la question centrale est la suivante : avec quelle ambition politique, sociale et environnementale l’État monte-t-il au capital d’Air France ?
Cette prise de participation est-elle temporaire dans le but de nationaliser les pertes puis de reprivatiser les profits dès que la situation s’améliorera, en faisant payer l’addition aux salariés, ou s’agit-il d’un engagement pérenne, bénéfique à Air France, à ses salariés et à ses usagers ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la relance. Monsieur le sénateur Fabien Gay, je sais une chose : si l’État français n’avait pas soutenu Air France depuis le premier jour de cette crise, cette compagnie n’existerait plus à l’heure où je vous parle !

Mme Pascale Gruny. Évidemment !

M. Bruno Le Maire, ministre. L’État français, à la demande du Premier ministre et du Président de la République, a pris ses responsabilités. Il a estimé qu’Air France et les 40 000 emplois concernés étaient stratégiques, de même que le tourisme, fortement affecté, et notre capacité à avoir des aéroports de classe mondiale grâce à Orly et à Roissy-Charles-de-Gaulle.

Nous avons donc décidé d’apporter à Air France un soutien massif d’un montant de 7 milliards d’euros, soit 4 milliards d’euros alloués sous forme de prêt garanti par l’État et 3 milliards d’euros en avances de l’État. Ces 3 milliards d’euros, qui étaient initialement échelonnés sur quatre ans, viennent d’être transformées en participation directe de l’État en fonds propres de l’entreprise.

L’annonce que j’ai faite hier concernant la montée de l’État au capital de la compagnie, pour un montant maximal d’un milliard d’euros, fera de lui le premier actionnaire d’Air France. Il ne peut y avoir de témoignage plus clair de notre détermination à soutenir cette compagnie aérienne nationale. Il y va de l’indépendance de la France et de notre capacité à peser dans le tourisme mondial.

Des contreparties ont certes été exigées, mais je rappelle tout de même que Lufthansa a accepté de céder 48 créneaux en échange du soutien de l’État allemand. Air France va céder 18 créneaux, sur les 24 initialement demandés, soit 4 % de ses créneaux sur l’aéroport d’Orly. Cet accord me semble équilibré et raisonnable.

Point clé : nous avons également obtenu qu’aucune compagnie pratiquant du dumping social ou fiscal ne puisse accéder à ces créneaux aériens cédés par Air France.

M. Fabien Gay. J’en doute !

M. Bruno Le Maire, ministre. Je serai particulièrement vigilant sur le respect de cet engagement pris par la Commission européenne.

Notre ambition de long terme est très simple : faire d’Air France la compagnie aérienne la plus respectueuse de l’environnement de toute la planète. Nous lui demandons de renouer avec les bénéfices et d’être compétitive…

Mme Cécile Cukierman. Et les salariés ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Nous ne pouvons pas demander aux contribuables français de soutenir Air France à hauteur de plusieurs milliards d’euros sans exiger, en contrepartie, que la compagnie renoue avec les bénéfices et le succès commercial. Elle en est capable, et y arrivera ! (Applaudissements sur les travées du RDPI. – MM. Jean-Claude Requier et Loïc Hervé applaudissent également.)

Mme Cécile Cukierman. Pas un mot sur les salariés !

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour la réplique.

M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, vous considérez Roissy et Orly comme des plateformes stratégiques. C’est sans doute pour cela qu’il y a encore deux ans vous vouliez les privatiser…

Dans votre réponse, il n’y pas un mot sur la suppression des 8 500 emplois salariés prévue à l’horizon 2022 ; pas un mot sur les 30 000 postes menacés dans la zone aéroportuaire de Roissy, notamment ceux des sous-traitants d’Air France ; pas un mot concernant les salariés d’Air France qui seront maintenus dans l’entreprise mais qui devront rendre leur congé ou verront leur salaire gelé pendant cinq ans !
Bien que vous ayez changé, monsieur le ministre, vous restez enfermé dans votre dogme néolibéral, qui consiste à donner de l’argent public pour payer les licenciements et le massacre social !

Mme Cécile Cukierman. Exactement !

M. le président. Il faut conclure !

M. Fabien Gay. Nous nous en souviendrons ! Il faut d’urgence garantir les emplois et les critères environnementaux d’Air France !

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