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Nous sommes bien dans une logique de privatisation globale du bien de la nation

Avenir d’EDF -

Par / 28 avril 2016
Sénateurs communistes
Nous sommes bien dans une logique de privatisation globale du bien de la nation

Les mesures annoncées le 22 avril dernier par l’État et EDF suscitent de nombreuses inquiétudes.

Comment l’État pourra-t-il assumer une recapitalisation de 3 milliards d’euros ? En privatisant de nouveaux aéroports ! Comment l’entreprise dégage-t-elle de nouvelles marges ? En privatisant Réseau de transport d’électricité ! Nous sommes bien dans une logique de privatisation globale d’un bien de la Nation, alors que le souci de rendement à court terme des investisseurs privés n’est pas compatible avec les enjeux d’approvisionnement et de sécurité énergétiques.

Autre source de préoccupation, la direction a annoncé un plan d’économies d’un milliard d’euros. Les salariés, que nous avons rencontrés, sont très inquiets des conséquences sociales de ce plan. La sécurité, notamment le grand carénage, et la transition énergétique appellent pourtant des investissements massifs.

La seule stratégie du président-directeur général d’EDF est financière et commerciale, et elle est plutôt hasardeuse puisqu’il était prêt à engager l’entreprise dans un projet de 23 milliards d’euros, alors que tous les indicateurs sont au rouge. La seule réponse des gouvernements qui se sont succédé est également financière puisqu’elle se résume à la question des dividendes.

L’ensemble de la filière énergétique, d’EDF à Areva, a besoin d’une autre stratégie industrielle, de long terme, qui préserve les savoir-faire et le développement de la recherche pour l’ensemble des énergies, tout en préparant l’avenir et la transition énergétique.

Les syndicats et nos concitoyens le disent, la priorité d’EDF est d’assurer le service public en fournissant une électricité de qualité et compétitive au bénéfice des usagers et de l’économie française, conformément à la mission définie par ses créateurs voilà soixante-dix ans. Quelles mesures le Gouvernement, actionnaire d’EDF à hauteur de 85 %, compte-t-il mettre en œuvre pour garantir ce service public ? Va-t-il enfin renoncer aux privatisations, incompatibles avec le service public ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie. (Bravo ! et exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Monsieur le sénateur Bosino, je souscris pleinement à votre désir de voir EDF comme une entreprise forte, se trouvant au cœur de notre stratégie énergétique et nucléaire. C’est bien le choix qui a présidé à toutes les décisions prises ces derniers mois par le Gouvernement, qui a d’abord refondé cette filière de manière cohérente, en rapprochant l’activité « réacteurs » d’Areva et d’EDF, alors que la filière était jusqu’alors totalement divisée, et qui a ensuite décidé de recapitaliser EDF.

En effet, quel est aujourd’hui le principal problème de l’entreprise EDF ? Il est simple : d’une part, l’ouverture de ses prix au marché, sur le fondement de décisions prises il y a dix ans et six ans au travers de la loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l’électricité dite « NOME », et, d’autre part, l’effondrement du marché de l’électricité, le mégawattheure étant passé de 50 euros à 26 euros.

Face à ce problème, il faut en effet avoir une stratégie d’effort partagé ; c’est celle que nous avons décidé d’engager. Cela passe d’abord par l’effort de l’entreprise, à travers un plan d’économies qui s’imposait légitimement, qui est tout à fait réalisable et qui sera mis en œuvre de manière négociée avec l’ensemble du corps social de l’entreprise, en préservant les compétences – c’est d’ailleurs cela qui a conduit à des anticipations au cours de la période 2010-2015 – et toutes les règles de sûreté.

Ensuite, cela passe par l’ouverture du capital – non la privatisation de l’entreprise – lorsque des actifs le permettent. C’est le cas, vous l’avez mentionné, de Réseau de transport d’électricité, RTE, et nous allons travailler autour d’un projet industriel.

Enfin, cela passe par un accompagnement de l’actionnaire majoritaire, c’est-à-dire l’État, actionnaire à hauteur de 85 %.

Que faisons-nous pour cela ? Je ne peux pas partager le constat que vous venez de dresser, selon lequel nous aurions une vision court-termiste ! L’État, qui a prélevé, depuis l’ouverture du capital, 20 milliards d’euros de dividendes, renonce cette année, pour la première fois, à ses dividendes au titre de 2015. Il faut tout de même le rappeler ! Par ailleurs, que venons-nous de faire ? De renoncer aux dividendes pour les deux années à venir et de décider de réinjecter au moins 3 milliards d’euros.

C’est donc bien une stratégie de long terme, responsable et consistant à réinvestir dans l’entreprise qui a été fixée, dans le cadre de ces efforts partagés. En effet, nous prenons la décision d’accompagner la stratégie industrielle d’EDF, de réinvestir dans le parc des centrales, dans son entretien et dans son développement au cours des années à venir, d’investir dans les énergies renouvelables et dans les projets à l’étranger.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.

M. Emmanuel Macron, ministre. Voilà notre stratégie industrielle et notre politique d’accompagnement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Mercier applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Bosino. Évidemment, je ne suis pas du tout convaincu, monsieur le ministre. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous faites valser les milliards, mais vous n’avez pas été capable de dégager 20 millions d’euros pour créer 150 emplois au sein de l’Autorité de sûreté nucléaire, qui est une autorité incontestée.

M. Jean-Louis Carrère. Votre temps de parole est terminé !

M. Jean-Pierre Bosino. En réalité, vous n’avez pas de stratégie industrielle ; vous n’avez qu’une stratégie financière !

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