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Les questions orales

L’ensemble des questions orales posées par votre sénatrice ou votre sénateur. Au Sénat, une question orale peut, suivant les cas, être suivie d’un débat. Dans ce cas, chaque groupe politique intervient au cours de la discussion.

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Avenir de l’industrie des télécoms en France et plus précisément d’Alcatel-Lucent

Question orale sans débat -

Par / 3 novembre 2009

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, auteur de la question n° 678, adressée à M. le ministre chargé de l’industrie.

M. Bernard Vera. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur la politique industrielle de la France, et, plus largement, de l’Europe, en matière de télécommunications.

Jeudi 29 octobre, je me suis rendu sur le site de Villarceaux de l’entreprise Alcatel-Lucent, situé dans mon département de l’Essonne. À l’occasion de cette visite, j’ai discuté avec les représentants de la direction, et rencontré des salariés qui m’ont exprimé leurs inquiétudes à propos du quatrième plan de suppression d’emplois programmé par la direction du groupe depuis la fusion d’Alcatel et de Lucent en 2006.

En 2009, pour le dernier trimestre, 689 emplois sont menacés, dont 122 sur le site de Villarceaux, principalement dans les services du personnel et de la recherche et développement.

Ce quatrième plan de licenciements et la délocalisation du secteur de la recherche et développement sont les conséquences directes d’une politique draconienne de compression des coûts, que la direction justifie par la forte concurrence de pays offrant une protection sociale et des rémunérations faibles à leurs salariés, tels que les pays de l’Est, mais surtout les pays asiatiques comme la Chine et l’Inde.
Alcatel-Lucent opère dans le secteur stratégique des télécommunications, un secteur hautement sensible qu’il convient donc de protéger. Les salariés que j’ai rencontrés ont souligné, à juste titre, le danger que pourrait constituer le transfert dans des pays à bas coûts d’une industrie dont dépend la sécurité des réseaux français de télécommunications.

Monsieur le secrétaire d’État, la rentabilité financière ne peut tenir lieu de politique industrielle. Confronté à des évolutions technologiques de plus en plus rapides, le secteur des télécommunications doit relever de nouveaux défis, ce qui sera impossible sans que des choix stratégiques, clairs et offensifs, destinés à préparer l’avenir en faveur de la recherche et de l’innovation, soient formellement opérés.

La recherche est une des clés de la politique industrielle. Or, malgré l’importance du crédit d’impôt recherche dont bénéficie Alcatel-Lucent – le groupe recevrait 100 millions d’euros par an à ce titre ! –, les suppressions d’emplois et les délocalisations se poursuivent, au détriment d’une politique audacieuse de recherche et développement en France.

Ces crédits doivent faire l’objet de réelles contreparties en termes d’emploi, de recherche et développement et d’innovation. L’État a le devoir d’intervenir sur la stratégie du groupe, par exemple via le Fonds stratégique d’investissement, et doit s’assurer que les aides publiques ne se réduisent pas à des effets d’aubaine.
Un pays dont l’industrie numérique est développée attirera nécessairement d’autres industries. L’enjeu économique est donc de taille pour la France, mais aussi pour l’Europe.

Ma question sera double : quel rôle entend jouer le Gouvernement dans le soutien à l’industrie des télécommunications, et plus spécifiquement dans le cas d’Alcatel-Lucent ; quel sera son engagement en faveur de l’emploi et de la recherche et développement ?

Quelles propositions la France entend-elle porter au niveau européen afin de préserver un potentiel d’innovation et une politique industrielle offensive face à la concurrence des pays à bas coûts, ressentie comme déloyale ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, le groupe Alcatel-Lucent connaît effectivement des difficultés depuis plusieurs années. Lors de leur rencontre avec M. le ministre chargé de l’industrie, en juillet dernier, les dirigeants de ce groupe ont pris l’engagement de ne pas fermer de sites dans notre pays. Mais cet engagement important, qui est aussi une bonne nouvelle pour les salariés du groupe, ne signifie pas que ce groupe s’interdira toute restructuration ; outre les problèmes qu’il rencontre, il est en effet confronté à la crise qui affecte l’ensemble des marchés.

Le Gouvernement a pris acte de cet engagement, qui concerne en particulier le secteur de la recherche et développement, mais également de la mise en place d’un plan social de qualité.

Vous avez évoqué, monsieur le sénateur, l’incidence du crédit d’impôt recherche, et je vous remercie du jugement positif que vous avez bien voulu émettre sur cette mesure. L’État consacrera globalement 5,8 milliards d’euros au crédit d’impôt recherche en 2009. En triplant le taux de ce crédit, le Gouvernement en a fait le dispositif fiscal le plus incitatif en Europe en matière de recherche et développement du secteur privé, ce qui a été interprété par les entreprises comme un geste fort. Ce dispositif n’est ainsi pas étranger à la décision d’Alcatel-Lucent de maintenir ses activités en France.

Le Gouvernement a par ailleurs fait le choix de renforcer les pôles de compétitivité. Au cours de l’été 2008, le Président de la République a réaffirmé l’engagement de l’État en prenant la décision d’y investir 1,5 milliard d’euros sur trois ans. Le secteur des technologies de l’information, au travers notamment de l’investissement public massif sur le site de Crolles, à hauteur de 115 millions d’euros en 2009, est au cœur de cette politique de promotion et de soutien de ces pôles.

L’ensemble de ces mesures crée en France un environnement favorable à la recherche et développement, auquel sont sensibles les entreprises qui veulent consacrer des moyens à ces activités.

Dans ce contexte, le Gouvernement veillera, bien sûr, à ce qu’Alcatel-Lucent respecte ses engagements et se mobilisera pour que cette entreprise préserve un maximum d’emplois dans notre pays. Nous serons très vigilants sur ce dossier, qui concerne le dernier grand équipementier de télécommunications présent dans notre pays.

Vous m’avez aussi interrogé, monsieur le sénateur, sur la politique industrielle française dans le domaine des télécommunications.

Le Gouvernement mène une politique active, dont témoignent l’instauration de la quatrième licence de téléphonie mobile 3G, le dividende numérique et les expérimentations innovantes en matière de services mobiles sans contact. De toutes ces initiatives, nous attendons une dynamisation de ce secteur, qui devrait faire de la France un pays pionnier.

Par ailleurs, la loi de modernisation de l’économie a établi un cadre destiné à faciliter le déploiement de la fibre optique, comprenant plusieurs mesures phares : le pré-équipement des bâtiments neufs à compter de 2010, la création d’un droit au très haut débit, ou encore la mutualisation des câblages établis dans les immeubles.

La loi de modernisation de l’économie comporte également une disposition très importante pour les collectivités territoriales : l’obligation pour les opérateurs de communiquer leurs informations sur les infrastructures et les réseaux établis sur leur territoire.

Par ailleurs, les états généraux de l’industrie, lancés par le Gouvernement le 15 octobre dernier, doivent contribuer à maintenir sur le sol français des pans entiers de ce secteur. À l’occasion de leur ouverture, Christian Estrosi a d’ailleurs fait plusieurs propositions concernant l’augmentation de la part des produits innovants dans nos productions industrielles, le renforcement de l’effort vers la recherche et développement, et la mutation vers le développement durable. Ces propositions seront discutées dans le cadre de ces états généraux, qui devraient s’achever en février 2010 à l’issue d’un travail national et régional participatif au travers d’un site internet dédié.

Les technologies de l’information et de la communication sont particulièrement concernées par ces débats qui doivent conduire à une nouvelle politique industrielle française ; les équipementiers en télécommunications devraient y trouver toute leur place.

Vous le constatez, le Gouvernement mène une politique cohérente et ambitieuse, qui permettra de développer le potentiel des entreprises françaises et profitera à l’ensemble de nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de ces explications que j’ai écoutées avec attention. J’ai bien entendu que le Gouvernement entendait faire respecter les engagements pris par Alcatel-Lucent. Pour ma part, je serai attentif à la traduction concrète de ces engagements.

Je ne sais pas si les salariés d’Alcatel-Lucent seront rassurés par vos propos. Je sais, en revanche, qu’ils expriment de fortes attentes en ce qui concerne la mise en œuvre, par les pouvoirs publics, de moyens permettant de soutenir l’emploi et la recherche et développement dans leur entreprise. L’ensemble des salariés du groupe manifestera d’ailleurs, dans toute l’Europe, le 10 novembre prochain et, en France, devant le siège de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, dont il convient de relativiser l’indépendance.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que plusieurs pays, notamment la Chine, lancent de vastes programmes d’investissement, de recherche et développement, il est préjudiciable que l’Europe et la France abandonnent progressivement le secteur des télécommunications, dont dépendent pourtant notre indépendance et notre sécurité nationale.

Je considère, avec les sénateurs du groupe CRC-SPG, que l’État doit intervenir fortement pour soutenir une véritable politique industrielle publique permettant d’intégrer le capital d’entreprises hautement stratégiques comme Alcatel-Lucent et de donner de nouveaux droits aux salariés afin qu’ils puissent intervenir dans les choix stratégiques de ces entreprises.

Pour ma part, je vais déposer de nouveau une proposition de résolution tendant à instituer une commission d’enquête, afin d’examiner les causes et les conséquences des différents plans sociaux chez Alcatel-Lucent, car je crains que, parmi les licenciements concernés, beaucoup ne s’apparentent à des licenciements boursiers.

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