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Les questions orales

L’ensemble des questions orales posées par votre sénatrice ou votre sénateur. Au Sénat, une question orale peut, suivant les cas, être suivie d’un débat. Dans ce cas, chaque groupe politique intervient au cours de la discussion.

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La formation professionnelle profite essentiellement aux cadres, alors qu’elle devrait s’adresser d’abord aux demandeurs d’emploi

Adéquation de la formation professionnelle aux besoins des demandeurs d’emploi -

Par / 12 juin 2014

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après l’échec patent de l’inversion de la courbe du chômage et au regard des prévisions économiques, tout nous porte à croire que la situation n’est pas prête de s’améliorer. Le taux de chômage, avec 9,7 %, atteint des proportions considérables. Toutes catégories confondues, la France métropolitaine compte aujourd’hui plus de 5 millions de demandeurs d’emploi.

Pour entrer dans le détail, les moins de vingt-cinq ans sont toujours les premières victimes du chômage, avec un taux de 23 %, malgré la mise en œuvre des emplois d’avenir et des contrats de génération. De l’autre côté du « marché du travail », qui s’apparente plus que jamais à une essoreuse, se trouvent les salariés de plus de cinquante ans. Mais, plus généralement, ce sont les plus précaires et les plus éloignés de l’emploi qui sont le plus touchés par le chômage.

Il faut d’ailleurs se demander pourquoi tant de contrats aidés à destination de ces publics jeunes ou précaires ne mènent pas à de l’emploi durable. Ces contrats précaires sont-ils suffisamment conditionnés à des exigences de formation ? C’est une question de fond, car les salariés les plus soumis aux aléas économiques et au chômage sont d’abord et avant tout les précaires.

Ces éléments me permettent une affirmation que nous serons certainement nombreux à formuler : le haut niveau de formation, initiale et continue, des salariés constitue le meilleur bouclier face au chômage. Soit il permet de ne pas subir une perte d’emploi, notamment en anticipant un certain nombre de mutations économiques, soit il facilite le retour à l’emploi des salariés qui en sont temporairement privés. Indiscutablement, la formation constitue un important levier contre le chômage.

Certes, comme l’indique l’intitulé de la question posée par notre collègue Jean Desessard, il y aurait un problème d’adéquation des formations des demandeurs d’emploi à leur recherche de travail ou aux emplois dits « en tension » – 400 000, dit-on, ne seraient pas pourvus. Cela est à vérifier, mais surtout à relativiser. Il faut également souligner la nature même de certains emplois, sous-payés, peu qualifiés et, donc, peu attractifs.

Par ailleurs, comme nous l’avions déjà dénoncé, le compte personnel de formation, qui se substitue au droit individuel à la formation, repose sur une même logique assurantielle selon laquelle les droits qui peuvent être cumulés par les salariés sont en rapport avec leur temps de travail effectif.

En clair, les salariés à temps partiel sont soumis à la règle dite du prorata temporis, selon laquelle un salarié qui travaille « à mi-temps » toute l’année accumule deux fois moins de droits à la formation qu’un salarié à temps complet. Pourtant, les salariés à contrats précaires sont précisément ceux qui risquent le plus facilement de basculer dans le chômage, et qui, par conséquent, auraient besoin de davantage de formation.

Cette règle de la proratisation des droits à la formation professionnelle contribue donc à éloigner les plus précaires de la formation professionnelle, alors même qu’ils en ont sans doute le plus besoin. Les chiffres pour l’année 2012 sont significatifs : 66 % des diplômés à bac+2 ont suivi au moins une formation dans l’année, contre 25 % des personnes sans diplôme. Ce sont les cadres qui accèdent le plus à la formation.

Quant aux salariés privés d’emplois, ils sont peu nombreux à accéder à la formation professionnelle, alors même qu’elle constitue pour eux une chance réelle de quitter la spirale du chômage.

Bien entendu, la création du compte personnel de formation et la transférabilité partielle des droits acquis durant la carrière professionnelle participent à renforcer les capacités d’accès des salariés privés d’emploi à la formation.

Mais les délais d’entrée dans une formation sont unanimement considérés comme trop longs : sept mois en moyenne. De tels délais contribuent à fragiliser l’entrée des salariés privés d’emploi dans une formation.

M. Jean Desessard. Exactement !

M. Dominique Watrin. Certains demandeurs d’emploi proches de l’expiration de leurs droits à indemnisation renoncent à s’engager dans un projet de formation qui ne serait plus indemnisé par Pôle emploi.

En réalité, la faiblesse des fonds dédiés à la formation professionnelle des salariés privés d’emploi, qui atteint 900 millions d’euros seulement – malgré une progression de 300 millions d’euros – ne devrait pas permettre d’inverser une situation où seulement 12 % des fonds de la formation professionnelle bénéficient aujourd’hui aux demandeurs d’emploi.

À cet égard, il n’est pas inutile de rappeler que, lorsque l’on interroge les salariés privés d’emploi sur les raisons de leur renoncement à la formation professionnelle, 20 % d’entre eux estiment que la première barrière est le coût de ces formations.

Par ailleurs, les salariés privés d’emploi les moins formés ou les plus éloignés de l’emploi souffrent d’un manque de prérequis, qui complique leur formation, pour ne pas dire l’accès à la formation elle-même.

D’après un rapport de l’IGAS, « la complexité du parcours d’entrée en formation est telle qu’elle opère d’ores et déjà une sélection en faveur des plus qualifiés. Lors de l’élaboration de son projet de formation, le demandeur d’emploi peut bénéficier de l’assistance du service public de l’emploi, qui n’a cependant pas toujours les ressources nécessaires pour le conseiller adéquatement ».

Se pose donc la question légitime de l’accompagnement des salariés privés d’emplois et singulièrement des moyens financiers et humains consacrés à cet accompagnement, qui font aujourd’hui cruellement défaut à Pôle emploi.

Tout cela me conduit, monsieur le ministre, à vous interroger sur les observations formulées par la Cour des comptes dans son rapport de 2013 consacré aux politiques en faveur du marché du travail. La Cour « déplore la détérioration du ciblage des dispositifs réservés aux demandeurs d’emploi depuis le début de la crise de 2008 ». Les sages de la rue Cambon mettent en évidence que les contrats aidés et les dispositifs de reclassement, tels les contrats de transition professionnelle, ne bénéficient pas aux moins qualifiés et que les bénéficiaires des contrats de professionnalisation sont déjà diplômés. En particulier, pour reprendre les termes du rapport, « le remplacement en 2011 des conventions de reclassement professionnel, les CRP, et des contrats de transition professionnelle, les CTP, par le contrat de sécurisation professionnelle, le CSP, […] ne s’accompagne que de progrès modestes en termes de ciblage. Ainsi, le nouveau contrat demeure limité aux licenciés économiques. » Ces observations conduisent la Cour à formuler le constat suivant : « Compte tenu de la diversité des formes de rupture de contrats liées aux mutations économiques, c’est donc toujours un statut juridique qui reste le critère d’accès au contrat de sécurisation professionnelle et non une appréciation de la distance à l’emploi des bénéficiaires. »

Souhaitant renforcer la logique du compte personnel de formation, nous soutenons au contraire, pour notre part, l’idée que la transférabilité des droits doit être totale, et ce quel que soit le mode de rupture du contrat de travail, y compris en cas de démission.

Par ailleurs, vous le savez, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC nourrissent avec d’autres, des syndicalistes ou des économistes, le projet de création d’une sécurité sociale professionnelle, qui agirait simultanément sur deux leviers : la sécurisation de l’emploi et le renforcement du droit effectif à la formation initiale et professionnelle.

Nous militons donc pour un renforcement sans précédent des fonds dédiés à la formation professionnelle, à l’inverse de ce qui est prévu dans la dernière loi relative à la formation professionnelle, qui a supprimé partiellement l’obligation légale de financement qui pesait jusqu’alors sur les employeurs.

Aussi, dans l’attente d’une nouvelle stratégie, nous soutenons l’idée qu’il faut encore grandement améliorer la portabilité des droits pour les demandeurs d’emploi, en permettant notamment à ceux qui le souhaitent et qui remplissent les conditions d’obtention, lors de la rupture de leur contrat de travail, d’un compte personnel de formation de mobiliser leurs droits pour financer une formation ou compléter le financement d’une formation. Une telle mesure, monsieur le ministre, aurait pu ou plutôt aurait dû figurer au sein de l’accord sur l’assurance chômage.

En conclusion, puisque tout le monde, à gauche comme à droite, s’accorde à dire que notre régime d’indemnisation du chômage a joué son rôle d’amortisseur social lors de la crise financière de 2008–2009, c’est bien une politique beaucoup plus volontariste qu’il faudrait mettre en œuvre pour promouvoir la formation des demandeurs d’emplois. Puisse ce débat, que nous devons à M. Desessard en particulier, aider le Gouvernement à s’engager dans cette voie.

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