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Les questions orales

L’ensemble des questions orales posées par votre sénatrice ou votre sénateur. Au Sénat, une question orale peut, suivant les cas, être suivie d’un débat. Dans ce cas, chaque groupe politique intervient au cours de la discussion.

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Violences faites aux femmes

Par / 19 mars 2009

Monsieur le Président,
Madame la Secrétaire d’Etat,
Mes chers collègues,

Les violences dont sont victimes les femmes, particulièrement au sein du couple, ne peuvent que nous alerter sur le poids même d’une société qui se construit toujours, malgré de notables évolutions, sur la domination masculine dans les rapports sociaux de sexes.

Les violences faites aux femmes constituent la violation des droits humains la plus répandue. Il s’agit d’une problématique qui se trouve au croisement d’une question de société et d’une question individuelle. Lorsqu’une femme sur 10 est victime de violences dans son couple, on voit bien qu’il s’agit d’un phénomène largement inscrit dans notre société basée sur le patriarcat. En même temps, les comportements individuels s’inscrivent dans des rapports sociaux basés sur la domination masculine.

Malgré des conquêtes fondamentales, fruit des luttes collectives des femmes, les inégalités entre les femmes et les hommes perdurent dans notre société, et ces inégalités constituent le terreau sur lequel se construisent les violences envers les femmes .

Le 4 février dernier, l’observatoire des inégalités, révélait que l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes était de 33% en moyenne, atteignant 44% pour les ouvriers. Cette différence, s’explique principalement par le travail à temps partiel subi qui touche particulièrement les femmes : à horaires inférieurs, salaires inférieurs. Il n’en demeure pas moins que plus on s’élève dans la hiérarchie des salaires, plus l’inégalité entre hommes et femmes est forte. L’écart va de 6 % chez les employés à 30 % chez les cadres supérieurs.

Les violences faites aux femmes sont encore trop souvent niées et pourtant leur ampleur et leur dangerosité doit nous alerter. Selon les études de l’Observatoire National de la Délinquance, 47 573 faits de violences à l’égard des femmes ont été enregistrés en 2007 par les services de gendarmerie ou de police. Ce chiffre,est en nette progression par rapport à 2004 (il y avait alors 36 231 faits enregistrés),il doit nous conduire, nous, législateur, à chercher toujours les moyens les mieux adaptés pour répondre à ce qui s’apparente à un véritable fléau.
Ce chiffre est d’ailleurs en dessous de la réalité. Pour s’en convaincre, il suffit de lire le rapport remis en février 2009 par l’Observatoire de la parité entre les hommes et les femmes, selon lequel seuls 12% des violences font l’objet d’un dépôt de plaintes. Selon une enquête de l’INSEE, 6% des femmes ayant entre 18 et 59 ans ont été en 2005 victimes d’injures à caractère sexiste, et 2,5% d’entre elles auraient été victimes d’une agression physique.!
A ce triste tableau s’ajoutent les 130 000 viols dénoncés par l’OND et les 166 assassinats de femmes par leur partenaires ou ex partenaire violent en 2007.

J’ai cité tous ces chiffres pour indiquer qu’il y a urgence à mieux protéger les femmes victimes de violences. Cela suppose de les encourager à porter plainte, de mieux les accueillir, de mieux les accompagner dans leurs démarches. Oui, Madame la Ministre, il faut encore que le nombre de plaintes augmente, non pas parce que les violences augmentent mais parce que les femmes osent davantage porter plainte. Et je ne pense pas qu’il faille une ènième mission. Le phénomène est connu, sans doute encore sous-évalué.
A ce stade de mon intervention, je voudrais que nous nous posions collectivement une question. La législation actuelle est-elle suffisante ou faut-il la faire évoluer ?
Au groupe CRC - SPG, nous considérons que la loi du 4 avril 2006 renforçant la répression des violences au sein du couple, résultant de l’examen commun de deux propositions de lois, dont l’une portée par notre groupe, a apporté une évolution importante et notable dans la prise en compte de ces violences et leurs sanctions.
Il faut aller plus loin en proposant par exemple une ordonnance de protection pour les femmes victimes de violences. Ceci correspond également aux conclusions du rapport de la mission d’évaluation du plan global 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes. L’Observatoire Départemental des violences envers les femmes de la Seine-Saint-Denis qui accomplit un travail remarquable, a analysé les homicides de femmes et fait également cette proposition.

Pour lutter efficacement contre les violences envers les femmes , il faut développer quatre axes en complément de ceux dont j’ai déjà parlé.
D ’abord l’information et la sensibilisation de toute la population sur les mécanismes de la violences masculine et la dangerosité des hommes violents. C’est pourquoi je propose une grande campagne radio, télévisé et d’affichage sur ce thème.
Ensuite, la formation des professionnels, de tous les profesionnels, ceux de la police, de la justice, de la santé, les travailleurs sociaux, les professionnels de l’enfance, de l’enseignement afin de leur permettre de mieux connaître pour mieux aider les femmes victimes de violences.

Nous partageons aussi l’analyse de l’Observatoire de la parité entre les hommes et les femmes pour qui la législation doit évoluer, afin d’y intégrer un volet préventif et éducatif qui fait cruellement défaut à la législation actuelle. Ceci d’autant plus que nous savons aujourd’hui combien les enfants et les jeunes souffrent des violences dont leurs mères sont victimes, il est important de prendre en compte le fait que les enfants sont des victimes des violences dans le couple.
Il ne peut y avoir de lutte efficace contre les violences faites aux femmes qu’en intervenant sur tous les leviers : prévention, éducation, apprentissage à la mixité, sanctions, protection, lutte contre les inégalités salariales et contre l’image dégradée de la femme.

Je dois d’ailleurs dire combien je regrette que la majorité UMP du Sénat ait profité de l’examen par notre Assemblée, d’un projet de loi de transposition d’une directive européenne contre les discriminations, pour autoriser, contre l’avis de la délégation aux droits des femmes, que perdure dans les médias et particulièrement dans la publicité, l’usage de stéréotypes et d’une conception dégradée de la femme. Tout comme je regrette, alors que l’apprentissage de la mixité doit impérativement se construire à l’école dés le plus jeune âge, que la majorité ait accepté, sous un prétexte fallacieux, de revenir sur le principe républicain primordial de mixité à l’école.
Nous proposons également, de faire de cette politique préventive une véritable mission de l’éducation nationale, en incluant par exemple, dans le code de l’éducation, les principes d’éducation non sexiste.

Nous proposons aussi de modifier le code de la consommation afin de créer une nouvelle catégorie de publicités illicites : celles présentant les femmes de manière attentatoire à leur dignité. Il est grand temps de réaffirmer que les corps des femmes ne sont pas des supports publicitaires.

Votre gouvernement, Madame la Secrétaire d’Etat, veut faire des violences faites aux femmes, une grande cause nationale. C’est une bonne chose à condition de sortir de la logique d’annonces pour enfin proposer du concret.

La législation, j’en suis convaincue, doit donc évoluer. Les chercheurs l’affirment, les associations le demandent, il faut impérativement intégrer à la loi un volet préventif, comme nous l’avions fait en 2006 sous la forme d’amendements, et comme nous l’avons fait en 2007 en déposant, à l’ Assemblée Nationale et au Sénat, une proposition de loi cadre issue du travail collectif d’associations et de mouvements féministes et comprenant 115 articles, qui de la prévention à la sanction couvrent tous les aspects des réponses nécessaires pour éliminer enfin ce fléau !!

Le 25 Novembre 2008 ; à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes, ces associations ont redit l’urgence de l’adoption d’une loi cadre en apportant à l’Assemblée Nationale plus de 16 000 pétitions recueillies dans tout notre pays . Une mission d’information a même été crée , cette proposition de loi cadre, à l’image de ce qui a été fait en Espagne est à la disposition du gouvernement, il suffit de la mettre en débat
De plus prendre en compte les propositions de pays les plus avancés dans ce domaine , serait le signe que nous soutenons l’idée de l’application, en Europe de la « clause de l’Européenne la plus favorisée ».

Telle est la proposition qu’au nom du groupe CRC - SPG, je formule aujourd’hui.

Quelques extraits de ce qui est contenu dans notre PPL, nous considérons qu’il faut impérativement modifier les dispositions pénales pour que les femmes qui déclarent avoir été victimes de violences conjugales, ne puissent plus encourir le risque de poursuites pénales pour dénonciations calomnieuses.

Nous proposons d’apporter des réponses concrètes aux difficultés financières que peuvent rencontrer les femmes victimes de violences au sein du couple, dont tout le monde sait qu’elles peuvent être une entrave dans leur volonté de quitter le domicile commun. Certes la législation prévoit que les femmes maltraitées soient prioritaires dans l’attribution de logements sociaux. Mais la réalité Madame la Secrétaire d’Etat, c’est qu’en raison de la pénurie de logements sociaux, dont votre gouvernement et les élus de votre majorité sont responsables, cette priorité reste trop souvent un principe. C’est pourquoi nous entendons réformer la politique des aides sociales pouvant prendre la forme d’une aide d’urgence, déblocable dans le mois et équivalent à six mois de salaire. Cette mesure rentrerait dans les droits qu’ouvrirait l’ordonnance de protection dont j’ai déjà parlé.

Enfin, sur le plan pénal, nous proposons de modifier la notion de violence afin d’y intégrer la notion de harcèlement moral et sexuel au sein du couple, comme cela existe dans le code du travail.

Vous le voyez Madame la Secrétaire d’Etat, mes chers collègues, le champ d’intervention dans la lutte contre les violences faites aux femmes est important.

C’est pourquoi, je veux dénoncer les risques qui pèsent sur le Service aux Droits des Femmes et à l’égalité. Son existence est menacée, en raison de l’application à ce service de la fameuse RGGP.( dont le R de Réforme se traduit sur le terrain par Réduction ) La fermeture de ce service qui joue un rôle très important, serait dans ce contexte un très mauvais signal. Je vous demande donc de revenir sur ce projet de fermeture résultant de la seule analyse comptable.

Dans le même état d’esprit, nous considérons - et je vous ai récemment interrogé par courrier sur ce sujet Madame la Secrétaire d’Etat - qu’il est temps, comme le recommande le Conseil Économique Social et Environnemental, de créer un ministère de plein exercice aux droits des femmes.

Non que nous remettions en cause votre personne, mais dans ce domaine des violences, nous avons besoin d’un véritable effort national, parce que lutter contre les violences faites aux femmes exige, il faut le dire, une forte volonté politique assortie de moyens humains et financiers, que votre gouvernement Madame la Secrétaire d’Etat, n’est pas disposé à débloquer. Dès lors, et malgré la volonté qui est - je le sais - la vôtre, il y a fort à craindre que les violences faites aux femmes comme grande cause nationale ne soient qu’un effet d’annonce. Tout n’est pas budgétaire, mais des moyens, il en faut et dans la transparence. Or, dans ce contexte de crise économique et sociale, il semblerait que votre gouvernement fasse d’autres choix. Pourtant, les violences faites aux femmes coûtent cher à la société, selon une estimation du service aux droits des femmes, le coût s’élèverait à 1 milliard d’euros. Je propose d’inscrire cette même somme pour lutter contre ce fléau !!
Le choix fait par le gouvernement est inverse : face à l’explosion des besoins, vous tarissez les ressources.

J’en veux pour preuve la situation dramatique de l’accueil d’urgence, dont chacun sait ici le rôle fondamental qu’il devrait jouer pour permettre aux femmes de se soustraire aux compagnons violents, mais qui en raison de votre politique budgétaire, se trouve dans une situation de quasi indigence. Cette compétence, pourtant nationale dans les textes, est trop souvent assumée par les départements. Cet échelon territorial qui trop souvent intervient pour compenser un Etat défaillant dans le domaine de la solidarité, est aujourd’hui menacé. Si l’Etat ne prend pas toutes ses responsabilités, qu’adviendra-t-il de ces centres ?

Enfin permettez-moi de rendre ici hommage aux associations, nationales, départementales, locales qui par leur réseau de proximité viennent quotidiennement en aide aux femmes victimes aux côté des professionnels de terrain. Ces associations, ces professionnels manquent cruellement de moyens. Il faut renforcer l’aide financière à ces associations, renforcer le service public de proximité qui montre tous les jours leur efficacité.

Le chantier est immense Madame la Secrétaire d’Etat, pourtant, soyons tous convaincus qu’en avançant sur ce sujet, en faisant reculer les violences faites aux femmes, c’est bien toute la société que nous ferons avancer.

Pour qu’enfin s’agissant des femmes décédées sous les coups de leur conjoint nous puissions faire notre le slogan de la « Marche Mondiale des Femmes contre la violence et la pauvreté » et dire No More ;
Ni una mas,
Pas une de plus !!

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