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Préservation et développement de l’industrie du textile

5 juillet 2001

PROPOSITION DE LOI

Visant la préservation et le développement des industries du textile et de l’habillement,
PRÉSENTÉE

Par MM. Ivan RENAR, Pierre LEFEBVRE, Jean-Yves AUTEXIER, Mme Marie-Claude BEAUDEAU, M. Jean-Luc BÉCART, Mmes Danielle BIDARD-REYDET, Nicole BORVO, MM. Robert BRET, Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Gérard LE CAM, Mme Hélène LUC, MM. Roland MUZEAU, Jack RALITE, Mme Odette TERRADE et M. Paul VERGÈS,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires sociales sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’industrie du textile et de l’habillement perd aujourd’hui 2 000 emplois par mois. On ne dénombre pas moins d’une trentaine de plans de restructuration. Il est nécessaire d’agir rapidement.

Les auteurs de la proposition de loi s’inscrivent dans le cadre du débat sur le projet de loi de modernisation sociale remettant en cause les licenciements boursiers. Lors de l’examen en première lecture, ils ont proposé de mettre hors la loi de tels licenciements boursiers, de sanctionner financièrement et fiscalement les entreprises bénéficiaires qui licencient et d’instituer de nouveaux droits pour tous les salariés. La loi sur la modernisation sociale, suite à l’intervention des parlementaires communistes a déjà été améliorée. D’autres étapes (le gouvernement a par exemple annoncé une loi sur la démocratie sociale) offriront de nouveaux espaces pour mettre en cause le pouvoir discrétionnaire des actionnaires.

A la fin des années soixante, les industries du Textile-Habillement-Cuir employaient près d’un million de personnes, dont environ 800 000 pour la filière du textile et de l’habillement stricto sensu (filature, tissage, ennoblissement, textile à usage industriel et technique, confection...). Celle-ci contribuait à hauteur de 13,5% de la production de l’ensemble de l’industrie manufacturière. Et, bien que principalement destinée au marché domestique, sa production trouvait aussi des débouchés extérieurs garant d’un confortable excédent commercial (environ 7 milliards de francs, en volume).

Au cours de la décennie 1970, les données s’inversent. Un processus continu de régression s’enclenche, qui atrophie progressivement la base productive des industries du T&H (délocalisation des productions, fermetures de sites, concentration...).

En termes d’emplois, la facture est lourde : en trente ans, la filière aura perdu plus des deux tiers de ses effectifs, soit une hémorragie d’environ 20 000 emplois chaque année.

Parce qu’elle marque une rupture durable, l’inversion du solde commercial à la fin des années soixante-dix constitue un élément plus tangible encore de la nature de l’amenuisement des capacités productives (- 1,6 milliards de francs, en volume, 1979). A partir de cette date, et exception faite de quelques segments de la filière, le déficit commercial ne cesse de se creuser. Fin 1999, il atteint 30 milliards de francs. Cette dégradation révèle, entre autres, une incapacité, désormais structurelle, de cette industrie à répondre à la demande intérieure, notamment lors des périodes d’embellie conjoncturelle.

Au rang des facteurs explicatifs de cette atrophie de la base productive des industries du T&H figure la stratégie de restauration de profit par délocalisation des productions à faible valeur ajoutée vers les pays à bas salaires.

En réaction, celle-ci provoque un ensemble de réponses défensives de la part des pays industriels. L’AMF mis en place dans le cadre du GATT en 1974 participe de ces réponses qui, dans un premier temps, permettent, mais sans l’inverser, de ralentir le processus de délocalisation.

Au début des années quatre-vingt-dix, un certain nombre de pressions, s’exercent en faveur d’un abaissement du coût du travail (allègement des cotisations sociales) au niveau national et d’un relèvement des droits de douanes au niveau européen pour freiner le processus de délocalisation1(*).

Dans les faits, la délocalisation constitue la réponse offensive des producteurs face à la baisse de leur rentabilité et à l’exacerbation d’une concurrence d’envergure européenne ou mondiale (régionalisation / marché européen versus mondialisation / marché mondial).

L’accroissement du chômage, l’engagement sur la voie de la modération salariale (désindexation des salaires, désinflation compétitive) dès le début des années 80, n’ont pu qu’accuser plus encore les difficultés des segments de la filière particulièrement sensibles à la consommation des ménages. Entre 1980 et 1995, la part consacrée aux dépenses d’habillement dans le budget des ménages a diminué de près de deux points (de 5,9% à 4,3%).

Dans un contexte de ralentissement général de la croissance, les producteurs affinent leur stratégie en cherchant à se spécialiser sur des créneaux à forte valeur ajoutée. Rationalisant fortement leur outil de production (les gains de productivité sont de l’ordre de 2% l’an), ils profitent aussi de la financiarisation de l’économie, permissive au transfert des droits de propriété du capital, pour essayer d’atteindre une taille critique au niveau européen, voire à une échelle plus vaste, en privilégiant les activités de négoce.

Si, incontestablement la financiarisation a favorisé la restructuration et la concentration du capital visant la restauration du profit, elle a aussi conduit à des pratiques où logique financière et logique industrielle se sont étroitement mêlées, pouvant dériver sur des logiques financières pures s’apparentant à une véritable « économie de casino ». La bataille financière Chargeurs-Prouvost, l’affaire Boussac-Saint-Frères sont les exemples les plus significatifs des cas de dérive financière où le capitalisme n’a pas résisté à la tentation purement spéculative.

En outre, la phase de financiarisation des économies débouche dans les années quatre-vingt-dix sur le développement d’un capitalisme « actionnarial » ou pour le dire autrement un capitalisme de rentiers exigeant sur le très court terme, pour ne pas dire au jour le jour puisque pratiquement indexé sur l’évaluation quotidienne de la valeur boursière, des taux de rendement du capital physique exorbitants et qui, au regard de l’histoire ne peuvent a fortiori servir de norme au rendement réel du capital2(*).

Car, à n’en pas douter, exiger du point de vue de la production, un taux de rendement du capital investi3(*) de l’ordre de 15 à 17%, fruit de l’estimation actuelle du marché boursier, constitue un cas d’aberration que d’aucuns devraient méditer. Asseoir le rendement réel du capital sur un rendement boursier instable car fruits des prévisions, estimations, jugements et, en dernière instance, exigences de sociétés spécialisées d’investissement (les fonds de pension) qui, « fétichistes de la liquidité », sont déconnectés des conditions réelles de la production consistent à renouer avec des pratiques d’un capitalisme « dé-réglé ».

Dans les faits cela ne peut se traduire que par une accentuation des pressions sur l’emploi et les coûts (au premier rang desquels pour les industries intensives en main-d’oeuvre, les salaires) avec comme réponses une externalisation des coûts (développement de la sous-traitance aussi bien étrangère que domestique), une utilisation des nouvelles technologies au service de la rationalisation de la production, une dégradation des conditions de travail et la poursuite des licenciements et des fermetures de sites.

Rien qu’au cours de la décennie 1990, la filière textile-habillement-cuir embarquée dans cette dynamique régressive aura perdu plus de 100 000 emplois. DMC qui s’est séparé au cours de ces trois dernières années de près d’une dizaine de ses activités et sites, se désengage aujourd’hui de sa branche la plus importante. Amédée Prouvost, ferme la lainière de Roubaix (Nord), symbole du textile français, alors que Chargeurs s’oriente vers une externalisation de l’ensemble de ses activités industrielles (tissage, filature, entoilage, ...). Et tandis que Rhône-Poulenc démantèle son secteur des textiles chimiques, Devanlay se sépare de certaines de ses activités en Haute Marne (Saint-Dizier) et dans l’Aube (Chaource, Romilly).

Le taux de rendement du capital investi estimé à 9% pour le secteur est pourtant confortable, mais largement inférieur à celui qu’exigent actuellement les sociétés de placements.

Ces faits éclairent les prévisions sectorielles pour l’année 20014(*) qui tablent sur une chute de production de 10% pour le textile, de 2,5% pour l’habillement et de 10% pour la chaussure.

Les salariés qui, depuis des années, ont multiplié leurs efforts en vue de la préservation d’un outil de travail de plus en plus soumis aux aléas des marchés et aux humeurs de la bourse, sont acculés au désespoir. Face aux fermetures et aux plans sociaux qui se multiplient, la rhétorique de la fatalité perd de sa crédibilité.

Lorsque les milieux d’affaires sous la pression des marchés financiers renouent avec des pratiques d’un capitalisme « dé-réglé », on peut s’attendre à ce que les salariés en viennent eux-mêmes à renouer avec des pratiques d’une extrême violence. A Saint-Dizier, les femmes salariées chez Devanlay-Lacoste ont jugé, après avoir passé en moyenne 30 ans dans cette entreprise, qu’il n’y avait pas d’autre solution que de brûler les machines à coudre pour obtenir, au vu des bénéfices engrangés, ces dernières années « d’honnêtes » indemnités de licenciement. A Cellatex, il n’y avait, selon les salariés, « pas d’autre solution » que la menace de déverser de l’acide dans la Meuse.

Pour l’ensemble des salariés du T&H, les prévisions actuelles particulièrement pessimistes auxquelles s’ajoutent à l’horizon 2005 la libéralisation totale des échanges par le démantèlement de l’AMF ne sont guère rassurantes.

Rappelons qu’au niveau de l’Union européenne, les industries du T&H comptent plus de 2 200 000 emplois directs et 3 300 000 emplois indirects. En France, elles représentent encore environ 250 000 emplois directs et 480 000 indirects. Soulignons que l’Italie, la France, l’Allemagne représentent 65% de la production T&H de l’Union européenne. Les flux d’échange intra-communautaires demeurent majoritaires même si la concurrence asiatique a tendance à gagner des parts du marché européen.

En France, la répartition géographique des effectifs souligne l’importance de ces industries pour certaines régions particulièrement sinistrées, comme le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie5(*) (42 000 emplois à elles deux), ou encore l’Alsace et la Lorraine (près de 21 000 emplois), mais aussi pour des régions plus dynamiques comme la région Rhône-Alpes (plus de 42 000 emplois) et l’île de France (37 000 emplois) .

Du fait de leur caractère encore faiblement concentré sur certains segments, ces industries participent de la structuration et de l’intégration sociales, a fortiori dans les zones rurales où sont présentes de nombreuses petites et moyennes entreprises.

Particulièrement innovantes, aussi bien du point de vue des procédés (automatisation, CAO, dessin assisté par ordinateur, coupes au laser...), que des produits (matériaux composites, bio-textiles, agro-textiles, fibres plus résistantes, ininflammables...) potentiellement riches en emplois et en débouchés nouveaux, ces industries participent à la dynamique économique d’ensemble, ne serait-ce que par les effets d’entraînement qu’elles occasionnent sur d’autres industries.

Pour autant, non seulement les investissements demeurent extrêmement faibles mais ils sont aussi majoritairement destinés à rationaliser l’outil de production. Pour ne prendre qu’un exemple, le secteur des textiles à usage technique et industriel particulièrement porteur et potentiellement riche en emplois demeure sous-valorisé, tant sur le plan national que sur le plan européen.

Il devient urgent d’agir. La préservation de l’emploi et le développement de l’industrie du T&H supposent de faire preuve de plus de volontarisme politique.

L’on ne peut se contenter de mesures qui, loin d’endiguer le processus d’atrophie de la base productive, conduisent à une dynamique régressive (baisse des coûts, des revenus et de l’emploi). Soulignons à cet égard que le plan Borotra (exonérations fiscales) n’a pas permis de maintenir l’emploi.

Dans le contexte actuel, des mesures de ce type, qui laissent à la seule initiative privée (le marché) la responsabilité de la restructuration, outre qu’elles conduisent à un alignement vers le bas du coût du travail avec les risques de fractionnement social que cela implique, ne permettent pas de réorienter les investissements vers le maintien des capacités de production et a fortiori vers l’extension et la création de nouvelles capacités de production (nouveaux produits).

Quant aux aides financières directes (entre 1982 et 1992, la filière a bénéficié de plus de 10 milliards de francs), elles ne sont guère efficaces et ne permettent que dans de rares cas le maintien de l’emploi. Elles n’ont en tout cas pas permis d’endiguer le flux de suppression d’emplois et s’apparentent souvent au pur gaspillage.

A titre d’exemple, lorsqu’en 1984 Bernard Arnault arrive à la tête du groupe Boussac, il bénéficie d’une aide financière publique substantielle pour en assurer son redressement et sa pérennité. Après une restructuration sévère, les activités Boussac sont vendues au groupe Prouvost. Après cette acquisition, Christian Deverloy, PDG du groupe Prouvost déclare ne pas être lié par les engagements pris par Bernard Arnault auprès des pouvoirs publics.

Dans ce vaste mouvement de cessions-acquisitions, qui serait tenu, si la loi ne l’oblige, à respecter les engagements d’hier ? Aujourd’hui, de telles pratiques se développent. Le désengagement des grands groupes de l’activité de production se réalise à travers des cessions à des repreneurs souvent peu sensibles aux logiques industrielles. Dans un certain nombre de cas, ces derniers, quelques mois après avoir touché des subventions afin de moderniser et maintenir l’entreprise, ferment le site sans respecter leur engagements. Ces situations se concrétisent par une multiplication des délocalisations.

Sous la pression, en partie, des actionnaires, les délocalisations s’accélèrent et prennent une ampleur considérable.

Une aide plus efficace viserait à accorder à tout projet d’investissement engageant le long terme et assurant le maintien voire la création d’emplois, des conditions financières bonifiées.

Une véritable politique industrielle doit favoriser l’utilisation des nouvelles technologies au bénéfice des créations d’emplois. Elle doit stimuler l’investissement à long terme en même temps qu’elle doit permettre une réorientation de l’investissement vers l’extension de capacités de production (en particulier celles des nouveaux produits porteurs). L’investissement d’innovation, parce qu’il constitue un pari sur l’avenir, parce qu’il engage le long terme ne peut être soumis aux exigences d’une rentabilité estimée sur le court terme.

Par ailleurs, une politique qui se contenterait d’agir à l’aval, en concentrant ses efforts sur la formation et la valorisation des compétences des personnes faiblement qualifiées ne peut seule suffire à enclencher une dynamique vertueuse de consolidation de la croissance. Elle préservera d’autant moins l’emploi que les futures négociations internationales (2005) devraient faire de l’Union Européenne le marché le plus ouvert du monde (suppression de toutes restrictions quantitatives, instauration d’un tarif douanier le plus bas du monde : 4% à 5% pour les fils, 8% pour les tissus, 10% à 12% pour les vêtements). Dans ce domaine, l’on a de bonnes raisons a priori de penser que nos partenaires commerciaux internationaux rechigneront à s’aligner sur ce modèle européen de libéralisme.

Certes, le gouvernement a annoncé la mise en oeuvre d’une dizaine de mesures pour le T&H, se concrétisant par une aide de 200 millions de francs sur 2001.

Elles visent notamment à favoriser l’innovation (création d’un réseau d’innovation du T&H ; d’un centre national dédié aux nouvelles technologies de l’information ; d’une « cité mode » à Paris), à encourager la mise en place au niveau de la branche d’un dispositif de cessation anticipée d’activité pour les salariés, à lutter contre la contrefaçon, et à créer les conditions d’un commerce international équitable (ouverture des marchés tiers et création d’une zone euro-méditerranéenne).

Pour importantes qu’elles soient, ces mesures ne devraient pas suffire à préserver l’emploi et à relancer l’investissement.

Ces objectifs exigent sur le plan européen (« préférence communautaire ») et / ou, à défaut, sur le plan national des mesures plus offensives. Comme ils exigent sur le plan international la mise en place de normes visant à organiser la concurrence. La logique du tout au marché et du tout à l’exportation (recherche de gains de parts de marché, pression sur les coûts...) ne peut être une fin en soi. Elle place les États-nations en concurrence les uns avec les autres (les politiques de désinflation compétitive en sont un exemple flagrant) avec le risque d’un alignement vers le bas des salaires et des conditions de travail.

La préservation de l’emploi et le développement de l’industrie du T&H supposent que soient prises un certain nombre de mesures s’articulant autour de trois axes principaux :

- promouvoir des mesures sociales innovantes face aux nouvelles formes de gestion de la main-d’oeuvre qui se développent et s’imposent depuis une vingtaine d’années. Sans oublier le développement de formes plus anciennes comme le recours au travail clandestin, l’industrie du textile et de l’habillement constitue un cas exacerbé de ces nouvelles pratiques (sous-traitance, capitalisme actionnarial...) qui exigent en réponse l’intégration de nouveaux droits sociaux dans le droit du travail ;

- favoriser la formation afin notamment d’assurer le reclassement qualifiant du personnel licencié vers les secteurs innovants ;

- augmenter l’investissement productif tout en le réorientant vers l’extension des capacités de production .

En ce sens, le groupe C.R.C. propose :

- de rendre plus transparentes les relations de sous-traitance. La sous-traitance (firme-réseau) constitue depuis une vingtaine d’années une forme nouvelle d’organisation de la production. Elle est particulièrement prononcée dans le secteur du textile et de l’habillement composé de nombreuses petites et moyennes entreprises. L’actuel flou qui entoure les contrats de ce type ne permet pas d’identifier les donneurs d’ordre. Les salariés et les syndicats sont souvent démunis et soumis à une asymétrie d’information s’agissant des contrats de travail (rémunération, durée, conditions de travail...) et de leur application. Il est donc nécessaire que le code du travail soit modifié afin d’assurer une meilleure transparence dans le domaine de la sous-traitance. Le Conseil Economique et Social doit être saisi afin de préparer un rapport sur cette question (article 1) ;

- de taxer les licenciements afin de constituer un fonds de mutualisation destiné à permettre la formation et le reclassement des salariés (article 2) ;

- la création, d’un observatoire de la conjoncture du T&H qui aura pour principale mission le suivi et l’analyse de la conjoncture de la branche . Chaque année, des rencontres entre les différents partenaires sociaux auront lieu qui tenteront d’évaluer les axes prioritaires de développement de la filière, en valorisant les synergies de l’amont à l’aval. (article 3) ;

- la création d’un Centre Technique de Formation des travailleurs des industries du textile et de l’habillement chargé de la mise en place d’un dispositif de « sécurité-emploi-formation » visant à favoriser la formation des salariés et le reclassement qualifiant du personnel licencié notamment au sein des industries innovantes.

Lors des plans sociaux, ce centre met en place des cellules de reclassement et y participe afin d’éviter aux salariés qui ont souvent plusieurs années de métier, l’entrée dans la précarité (articles 4 et 5) ;

- L’incitation à la signature d’un accord de branche visant la mise en place d’un dispositif de « cessation anticipée d’activité » pour les salariés de plus de 55 ans. Sur fond de réduction du temps de travail et de modernisation des entreprises, les départs à la retraite doivent être aussi l’occasion d’embaucher du personnel nouveau (jeunes, reclassements...), de renouveler la pyramide des âges. Il doit pouvoir être créé au moins un emploi pour deux départs à la retraite.

L’accord CATS récemment signé par les syndicats CGT, FO, CFDT, CFE-CGC, conçu à l’origine pour le secteur automobile ne prend pas en compte la spécificité du secteur Textile-Habillement qui perd actuellement en moyenne 2000 emplois par mois. Cet accord ne peut être considéré que comme une première étape aboutissant à un processus plus large (article 6) ;

- En étroite association avec un « réseau d’innovation du Textile-Habillement » (dont le gouvernement a annoncé, il y a quelques mois, la création), et s’appuyant sur les études de l’observatoire sus-mentionné, la Banque de Développement des PME sera chargée d’évaluer, sur le plan régional les projets d’investissement des entreprises et de favoriser, à travers l’octroi de crédit à taux d’intérêt bonifiés, le financement de ceux qui contribuent à la création d’emplois (article 7) ;

- Favoriser dans le cadre de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail, trop souvent l’occasion d’une rationalisation, l’émergence de projets d’investissement visant le maintien et la création d’emplois. Ces projets seront transmis à la Banque de développement des petites et moyennes entreprises (BDPME) afin qu’ils puissent bénéficier de conditions bonifiées de financement (article 8) ;

- Enfin, deux articles porteront sur la compensation des charges nouvelles incombant à l’Etat de la mise en oeuvre de la présente proposition de loi (articles 9 et 10).

Tel est donc le texte que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous invitent à adopter.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

A la demande du Gouvernement, le Conseil Economique et Social sera chargé, dans un délai de six mois après la promulgation de la loi, de rédiger un rapport portant sur la sous-traitance dans le secteur du textile et habillement afin d’assurer une meilleure protection des salariés.

Ce rapport aura notamment pour objet d’émettre des propositions visant à modifier le code du travail afin d’assurer une meilleure information des salariés sur leur contrat de travail, une meilleure transparence des relations entre salariés et donneurs d’ordre.
Article 2

I. - Il est créé une taxe destinée à alimenter un fonds de mutualisation des risques liés aux licenciements dans le textile et l’habillement. Ces ressources sont constituées par le produit d’une taxe portant sur tout licenciement effectué dans la branche à compter de la date de la promulgation de la loi.

La taxe est assise sur les salaires, selon les bases et les modalités prévues aux chapitres 1er et 2 du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale.

La taxe est due par l’ensemble des entreprises des secteurs concernés et recouvrée comme en matière de taxe sur les salaires.

II. - Le fonds de mutualisation désigné, lié aux licenciements dans le textile-habillement est doté de la personnalité juridique et administré par un Conseil d’administration composé de représentants de l’Etat, des organisations syndicales représentatives de salariés et des organisations professionnelles. Son président est nommé par décret parmi les représentants de l’Etat.

III. - Lors de l’annonce d’un plan social, le fonds peut être sollicité à la demande des administrations compétentes de l’Etat, des organisations syndicales représentatives, de salariés ou des entreprises concernées.
Article 3

Il est créé un observatoire économique des industries du textile et de l’habillement.

Avec l’appui des services de l’Etat, cet observatoire sera chargé de mener des études de conjoncture dans le secteur des industries du textile et de l’habillement et soumettra, après avis et concertation des partenaires sociaux, un rapport annuel portant sur les évolutions économiques et sociales des secteurs d’activité concernés.

Le secrétariat et la gestion administrative de l’observatoire seront assurés par le Commissariat Général au Plan.
Article 4

Il est créé un Centre de Formation Technique des travailleurs des industries du textile et de l’habillement .

Etablissement public à caractère administratif, il est doté d’un conseil d’administration composé de représentants de l’Etat, des organisations syndicales représentatives des industries concernées, des organisations professionnelles, de représentants des collectivités locales, des organes de direction des établissements publics ou privés d’enseignement et de formation.

Ce centre coordonne et organise les politiques de formation mises en oeuvre dans les secteurs de l’industrie du textile et de l’habillement.

Assisté par les services de l’Etat, il accomplit des missions de diagnostic, de financement et d’évaluation des politiques de formation des entreprises du secteur.
Article 5

L’article L. 322-8 du code du travail est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. L. 322-8. - Dans les secteurs de l’industrie du textile et de l’habillement, l’agrément des actions de formation visées à l’article L. 322-7 est soumis pour avis au Centre Technique des Travailleurs des industries du textile et de l’habillement. »
Article 6

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi , le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la situation de l’emploi dans le secteur de l’industrie du textile et de l’habillement portant notamment sur :

- la réalité des emplois et des qualifications,

- la répartition géographique des entreprises du secteur,

- la mise en place d’un accord conventionnel de cessation anticipée d’activité associé à la mise en oeuvre d’un dispositif d’intégration des jeunes salariés.

Article 7

Les services de l’Etat compétents, l’Agence nationale de valorisation de la recherche, les écoles et établissements publics et privés d’enseignement et de formation, l’observatoire économique des industries du textile et de l’habillement, le Centre Technique de Formation des industries du textile et de l’habillement constituent entre eux un « Réseau d’innovation du textile et de l’habillement ».

Ce réseau est chargé de favoriser l’échange d’expériences et d’information, la diffusion de la connaissance en matière d’innovations technologiques ainsi que le développement de projets d’investissement créateurs d’emplois.

A cet égard, il entretient une coopération privilégiée avec la Banque de Développement des Petites et Moyennes Entreprises qui sera chargée de l’expertise financière et de la mise à disposition des entreprises concernées, des ressources fondées sur des prêts bancaires à taux bonifiés.
Article 8

Après l’article 21 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, il est inséré un article 21 bis ainsi rédigé :
« Art. 21 bis. - Dans les secteurs d’activité et les entreprises du textile et de l’habillement, les accords négociés de la réduction du temps de travail peuvent induire des dispositions relatives au développement des investissements et de leurs conséquences en termes d’emplois et de formation des salariés.

« Ces entreprises peuvent à cette fin renoncer au bénéfice des dispositions de l’article 21 et demander l’attribution d’aides financières à l’investissement bonifiées. L’instruction des demandes d’aides est confiée à la Banque de Développement des Petites et Moyennes Entreprises qui aura pour mission de gérer l’aide publique définie en fonction des objectifs d’embauche et de formation des salariés. »
Article 9

Le taux fixé au deuxième alinéa de l’article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence.
Article 10

Les dispositions du quatrième alinéa de l’article 978 du code général des impôts sont abrogées.

1 Cf. Franck BOROTRA, Georges CHAVANNES, « Délocalisations économiques à l’étranger », Rapport de l’Assemblée Nationale, 1993 ; Jean ARTHUIS, « Les délocalisations et l’emploi », les éditions d’organisation, 1993.

2 Précisons qu’au cours de la période de forte croissance et de quasi plein emploi, la rentabilité économique en France se situe aux alentours de 6% à 8%.

3 Le fameux ROE (Return on equity) ou retour sur investissement, manière euphémisée pour qualifier le taux de profit.

4 En valeur ; note de conjoncture du Crédit Lyonnais, janvier 2001.

5 D’après le dernier recensement de l’Insee, la région Nord-Pas-de-Calais détient l’un des taux de chômage les plus élevés (17,7% contre 12,8% au niveau national). Bien que moins élevé, le taux de chômage en Picardie est supérieur au niveau national (14, 2%).

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