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Tribunes libres

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ALUR insuffisante face à la crise du logement

Accès au logement et urbanisme rénové -

Par / 10 novembre 2013

Tribune parue dans le n°86 d’Initiatives.

La crise du logement que nous traversons actuellement n’est plus à démontrer. Trouver un logement, en zones tendues particulièrement, relève du parcours du combattant, les relations entre bailleurs et locataires sont inégalitaires. Une fois le logement trouvé, les ménages, vu le prix exorbitant des loyers consacrent aujourd’hui près de 40 % de leurs revenus pour se loger. De manière corrélative, les expulsions locatives ne cessent d’augmenter sans que les mécanismes du DALO apportent une solution efficace et pérenne.

Dans ce cadre, l’annonce du gel des APL risque de grever un peu plus leur pouvoir d’achat. C’est dans ces circonstances que le Parlement examine le projet de loi sur le logement et l’urbanisme rénové présenté par Cécile Duflot. Ce texte, qui a reçu une couverture médiatique certaine tant le sujet du logement est sensible, comporte un volet logement et un volet urbanisme. Au vu des thèmes abordés et du difficile équilibre à trouver entre affirmation du droit au logement et protection du droit de propriété, nous saluons le volontarisme affiché de la ministre. Des points positifs sont à souligner : l’assainissement de la profession immobilière visant un rééquilibrage des relations entre propriétaires et locataire, l’extension de la trêve hivernale, le maintient des APL même en cas d’impayé, le renforcement des procédures de prévention des expulsions, notamment par les Capex (Commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives), la reconnaissance et l’encadrement de la nouvelle pratique qu’est l’habitat participatif, la lutte contre l’habitat indigne et dégradé, et la prise en compte des difficultés des copropriétés dégradées. Ces mesures, sans être exhaustives, vont dans le bon sens. Toutefois, tout en reconnaissant de réelles avancées, des zones d’ombre importantes persistent, et certaines mesures ne sont pas acceptables. Le projet de loi est porteur de l’idée que la hausse des loyers que nous avons connue ces 10 dernières années n’est plus supportable tant elle est déconnectée de l’économie réelle. Pour mettre fin à l’envolée des prix, qui amenuise le pouvoir d’achat des locataires, le texte propose la définition d’un loyer médian qui serait variable sur l’ensemble du territoire.

Le mécanisme proposé prévoit que les bailleurs ne puissent pas trop s’éloigner de ce prix médian fixé par le préfet. Le prix à la location proposé pourra être au maximum supérieur de 20 % au prix médian et il ne pourra être inférieur de plus de 30 % de ce même prix de référence. S’il part d’un bon présupposé, la réussite de ce mécanisme reste cependant imprévisible. Ainsi, ce dispositif a pour inconvénient majeur de graver dans le marbre l’état du marché locatif à un moment où il est anormalement haut. Ce mécanisme risque à terme d’entraîner un renchérissement des loyers. En effet, il y a le risque que les propriétaires qui demandaient des loyers bas se sentent autorisés à les ajuster aux loyers médians, voire aux médians majorés de 20 % ou plus. De plus, la définition du loyer médian de référence pose problème et restera de fait trop élevée, s’appuyant uniquement sur des données transmises par les professionnels de l’immobilier et ne prenant pas en compte le prix des loyers du parc social ou public. Pour les sénateurs du groupe CRC, ce dispositif se contente d’accompagner la hausse des loyers. Au final, seules les catégories les plus favorisées vont pouvoir voir le prix de leur logement baisser grâce au loyer médian majoré.

Enfin, il ne faut pas oublier que le locataire, en zone tendue en particulier, entreprendra rarement les recours nécessaires vu la difficulté de se reloger. Nous considérons qu’il faut, non pas encadrer des loyers déjà très (trop) hauts, mais les faire baisser. Nous proposerons donc le gel des loyers, tant dans le secteur public (exclu du dispositif) que privé, pendant trois ans. Sur le fond, la crise du logement actuelle ne pourra se résoudre par la seule régulation du marché, mais bien et principalement par l’accroissement de l’offre, qui n’est malheureusement pas prévu par la présente loi. Concernant la garantie universelle des loyers, il existe actuellement deux types de dispositif : la garantie loyer impayé (GLI) pour les locataires gagnant moins de trois fois le loyer et la garantie des risques locatifs (GRL) pour les locataires dont les ressources sont au moins le double du montant du loyer. La GUL se veut être un mécanisme non assurantiel de protection des bailleurs contre les impayés, ce qui encore fois est une bonne chose pour les petits propriétaires.

Notons toutefois que le nombre d’impayés ne représente que 2 % à 3 % du parc privé même si ce chiffre tant à augmenter. Toutefois, le projet de loi est particulièrement incertain en renvoyant beaucoup à des décrets ultérieurs. Cette « garantie » devrait être payée par les bailleurs et les locataires à hauteur de 1 % chacun du prix des loyers. Si les bailleurs disposent d’une réelle assurance au travers de la GUL en cas d’impayés, les locataires de mauvaise foi devront rembourser quoi qu’il arrive leurs impayés. Et c’est la GUL qui définira qui est de bonne ou de mauvaise foi. Elle apparaît à ce titre particulièrement déséquilibrée, encourageant même les loyers élevés. Il existe, par ailleurs, de forts risques pour que ce soit les locataires seuls qui payent cette garantie au travers le paiement de leurs loyers. Enfin, elle risque de stigmatiser un peu plus les locataires fragilisés, puisque l’inspection générale des finances recommande la création d’un « fichier des baux » dont le but est d’écarter les mauvais payeurs du dispositif et de garantir ainsi l’équilibre économique du dispositif. Après le fichier positif en matière bancaire, c’est un fichage généralisé des pauvres à grande échelle, qui nous paraît des plus dangereux.

Au fond, cette garantie ne correspond pas à la vision que nous pourrions avoir d’une sécurité sociale du logement, mais s’apparente plus à un fonds de garantie pour les bailleurs qui pourront ainsi assurer leurs impayés. En outre, la loi n’apporte aucune solution sur la question foncière se limitant pour l’essentiel à des améliorations très techniques et très marginales, notamment sur le droit de préemption. Or la question foncière est déterminante, car elle détermine les prix de l’immobilier et donc des loyers. Sur le fond, les réformes successives de la fiscalité locale et la crise que nous traversons rendent de plus en plus difficile l’exercice de ce droit par les collectivités locales qui n’ont simplement plus les ressources pour l’exercer. Il est donc difficile de croire que ces simples mesures permettront de redynamiser le droit de préemption. C’est bien à la création de nouveaux outils fonciers et à un travail réel sur la définition même de la valeur foncière que le projet de loi aurait dû s’engager. Il est urgent notamment de redéfinir le rôle des « Domaines » qui aujourd’hui fixe le prix des parcelles en fonction des prix de marché. Des mécanismes doivent alors être inscrits permettant de lutter contre la spéculation foncière en bloquant la valeur des terrains au moment de la définition d’un projet d’aménagement évitant ainsi des surcoûts fonciers dissuasifs dans les opérations d’aménagements.

À cet égard nous proposons de sanctuariser des terrains à travers la création d’une agence nationale foncière, afin de figer les prix du foncier. Nous proposons aussi de maintenir et de renforcer la responsabilité de l’État envers le DALO, mais également envers les politiques d’insertion et d’hébergement qui constitue des missions régaliennes permettant l’égalité de traitement sur l’ensemble du territoire national. Si ce texte va dans le bon sens et s’il est porteur de quelques réelles avancées, nous espérons à travers nos amendements en faire plus qu’un texte de communication et d’affichage.

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