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Tribunes libres

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Baisser les cotisations salariales est une fausse bonne idée

Pouvoir d’achat -

Par / 13 mai 2014

Tribune parue dans Initiatives n°89.

Le 16 avril dernier, Manuel Valls, Premier ministre, détaillait le plan d’austérité – baptisé plan d’économies parce que l’austérité c’est de droite – annoncé le 14 janvier par François Hollande, Président de la République. Un bon plan marketing (vérité, efficacité, confiance) peut-il pour autant répondre aux attentes des Français, exaspérés par une succession d’annonces – relance économique, emploi, pouvoir d’achat – qui jamais ne portent le moindre fruit et qui au contraire ont toutes contribué à aggraver les inégalités, détruisant une à une les avancées sociales majeures que le Conseil National de la Résistance avait inventées et que notre peuple avait réussi à imposer dans un pays pourtant dévasté par la guerre ?

Le général De Gaulle pouvait alors dire que « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille (à la bourse) ». Mais ça, c’était avant. Les entreprises françaises ont depuis des années obtenu d’importantes réductions des « charges » tant sociales (cotisations) que fiscales (impôts sur les sociétés). Le poids des cotisations sociales employeurs dans la valeur ajoutée des sociétés n’a cessé de diminuer. Après les 22 milliards d’exonérations de cotisations employeurs, les 6 milliards du Crédit impôt-recherche, les 6 milliards de baisse de la taxe professionnelle, les entreprises ont obtenu, suite au rapport Gallois (2012), la mise en place du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui devrait leur rapporter 20 milliards d’euros par an, en année pleine. Mais le Medef persiste à réclamer une baisse de 116 milliards de l’ensemble des impôts que les entreprises supporteraient.

Le Pacte de responsabilité annoncé le 14 janvier 2014 par François Hollande se présente comme le dernier avatar de ces politiques : il prévoit la suppression totale et sans contrepartie précise des cotisations familiales employeurs (35 milliards d’euros). Le dispositif ayant vocation à fusionner avec le CICE, le besoin de financement lié au Pacte de responsabilité est généralement estimé à environ 10 milliards d’euros. Cela ne suffit pas au Medef, qui, pour envisager la création d’un million d’emplois, réclame 50 milliards supplémentaires, la remise en cause du droit du travail, une plus grande facilité pour licencier ou restructurer, la hausse des seuils imposant des obligations de consultation du personnel, la suppression des normes et réglementations des marchés, etc.… Voire une sorte de droit de veto sur les décisions susceptibles de « stresser les entrepreneurs ».

Face à cette offensive, le gouvernement a décidé d’adosser à son pacte de responsabilité, un pacte de solidarité censé apporter du pouvoir d’achat aux salariés, sans que ça coûte un euro aux patrons ni à l’état, et qui ne fragilise pas les engagements pris auprès de la commission européenne de réduire le déficit public sous les 3 % du PIB. Et pourtant, les principales organisations syndicales estiment que ce plan ne répond à aucun des enjeux auxquels il prétend s’attaquer. Un dispositif insincère. Parce que présenter aux salariés la réduction de leurs cotisations sociales comme un moyen d’augmenter leur salaire net, c’est oublier un peu vite que ces cotisations sont partie intégrante du revenu de ces salariés, un salaire différé, un salaire socialisé, directement investi dans la sécurité sociale, pour faire face à la maladie, aux accidents professionnels, à la retraite, à l’éducation des enfants.

C’est donc bien un nouveau coin enfoncé dans les principes d’universalité qui ont présidé à la création de la sécurité sociale, offrant à toutes et tous le même niveau de soins, quel que soit le niveau de ses cotisations individuelles. Ces quelque 42 euros mensuels dont bénéficieraient ainsi les salariés payés au SMIC (cette somme est dégressive jusqu’à atteindre 0 euro à partir d’1,3 SMIC) viendraient se substituer à la prime pour l’emploi, dont les effets sont jugés modestes et « décalés dans le temps » par le ministère du Budget. En même temps, parce qu’il est directement lié au salaire, ce dispositif serait plus incitatif au retour à l’emploi. Enfin et surtout, il favoriserait la modération salariale. Ainsi, il s’agit bien en fait d’aider les patrons à contenir la colère des salariés sous-payés, à justifier l’absence de coup de pouce donné au SMIC, à creuser encore davantage le fossé des inégalités salariales dans notre pays. Un coût neutre ou un coup bas ?

Présenté comme neutre, ce dispositif donne pourtant à nombre d’économistes l’occasion de pointer le manque d’éléments concrets pour en faire un calcul fiable. Ainsi, la hausse des impôts, pour ceux qui en paient, et la baisse des prestations, préjudiciable en premier à tous ceux qui n’ont pas les moyens d’une mutuelle ou d’une complémentaire retraite, semblent les pistes les plus sûres que le gouvernement envisage afin de parvenir à financer son projet. Reste qu’une augmentation aussi faible du salaire net peut notamment entraîner une hausse de l’impôt sur le revenu et de la taxe d’habitation, une amputation du RSA activité, mais aussi une baisse des aides au logement, aux transports et des prestations familiales.

À ceux qui estiment que la France n’est plus compétitive à cause de salaires trop élevés, je voudrais rappeler qu’en 1981, un salarié travaillait 14 jours pour les actionnaires, quand aujourd’hui, le même travaille 46 jours pour les rémunérer. Le pacte de solidarité gouvernemental ne semble pas de nature à inverser la tendance, au contraire. Oui, il y a vraiment besoin d’une autre politique, qui entraîne une tout autre répartition des richesses créées par les travailleurs de notre pays.

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