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Tribunes libres

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Le travail n’est pas un « coût » mais une richesse

Pacte de compétitivité -

Par / 27 novembre 2012

Tribune parue dans le numéro d’Initiatives de novembre 2012.

Le budget 2013 devait annoncer le changement, voire même la rupture. Mais dès l’ouverture de l’examen des projets de loi de finances, qu’il s’agisse du budget de l’État ou celui de la sécurité sociale, le débat est biaisé : choc de compétitivité, financement de la protection sociale pesant trop sur le travail, le travail coûte trop cher, c’est dit ! Il y a bien eu quelques timides tentatives de certains membres du gouvernement à l’annonce des premiers plans de licenciements, au lendemain de l’élection présidentielle, pour dire qu’il n’était pas question de mettre en cause le soi-disant coût du travail, mais cela aura été de courte durée. Et le MEDEF ne s’y trompe pas, il se lâche totalement avec de nouvelles attaques contre le droit du travail. Au bout de cinq mois, le Haut Conseil de financement de la protection sociale est installé par le premier ministre, avec mission d’imaginer différents scénarios de financement « pesant moins sur le travail ». Parallèlement, articulant financement de la protection sociale et compétitivité, Louis Gallois se voit confier la mission d’explorer les pistes pour développer la compétitivité française. Pouvait-on en attendre autre chose ? Le rapport n’est certes pas adopté, mais les fuites n’étonnent pas : remise en cause des 35 h, suppression de toute référence à une durée légale du travail et allègement des charges compensé par une hausse de la CSG et de la TVA, recul de l’âge de la retraite et j’en passe ! Pas encore remis, mais pas adopté, annonce donc le Président ; or les ministres concernés au plus haut chef se disent eux favorables à un allègement des charges. Le « coût du travail » est à nouveau à l’ordre du jour et tend à s’imposer comme le principal paramètre de la reprise économique. La manière insidieuse dont s’imposent les termes du débat me rappelle étrangement celle employée par la droite pour imposer l’idée de la RGPP, sous prétexte de modernisation du service public, brutalement déclaré obsolète, puisque fondé sur des valeurs dépassées comme la solidarité et l’égalité des citoyens sur l’ensemble du territoire. La RGPP s’est imposée et s’est traduite par des suppressions de postes, la réduction des services à la population, la montée de l’exclusion, la limitation d’accès aux droits en matière de santé, d’éducation, de justice, de déplacement, de communication. À entendre parler sans cesse du coût du travail et devant la multiplication et la violence des plans sociaux, devant la montée du nombre de demandeurs d’emploi, je considère que c’est une insulte violente au monde du travail. Le travail est un droit, il n’est pas un coût, mais une richesse. Preuve s’il en était besoin, les bilans des entreprises qui licencient sans vergogne et bradent leur technologie Thalès radiologie dans mon département, 700 emplois, parce que le taux de profit n’est que de 12 %, Ascometal qui après avoir supprimé 166 emplois verse 30 millions à son actionnaire principal, les laboratoires Merck 267 emplois, parce que le taux de profit n’est que de 52 %... Dans la France en crise, les profits seraient à la baisse, or les entreprises du CAC 40 affichent 36,7 milliards de bénéfice net accumulé à la fin du premier semestre 2012 contre 74... à la fin de l’année 2011 ! La seule question pertinente est donc celle de la répartition de cette richesse, alors que la moitié des profits échouent sur les comptes bancaires des possédants du capital, c’est-à-dire en dehors de l’économie productive et l’autre moitié constitue les dividendes versés aux marchés, ces mêmes marchés qui spéculent sur les dettes souveraines. Si l’on doit parler d’un coût du travail, parlons du coût pour les salariés et ex-salariés, pouvoir d’achat, précarité, pénibilité, souffrance au travail, maladies professionnelles. Qu’en pensent les salariés malades de l’amiante qui attendent le classement de leur entreprise pour faire valoir leur droit au départ à la retraite à 60 ans ? Qu’en pensent les allocataires de l’ATS qui, après avoir réuni leurs annuités, parce qu’ils ou elles ont travaillé tôt, ont perdu leur emploi et sont trop vieux pour retrouver un emploi, vivent avec 470 euros parce qu’on a éloigné l’âge de la retraite ? Qu’en pensent les 3,6 millions de femmes et d’hommes, soit 1 sur 6, qui rentrent dans la catégorie des bas salaires avec 1055 euros nets par mois ? Sur ce sujet également la répartition n’est pas bonne à en croire les études comparant la durée de vie des cadres et celle des ouvriers. La répartition n’est pas bonne non plus si l’on fait référence à la montée de la pauvreté en France. Sur Grenoble, ville centre de mon département, le rapport du CCAS fait état pour cette période d’un chiffre de 23 % des habitants vivant sous le seuil de pauvreté (établi à 14 % en France), 30 % des enfants étant touchés par cette situation. L’indécence est à son comble lorsque les petits entrepreneurs nous inondent de leur pétition assénant que « seule l’entreprise crée les richesses et l’emploi ». Ne serait-ce pas plutôt les salariés qui créent la richesse dans l’entreprise ? Et en disant cela, je ne nie aucunement la part du chef d’entreprise dans le processus de création et de distribution de l’activité, d’innovation et de production. Mais la plus-value, la richesse produite, n’est pas le fait des entrepreneurs, mais celui de l’activité de production ! Alors pourquoi seraient-ils exonérés de cotisation sur la valeur produite par les salariés alors que ceux-là mêmes cotisent sur la valeur totale de leurs revenus ? Pourquoi encore les entrepreneurs seraient-ils exonérés sur la vente des biens immobiliers d’entreprise dont la valeur s’est accrue par le travail de l’ensemble des personnels et l’effort d’infrastructure publique financé par l’ensemble des citoyens ? Ce sont précisément ces exonérations qui coûtent cher au budget de la sécurité sociale et à celui de l’État, et au salarié à qui la valeur de ce qu’il a produit ne sera pas redistribuée. On nous martèle que le coût du travail pèse et nuit à la compétitivité de la France. Qui veut-on persuader ? Les salariés qui se battent dans leurs entreprises pour garder leur emploi, pour obtenir des salaires décents pour faire vivre leur famille, pendant que les membres des directoires perçoivent leurs dividendes sur la richesse créée ? Compétitivité et productivité sont intimement liées et si la productivité française affiche un taux supérieur à la majorité des pays de la zone euro, c’est parce que ses salariés assurent un taux de productivité nettement supérieur aux autres pays. Ce qu’il nous faut avant tout définir, c’est le type de compétitivité que nous voulons pour la France : celle des pays en voie de développement qui avec des salaires bradés tirent les prix au plus bas, sans protection sociale, ni service public, comme nous le propose ou nous l’imposera bientôt l’application de la règle d’or, en déréglementant le droit du travail ? Celle encore que nous propose le MEDEF en assouplissant et simplifiant les règles de licenciement par une simple homologation administrative permettant d’éviter les recours contre les plans sociaux, en autorisant le licenciement pour motif de refus de modification du contrat de travail dans le cadre d’une réorganisation dans l’intérêt de l’entreprise, la perte de l’assurance chômage pour un demandeur refusant une offre raisonnable d’emploi ? Ni l’une ni l’autre. La compétitivité que je revendique, avec les sénatrices et sénateurs de mon groupe, prend ses racines dans les valeurs que nous défendons et s’oppose à celle voulue par les libéraux qui tentent d’imposer leur vision du monde économique. Oui, celle que nous revendiquons est bien celle qui s’appuie sur la valeur du travail et la redistribution des richesses créées, qui coopère dans le monde et ne brade pas sa technologie, protège durablement les intérêts de ses salariés et de ses sous-traitants, celle qui mise sur l’éducation, sur l’investissement, la qualification et la formation tout au long de la vie, l’innovation et la recherche, celle qui respecte et soutient le service public, qui assure aux salariés une sécurité de l’emploi durant toute leur carrière et facilite la création d’infrastructures publiques nécessaires à l’installation et au développement des l’entreprises. Oui, ce sont bien ces valeurs-là que nous nous attachons à faire entendre dans nos départements et dans l’hémicycle du Sénat.

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