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Tribunes libres

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Une austérité qui conduit tout droit à la récession

Loi de finances pour 2013 -

Par / 27 novembre 2012

Tribune parue dans le numéro d’Initiatives de novembre 2012.

Le Projet de loi de finances 2013 en discussion au Sénat est le premier budget d’un gouvernement de gauche depuis 10 ans. Nous aurions pu espérer, à l’instar du projet de loi de finances rectificative examiné en juillet, que j’ai voté avec mon groupe, que ce nouveau texte porte une même empreinte encore plus affirmée. Je me réjouis en effet que nous ayons imposé de façon plus forte les parachutes dorés des grands PDG ainsi que les transactions financières, c’étaient là des signes forts qui auraient pu augurer d’avancées plus prometteuses. Nous aurions souhaité que, très rapidement, des transformations d’une autre ampleur viennent répondre aux attentes de nos concitoyens qui se sont exprimés pour le changement lors des dernières élections. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps, et le résultat n’est pas à la hauteur de la situation. À l’Assemblée nationale, tous nos amendements ont été repoussés. En revanche, ceux de la droite concernant les gains de cession de parts de société, plus connus comme « amendements des pigeons » ont reçu un accueil plus favorable de la part du gouvernement. Il ne s’agissait pourtant, ni plus ni moins, que d’un alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail, promesse tant de fois reprise par le candidat Hollande. Le gouvernement a reculé, alors qu’en juillet dernier, il nous affirmait vouloir engager les réformes fiscales à l’automne.

Des choix qui pénalisent la croissance

Force est de constater que le vote du Pacte budgétaire a détourné le gouvernement de ses premières velléités d’orienter sa politique à gauche. Le vote très consensuel, de l’UMP, du centre, du PS et d’une partie des écologistes, à la quasi-unanimité, le 11 octobre dernier n’est pas neutre. Nous en ressentons déjà les conséquences. Le contexte économique fortement dégradé de la France avec 5 millions de chômeurs, et de l’Union européenne avec 25,4 millions de sans-emplois, et son lot de suppressions de services publics et de casse industrielle est une réalité. On pouvait penser que des décisions plus courageuses seraient prises pour une relance de la croissance. Or, le président Hollande a tenté de nous démontrer que le Traité Merkel Sarkozy, repris à la virgule près, était fondamentalement différent et qu’il comportait un volet croissance. On apprend ces jours-ci que l’incidence de ce volet croissance sur notre pays sera très minime. Sur les 55 milliards d’euros des fonds structurels votés par les États membres pour 2012, mais non encore distribués, une enveloppe de 2,5 milliards d’euros devrait pouvoir être mobilisée en faveur des territoires français. Une nouvelle fois la montagne a accouché d’une souris. En fixant l’objectif de réduire le déficit à 3 %, le pouvoir annihile complètement toute reprise économique et risque même de nous plonger dans la récession dans les prochains mois. Nicolas Sarkozy dans le journal Le Monde, le 11 décembre 2011, annonçait la sortie du tunnel : « L’accord européen sur la réforme des traités et le renforcement de la discipline budgétaire au sein de la zone euro crée les conditions du rebond et de la sortie de crise ». François Hollande vient de déclarer le 17 octobre dernier dans le même journal : « Sur la sortie de la crise de la zone euro, nous en sommes près, tout près. Parce que nous avons pris les bonnes décisions au sommet des 28 et 29 juin et que nous avons le devoir de les appliquer, rapidement ». La similitude des propos est quelque peu inquiétante. Nous voyons où nous en sommes aujourd’hui. Les mêmes recettes sont reprises, celles des économistes libéraux qui attribuent la responsabilité de la crise aux déficits quand ce sont les milieux financiers qui sont les fauteurs de trouble. Les peuples grec et espagnol connaissent déjà la signification de ces méthodes. Ils les vivent dans leur chair au quotidien. Des économistes de l’Observatoire Français des Conjonctures économiques mettent en garde le gouvernement sur les ravages que provoqueraient les mesures pour parvenir à ce fameux objectif de ramener le déficit à 3 %. Ils nous rappellent que les politiques d’austérité engagées en Europe en 2011, voire en 2010, conduisent à la débâcle. Le budget qui nous est proposé est construit sur une croissance à 0,8 % alors qu’il est plus probable qu’elle ne soit que de 0,1 % en 2012 et nulle en 2013. Pour atteindre cet objectif de 3 %, il faudrait alors envisager un nouveau plan de restrictions d’un montant de 22 milliards d’euros, nous disent ces mêmes économistes. De telles décisions auraient des conséquences sur les possibilités de consommation des ménages, sur l’activité économique. La situation de l’emploi serait alors catastrophique. Le taux de chômage pourrait atteindre les 12 % avec 200 000 destructions d’emplois estimées. Elles s’ajouteraient ainsi aux 253 000 chômeurs supplémentaires prévus en 2012 et aux 243 000 de 2013. Et ce ne sont pas les emplois aidés qui inverseront la tendance. La récession deviendrait alors réalité. C’est bien ce qui caractérise de façon essentielle ce budget 2013 que nous ne pourrons voter dans ces termes.

Des mesures bienvenues, mais trop timides

La tranche à 45 % pour le barème de l’Impôt sur le revenu donne plus de progressivité à cet impôt et l’abandon des prélèvements forfaitaires obligatoires sur les revenus financiers constitue un réel progrès, puisqu’il alignera la fiscalité du capital sur celle du travail. Mais il nous semble également qu’il faudrait renforcer cette progressivité. Le passage d’une tranche de 45 % à 75 % est trop brutal, il devrait s’accompagner de deux ou trois tranches intermédiaires. Le plafonnement, sur une vingtaine de niches fiscales, à 10 000 euros constitue également une avancée, mais ne doit pas nous faire oublier que le coût des niches fiscales pèse plus de 65 milliards et nécessiterait une mise à plat plus drastique. S’agissant de l’ISF, son rétablissement partiel et... très allégé pour les patrimoines à partir de 1 300 000 euros est un pas symbolique, mais pas à la hauteur des besoins. Autant que la taxation, uniquement temporaire, à 75 % des revenus au-dessus d’un million d’euros qui ne concernera que 1500 contribuables environ et ne rapportera que 210 millions d’euros. Elle épargnera les revenus du capital, qui représentent la majorité des revenus des plus riches. On ne peut accepter non plus le maintien du gel du barème de l’impôt sur le revenu décidé par le précédent gouvernement. Même si une décote existe pour les deux premières tranches. Ces impôts et taxes nouvelles serviront uniquement à résorber le déficit au moment où il faut affecter des moyens à des dépenses utiles pour les services aux habitants, pour donner une nouvelle dynamique à notre économie. Nous savons tous que c’est la consommation intérieure qui en est le moteur.

Austérité aussi pour les collectivités

L’austérité inscrite dans cette loi de finances 2013 aura des conséquences sociales dramatiques pour un grand nombre de nos concitoyens. Les municipalités seront sollicitées en premier lieu. Le gouvernement demande aux collectivités qu’elles participent à l’effort pour résorber le déficit, mais en quoi sont-elles responsables de ce déficit, alors qu’elles votent des budgets en équilibre chaque année ? La Cour des comptes indique que la part de la dette publique locale dans l’ensemble de la dette publique est restée relativement stable (10 % en 2010), mais la part du déficit public des collectivités est de 0,1 % du Produit Intérieur Brut. Le gel des dotations aux collectivités aura des conséquences sur les services publics. La dotation globale de fonctionnement serait stabilisée en 2013, puis diminuerait de 750 millions d’euros par an en 2014 et en 2015. Ces baisses auront des conséquences sur les taux de diminution appliqués à la dotation de compensation et au complément de garantie. On peut craindre ainsi une forte diminution de ces dotations pour les collectivités et les EPCI. Cette baisse des dotations à l’horizon 2014-2015 pèsera sur l’investissement local, sur le secteur du bâtiment et des travaux publics en particulier, puisque plus de 70 % sont réalisés par les collectivités locales. La fameuse règle d’or induite par le TSCG s’applique à l’État, mais aussi aux collectivités locales et à la sécurité sociale. Nos budgets vont être ainsi sous la surveillance de la Commission européenne. Que devient le principe de libre administration des collectivités locales, pourtant inscrit dans notre Constitution ? L’état va-t-il nous contraindre à réduire encore plus nos personnels, à les transférer au privé ou à les supprimer complètement ? Que va devenir le secteur public de la petite enfance quand se développeront des officines privées ? Veut-on que les plus modestes ne puissent plus accéder à ces services ? Voilà les conditions dans lesquelles se discute ce budget 2013 pour nos collectivités locales.

Changeons de cap !

En dehors des mesures que j’ai évoquées sur la mise à plat des niches fiscales qui pourraient rapporter 30 milliards d’euros, sur l’amélioration de la progressivité de l’impôt, il conviendrait également d’engager la lutte contre l’évasion et la fraude fiscale, et le rapport d’Éric Bocquet est une bonne base pour récupérer 40 à 50 milliards d’euros. Au fond, il faut inverser la tendance à réduire la dépense publique. Les 10 milliards en moins sur le budget 2013, c’est 10 milliards en moins pour les services publics. Il faut insuffler dans ce texte plus de justice fiscale.

Il faut rompre avec les politiques d’austérité si nous voulons participer au redressement social et productif de notre pays. Cela demande de faire preuve de courage politique pour affronter les milieux financiers et refuser de se soumettre à leur diktat.

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