Tribunes libres
Une autre politique contre les addictions
Mission interministérielle de lutte contre la drogue et toxicomanie -
Par Laurence Cohen / 1er octobre 2012Tribune parue dans le numéro d’Initiatives d’octobre 2012.
Au-delà des échanges passionnés, notamment au travers du débat sur les salles de consommation qui doivent pouvoir être expérimentées, intéressons-nous aux faits, aux études scientifiques et aux pratiques des professionnels de santé. J’ai rendu un avis, dans le cadre du budget de l’État sur l’utilisation des crédits accordés à la MILDT (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et toxicomanie).
Cet organisme a privilégié, ces cinq dernières années, le sécuritaire au détriment de la prévention. De l’avis de nombreux professionnels, cette politique répressive a été un échec. Cette guerre à la drogue n’a fait baisser ni la consommation ni les trafics.
C’est une politique qui a coûté cher et s’est avérée inefficace, encombrant les tribunaux et les prisons. Cette obsession du cannabis, sous Sarkozy, a laissé de côté des enjeux cruciaux de santé publique : tabagisme, consommation excessive d’alcool, de médicaments. Cessons d’être hypocrites : le tabac et l’alcool, substances licites causent chaque année en France 100 000 décès. Au nom de quoi l’alcool et le tabac seraient-ils des substances moins dangereuses puisqu’autorisées ?
Licites ou illicites : voilà bien une catégorisation « artificielle » des substances qui n’agit ni sur la consommation ni sur les risques. Au regard de la situation, nous appelons à mettre en œuvre une véritable politique de prévention qui vise la réduction de la consommation, pour éviter de passer du « simple » usage à l’usage nocif ou l’addiction.
C’est donc l’accès aux soins, l’accompagnement et le suivi qui sont nécessaires et qui doivent trouver les moyens d’une véritable politique publique. Prenons nos responsabilités pour faire avancer dans l’opinion publique ce débat, profitons de ce changement politique pour enfin insuffler d’autres idées, d’autres pratiques pour une société qui ose affronter ses peurs pour les dépasser.
C’est le sens de la démarche : ouvrir un espace réunissant des professionnels de santé pour débattre sans tabous des addictions et proposer des alternatives. Ce travail a abouti à une charte que je vous invite à soutenir largement sur www.pouruneautrepolitiquedesaddictions.fr. C’est une étape importante qui a le mérite de fédérer de nombreux professionnels, des associations représentatives dans un large consensus, permettant de déboucher sur des États généraux.