La crise financière de 2008 avait mené le monde entier au bord du cataclysme économique, sans l’intervention des États, par ailleurs honnis par les ultralibéraux, le système bancaire et financier mondial se serait écroulé et nous aurions pu vivre une crise du niveau de celle de 1929. Le système bancaire fut sauvé, pour l’essentiel, le monde entier, lui, continue à subir les excès de la dérégulation menée pendant 30 années et de la financiarisation de l’économie. Les dirigeants du monde avaient promis de remettre un peu d’ordre dans tout cela et d’apporter quelques règles et de la transparence afin de « moraliser le capitalisme » disaient-ils.

L’Union européenne ne fut pas en reste dans cette volonté de faire un peu de ménage pour préserver les équilibres, ainsi donc fut mis au point une nouvelle législation intitulée de ce sigle un peu obscur « MIFID », relative au « marché des instruments financiers », un peu technique tout cela désolé, mais le but en clair est de renforcer les obligations de transparence et la surveillance des marchés financiers. Le jeudi 17 mars dernier, la Commission des Affaires européennes du Sénat a abordé le sujet, j’étais chargé, en son nom, de présenter la demande de report de l’application de cette directive formulée par la Commission européenne, à savoir que la mise en œuvre de ces dispositions serait reportée à janvier 2018, ceci pour des raisons techniques, soit 10 ans après le déclenchement de la crise !

Dans le même temps sur la planète finances folle on ne circule pas à la même vitesse, aujourd’hui en un clignement d’œil soit 350 millisecondes les traders passent 7000 ordres de transactions, on appelle cela le trading haute fréquence, ajoutons à cela les « dark pools » (Système boursier parallèle non régulé) et le « shadow banking » (la finance de l’ombre) qui échappe elle aussi à toute supervision, enfin l’explosion des technologies apporte la touche finale à ce petit monde en feu. À l’évidence le temps de la réglementation n’a rien à voir avec celui de la spéculation, 10 ans contre 350 millisecondes !

La raison de cette demande de report s’appuie sur le constat que les systèmes informatiques des Etats ne seraient pas prêts pour permettre l’application de cette directive. On croit rêver ! Quand un simple clic fait valser des milliards d’euros... Faut-il voir dans ce freinage la main visible des 1700 lobbyistes financiers à Bruxelles ? Ou la bienveillance du nouveau Commissaire aux services financiers, Jonathan Hill, lui-même ancien lobbyiste de la City de Londres ? Non là je persifle ou serais-je en train de manifester les premiers signes d’une paranoïa aigüe ? Je finis par me poser la question.

Quoi qu’il en soit l’incendie s’est déclaré en 2008, mais le camion des pompiers ne sortira de l’usine qu’en 2018, si tout va bien…

Tout finissant par des chansons :

« Qu’est-ce qu’on a fait des tuyaux, des lances et de la grande échelle ?

Qu’est-ce qu’on a fait des tuyaux, pas de panique il nous les faut »