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Interventions, analyses, réactions : suivez avec nous l’examen au Sénat de la loi Travail, en séance publique du 13 au 28 juin. Avec un seul mot d’ordre, partagé par la très grande majorité des Français : retrait !

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Le Code du travail complexe ? Oui, mais à cause de qui ? Et pourquoi ?

#LeSenatestAvous -

15 juin 2016

Rappel : vous pouvez toujours nous faire parvenir vos contributions afin que nous puissions relayer vos témoignages dans l’hémicycle. Voici par exemple le récit de cette retraitée, ancienne responsable d’une entreprise de l’économie sociale.

Je réponds avec intérêt à l’appel des sénatrices et sénateurs du groupe Communiste et républicain qui souhaitent collecter nos propositions, expériences et vécu, pour alimenter le débat au sénat sur le projet de loi travail.

Je veux ici évoquer mon expérience de responsable d’entreprise de l’économie sociale.
Aujourd’hui retraitée, j’ai exercé pendant 20 ans des responsabilités de directrice générale d’une PME mutualiste de 250 salariés, gérant plus de 25 services de soins, centres de santé, hospitalisation, pharmacie magasin d’optique et d’audition, services petites enfance.

Tout cela incluait des salariés à statuts professionnels très divers notamment des professionnels de santé et des formes de contrats de travail multiples
En 20 ans, j’ai assisté je le reconnais à une complexification de la réglementation du travail liée pour l’essentiel à la création successive de dispositions particulières, de dérogations toujours plus nombreuses aux règles établies.

Ces dispositions n’allaient d’ailleurs pas toujours dans le sens de l’intérêt des salariés, mais permettaient aussi aux employeurs de s’exonérer de règles trop contraignantes.

Par ailleurs, la complexité de cette réglementation a contribué à une situation d’instabilité jurisprudentielle néfaste aussi bien pour les salariés que pour les responsables d’entreprise de bonne foi, dont j’étais.

Tout cela n’a néanmoins pas représenté pour nous un obstacle à l’évolution positive de l’entreprise puisque notre structure est passée en 20 ans de 75 à 250 salariés en créant 10 nouvelles activités dont nous avons pu assurer la pérennité et qui fonctionnent toujours, dans un environnement extrêmement concurrentiel.

Je me souviens que le passage aux 35 heures a été plutôt ressenti chez nous comme une opportunité tant au niveau de la direction de l’entreprise que des salariés, ce qui démontre que lorsqu’une entreprise n’est pas centrée sur le profit, mais sur la réponse aux besoins de la population elle peut trouver le moyen de la négociation

Donc,

1/tout en reconnaissant cette complexité de la réglementation du travail je soutiens qu’elle n’est aucunement un obstacle à l’évolution d’une entreprise

2/je retiens de mon expérience que dans cette économie de marché et dans des secteurs à forte concurrence, la référence à des textes clairs respectant la hiérarchie des textes législatifs réglementaires ou conventionnels et applicables à tous les salariés d’un même secteur professionnel est seule de nature à assurer a la fois la sécurité des salariés, l’égalité des règles concurrentielles et une réelle visibilité pour les responsables d’entreprise

3/cette expérience m’a aussi confortée dans l’idée qu’une forte protection des salariés n’est aucunement un obstacle à l’évolution et la créativité d’une entreprise contrairement à ce que l’on voudrait nous faire croire aujourd’hui, à condition bien sûr que l’on accepte l’idée que la part des salaires, des excédents nécessaires aux investissements et éventuellement des profits s’agissant d’une entreprise de capitaux, reste équilibrée

4/on nous a vendu au début le texte El Khomri comme une simplification indispensable, notamment pour les PME alors même que celles-ci ont su s’adapter à la complexification des textes dont le Code du travail n’est certainement pas le meilleur exemple et que cette loi a l’évidence vise bien plus qu’une simplification.

On nous vend aujourd’hui la nécessité de casser les protections réglementaires pour se rapprocher de l’entreprise et on prend prétexte des PME qui ne pourraient les supporter alors même que ce texte répond à l’évidence a une commande européenne dictée par les multinationales dans le cadre d’une course effrénée à la maximisation de leur profit,
car qu’auraient donc à gagner les PME à pouvoir négocier au niveau local avec le risque de se retrouver au final dans une situation défavorable par rapport à leurs concurrents directs que ce soit en termes de cout salariaux (si le rapport de force en interne reste favorable aux salariés) ou a l’opposé (dans les secteurs comme ceux que je gérais ou les professionnels sont rares) en termes d’attractivité salariale (si l’inexistence de forces salariales organisées dans l’entreprise met les salariés en situation d’accepter des reculs importants par rapport à la loi)

Pour moi, dans la plupart des cas, les PME n’ont donc rien à gagner à un tel recul social
Car au surplus s’il s’agit de tirer tout le monde vers le moins-disant social les conséquences en termes de solvabilisation du marché intérieur risquent d’être catastrophiques pour les PME

C’est à tout le moins ma conclusion au regard de mon expérience récente de responsable d’entreprise.

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