La démocratie en danger

Réforme territoriale

Publié le 1er septembre 2014 à 14:19 Mise à jour le 4 juin 2019

Editorial paru dans le numéro 91 d’Initiatives, septembre 2014.

On parle souvent de spécificité française, d’un modèle social français. C’est une réalité forgée par des siècles de débats et batailles politiques, des siècles de combats sociaux et démocratiques qui sont, depuis, un quart de siècle, mis à mal. Ce modèle social français a pu se développer sur le terrain démocratique qu’a suscité la Révolution française. Ce grand mouvement se fondait sur une volonté : celle de donner la parole au peuple.

C’est l’Histoire qui explique cette dernière phrase de l’article 2 de la Constitution : « Le principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». L’architecture institutionnelle de notre pays, souvent décriée par les tenants de cette pensée unique qui privilégie la compétitivité plutôt que le respect des droits, est de toute évidence l’une des clefs de la vivacité démocratique qui a longtemps caractérisé notre pays. 36 000 communes : n’en déplaise aux grands argentiers, aux partisans du dogme de la réduction, coûte que coûte, des dépenses publiques, c’est une chance pour la France, c’est une richesse inestimable pour notre peuple, celle d’une proximité, d’une capacité d’action au plus près de la population.

101 départements : ce n’est pas un poids budgétaire insupportable pour notre pays, c’est bien au contraire un outil d’une rare efficacité pour l’organisation équitable du service public sur le territoire. Je suis frappée par le silence des promoteurs de cette réforme territoriale sur ce qui devrait primer : la satisfaction des besoins de la population, l’intérêt général. Le service public paraît même pour certains un mot tabou, synonyme de dépenses publiques, donc forcément un poids pour la société, un frein au développement de l’économie.

Avec mes amis du groupe Communiste Républicain et Citoyen, je porte une conception radicalement différente. Pour nous, la solidarité, l’épanouissement humain, l’investissement public au service d’un développement économique, respectant les territoires doit être au coeur de tout projet d’évolution de l’organisation territoriale de la République.

Et les services publics sont au coeur de cette dynamique nouvelle à créer. C’est pour cela que je ne partage pas l’idée de la suppression des départements qui constitue la toile de fond des projets de regroupement des régions et de nouvelles compétences des collectivités territoriales.

Après les débats intervenus à l’Assemblée nationale et au Sénat lors de l’examen en première lecture du projet de loi de regroupement des régions, on perçoit mieux le projet de Messieurs Hollande et Valls qui perpétuent à leur manière les textes de Messieurs Raffarin et Sarkozy. La clef de ce projet, c’est la mise en compétitivité des territoires, c’est la soumission de la République, de son organisation aux choix du marché. La première étape franchie l’an dernier fut la création des métropoles.

Déjà, le Gouvernement s’était montré inflexible, avançant à marche forcée, sans écouter les propositions portées par les élus locaux soucieux de la réponse aux besoins de leur population. Dans les Bouches du- Rhône, 111 maires sur 119 n’ont pas admis, et n’admettent toujours pas, que l’organisation de leur territoire soit modifiée sans réelle concertation.

De toute évidence, l’articulation entre intercommunalités
et métropoles constitue le futur maillage de notre territoire, au détriment de la commune. Cette dernière demeurera au mieux un lieu d’échange, mais ne sera certainement plus un lieu de décision, un lieu de pouvoir, de pouvoir du peuple. L’autre dispositif qui tend à déstructurer la République, c’est l’articulation super-régions-Europe libérale. Ce deuxième dispositif poursuit au-delà de la mise à mort des départements le « Graal » des libéraux : la remise en question des États nations au profit d’une Europe fédérale. Le récent remaniement gouvernemental confirme, s’il en était besoin, cette dangereuse obsession libérale : Manuel Valls est ovationné à l’université d’été du Medef, tandis que son nouveau ministre de l’Economie, l’ancien banquier Emman- cuel Macron, explique tranquillement qu’il est prêt à torpiller les 35 heures...

Dès la semaine du 1er juillet avec le groupe CRC, nous avons porté cette idée forte : l’ampleur de ce projet exige la consultation du peuple. A notre initiative, le Sénat a voté le principe de soumettre au référendum le projet de réforme territoriale. L’Assemblée nationale n’a pas suivi, ce qui ne stoppe en aucun cas cette campagne qui doit au contraire s’amplifier. La démocratie locale est mise en danger de la commune aux départements.

C’est au peuple et à lui seul de décider de l’avenir des institutions de la France. Nous comptons bien continuer ce combat dès
la reprise de la session parlementaire le 1er octobre prochain.

Après les débats intervenus à l’Assemblée nationale et au Sénat lors de l’examen en première lecture du projet de loi de regroupement des régions, on perçoit mieux le projet de Messieurs Hollande et Valls qui perpétuent à leur manière les textes de Messieurs Raffarin et Sarkozy. La clef de ce projet, c’est la mise en compétitivité des territoires, c’est la soumission de la République, de son organisation aux choix du marché.

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