La révolution écologique du gouvernement renvoyée à plus tard...

Publié le 1er octobre 2009 à 10:34 Mise à jour le 8 avril 2015

Le deuxième volet du Grenelle de l’environnement devait concrétiser les généreux engagements pris lors de sa première phase. Mais la plupart du temps, il ne fait que les reporter à d’hypothétiques lendemains. Sans s’attaquer le moins du monde à la logique du profit à court terme, destructrice aussi bien pour les hommes que pour la planète.

Trois semaines de débat pour rien ou pas grand-chose ? Présenté par Jean-Louis Borloo comme la « boîte à outils juridique du Grenelle de l’environnement », le Grenelle II a occupé le Sénat de la mi-septembre au début du mois d’octobre en laissant la drôle d’impression que la « boite à outils » s’était transformée en « usine à gaz » ayant peu de chance d’atteindre les ambitieux et vertueux objectifs fixés par le gouvernement. « Malgré des avancées bien réelles dans certains domaines, a résumé Evelyne Didier au nom du groupe CRC- SPG, nous sommes bien loin de la révolution verte qu’entendait mettre en oeuvre le Grenelle I, et plus loin encore de la refonte complète du système que nécessiterait une véritable révolution écologique. »

Il est urgent d’attendre

Touchant à des domaines aussi divers que les transports, l’urbanisme, l’aménagement du territoire, la biodiversité ou la santé, créant une multitude de labels écolos et fixant un nombre tout aussi important de normes environnementales, il est cependant difficile de trouver dans ce Grenelle II beaucoup de dispositions concrètes traduisant les envolées écologiques du gouvernement. Et pour cause, ce dernier a préféré renvoyer à plus tard la plupart des mesures contraignantes, en les conditionnant a de futurs et hypothétiques décrets d’application. Il en va ainsi du diagnostic de performance énergétique des bâtiments, de la surveillance de la qualité de l’air ou bien de l’obligation pour les entreprises de rendre publique la liste de leurs investissements grenello-compatibles. Le mot « décret » apparaît d’ailleurs à 136 reprises dans le texte. Alors même que tous les experts répètent qu’il est indispensable d’agir vite !

Les pauvres taxés

C’est seulement lors de l’examen du budget 2010, en fin d’année, que le Parlement doit avaliser l’instauration de la taxe carbone décidée et annoncée par le président de la République. Mais celle-ci était évidemment sur toutes les bouches, faisant l’objet de nombreux débat lors de l’examen de ce Grenelle II par le Sénat. L’occasion pour les élus du groupe CRC- SPG de réaffirmer leur opposition à ce qu’ils considèrent être un nouvel impôt injuste socialement et inefficace écologiquement. « Cette taxe, analysent les sénateurs du groupe CRC-SPG, n’est pas seule- ment improductive, elle est aussi injuste dans son fonctionnement, puisqu’au prix de la tonne de carbone proposé, elle aboutira à alourdir la facture des plus modestes sans pour autant dissuader les comportements les plus énergivores de ceux qui ont les moyens de s’en acquitter. Comble de l’injustice, on nous demande de taxer les individus alors que l’on a proposé un marché aux entreprises les plus fortement émettrices de gaz à effet de serre ».

Recentralisation

Sous prétexte d’efficacité, plusieurs dispositions tendent à déposséder les collectivités ter- ritoriales de leurs compétences en matière d’aménagement du territoire en les confiant au préfet, au travers notamment des projets d’intérêt général qui seront définis et pilotés par le représentant de l’Etat et aux- quels les collectivités devront se soumettre. Les plans locaux d’urbanisme intercommunaux deviennent la norme, ce qui réduira encore d’autant la marge de manoeuvre des élus municipaux. Bref, en se faisant dans les discours le défenseur de la nature, le gouvernement profite de l’occasion pour compléter par petites touches son pro- jet de restructuration territoriale. La sauvegarde de la planète à bon dos.

Contradiction

Selon le gouvernement, le Grenelle II doit « privilégier les modes de transport durables ». Mais aucun financement sérieux ne vient étayer cette jolie déclaration d’intention. Tout au contrai- re, la politique du gouvernement à tendance à multiplier les camions sur les routes et à torpiller la division fret de la SNCF. « Une disparition brutale de la branche wagon isolé de la SNCF se traduira par un report de 2 millions de camions supplémentaires par an vers la route, avec le risque avéré d’un non-retour du chargeur au fret ferroviaire, sou- ligne Mireille Schurch, sénatrice de l’Allier. Ceci va à contresens de l’objectif environnemental de report modal de la route vers le rail. De plus, le wagon isolé représente quand même le tiers du chiffre d’affaires de Fret SNCF. L’arrêt de cette activité aura nécessairement des effets sur le personnel. »

Deux amendements

Parmi les amendements adoptés au Sénat, en voici deux particulièrement significatifs. Au détour de la loi, l’UMP a voté la création de péages urbains à partir de 2013 dans les villes de plus de 300 000 habitants, toujours au nom de la réduction des émissions de gaz carbonique. D’où l’indignation des sénateurs du groupe CRC-SPG qui considèrent qu’il faut d’a- bord « développer les infrastructures et les services de transports collectifs entre le centre-ville et la périphérie. Ce n’est pas le cas actuellement. L’instauration de péages urbains conduirait aussi à une forte ségrégation sociale. En effet, ce sont les ménages à revenus modestes qui résident en périphérie des grandes agglomérations ». Autre amendement adopté, celui-là communiste : la suppression des hausses de loyer supportées par les locataires en cas de travaux permettant d’améliorer le confort général de son logement. Comme quoi le Sénat est parfois capable du grand écart...

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