Les amis du Fouquet’s raflent la mise

Publié le 1er avril 2010 à 11:43 Mise à jour le 8 avril 2015

L’ouverture du marché des jeux en ligne va d’abord favoriser les intérêts d’opérateurs privés, dont certains sont dirigés par des amis du président de la République. Au risque d’augmenter l’addiction et le surendettement des joueurs...

Un texte « dangereux » qui va profiter à quelques intérêts privés au détriment de la santé publique : voilà comment les élus du groupe CRC-SPG résument le projet de loi relatif « aux jeux d’argent et de hasard en ligne » approuvé par la majorité sénatoriale à la fin du mois de février et voté définitivement par le Parlement le 6 avril. Celui-ci met fin aux monopoles de la Française des jeux et du PMU en ouvrant à la concurrence les paris sportifs et hippiques, ainsi que les jeux de poker en ligne. Il s’agit, a justifié Eric Woerth, alors ministre du Budget, « de réguler une offre pléthorique illégale ».

Un argument qui ne tient pas vraiment. Ce texte est plutôt un bon moyen « pour quelques groupes financiers de réaliser de juteux bénéfices sans supporter trop de contraintes », lui a rétorqué Thierry Foucaud, sénateur de Seine-Maritime. De fait, l’Arjel, l’autorité de régulation mise en place ne disposera que de pouvoirs limités ; et la loi aligne la fiscalité des jeux en ligne sur celle des jeux « en dur », cette dernière étant elle-même revue à la baisse. Conclusion : bien que le gouvernement prétende le contraire, les caisses de l’état devraient perdre encore deux milliards d’euros. Au profit notamment de la société de paris en ligne Betclik, dont le propriétaire n’est autre que M. Courbit, un ami personnel du chef de l’état, actionnaire par ailleurs d’une autre société en lice pour récupérer la régie publicitaire de France Télévisions. Décidément, en Sarkozie, le monde des affaires est tout petit !

Tout aussi grave, sous un vernis de légalité, le gouvernement, a estimé Bernard Vera, sénateur de l’Essonne, foule au pied des principes essentiels : « La promotion du jeu responsable, la protection de l’éthique sportive, tout cela passe au second plan ! Le projet de loi se contente d’encadrer la concurrence, puisque les opérateurs disposeront du droit de proposer des jeux, dans la limite du respect de l’ordre public et social. Pourtant, c’est justement en se fondant sur cet ordre public et social que notre pays a privilégié le principe du monopole, au détriment du principe de la concurrence.

La Cour de justice des Communautés européennes elle-même considère que le monopole public doit être privilégié pour lutter contre la corruption et la fraude. Chacun s’accorde, y compris la commission des affaires sociales, sur les dangers sanitaires et sociaux, addiction et surendettement des joueurs, que font déjà courir les jeux et paris en ligne et sur les risques supplémentaires que fera naître l’ouverture à la concurrence. Si l’on y ajoute les problèmes de corruption dans le sport et les courses, le trucage des matchs, le blanchiment d’argent, force est de constater que l’État ne peut pas se priver du contrôle des acteurs historiques du secteur. Par conséquent, les risques de nuisance pour la santé publique et l’ordre public ne devraient laisser personne indifférent, et l’État lui-même moins que tout autre. »

Désireux de voir le texte s’appliquer avant la prochaine Coupe du monde de football dont le coup d’envoi sera donné le 11 juin, le gouvernement a au contraire tout fait pour favoriser l’adoption rapide de son projet. A sa demande, l’Assemblée nationale l’a adopté en seconde lecture dans la même rédaction que celle retenue par le Sénat afin d’éviter une navette supplémentaire.

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