La droite sénatoriale choisit de renforcer l’austérité quand les Français s’inquiètent pour leur sécurité et leur avenir

La droite sénatoriale choisit de renforcer l'austérité quand les Français s'inquiètent pour leur sécurité et leur avenir - Projet de loi de finances pour 2016 (explication de vote sur la première partie) (Pixabay)

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au terme de la discussion de la partie recettes du projet de loi de finances pour 2016, un sentiment un peu particulier m’anime.

En effet, alors que les Françaises et les Français sont de plus en plus préoccupés par les tensions internationales et leurs manifestations violentes dans notre pays, alors même que l’avenir est l’objet d’incertitudes, que des millions de jeunes et de travailleurs demeurent privés d’emploi et de perspectives, la majorité du Sénat a décidé de voter un plan d’économies de 5 milliards d’euros – M. le rapporteur général de la commission des finances vient de nous le proposer – qui confirme, s’il en était besoin, que la majorité sénatoriale choisit le renforcement de l’austérité.

La première partie du projet de loi de finances telle qu’il nous est parvenu du Palais-Bourbon ne nous satisfaisait pas, mais la « petite loi » qui résulte de nos débats dégrade encore plus les moyens de nos services publics.

Notre premier débat a porté sur l’impôt sur le revenu. Vous avez décidé, considérant que ce sont les classes moyennes qui en bénéficieraient, de baisser le taux appliqué à la troisième tranche. Vous avez oublié de préciser que le gain fiscal serait de 64 euros pour un jeune cadre dynamique déclarant 30 000 euros net de revenu annuel – le seuil inférieur de cette tranche –, tandis qu’un cadre dont la carrière est finissante et qui déclare 100 000 euros annuels net – le seuil supérieur de cette tranche – aura, pour sa part, un « bonus » de 900 euros. Où est la justice fiscale ?

Vous « surfez » ainsi sur la méconnaissance par le grand public de notre mode de calcul progressif de l’impôt sur le revenu. Quand on baisse sa tranche intermédiaire
– une tranche bien trop large, nous l’avons rappelé –, ce sont ceux qui ont un revenu qui dépasse le seuil supérieur de ladite tranche et ceux qui sont dans les tranches supérieures qui en bénéficient le plus.

À l’inverse, nous vous avons proposé une plus grande progressivité avec des tranches moins larges, afin que chacun contribue selon ses capacités à alimenter les ressources du budget national, pour offrir les services publics dont on a besoin.

Vous avez également décidé d’accroître une fois encore les cadeaux fiscaux à l’endroit des détenteurs de patrimoine et de capitaux ; ainsi en est-il de l’article 2 ter A, qui prévoit une nouveauté dans notre droit fiscal : la double imputation de l’inflation sur la valeur d’un bien ayant permis, lors de sa cession, de dégager une plus-value.

L’érosion monétaire s’est ainsi ajoutée au bénéfice de l’abattement lié à la durée de détention alors que, justement, a priori, elle la prend en compte.

C’est avec ce genre de mesures, mes chers collègues, que l’on consolide, non les fonds propres de nos entreprises ni la qualité de notre parc immobilier, mais bien plutôt les inégalités sociales.

Il nous semble donc indispensable d’engager un débat sur la participation de l’impôt à l’intérêt commun et sur ceux qui le supportent. Nos discussions ont montré que l’on ne peut s’en tenir à l’impôt sur le revenu pour mesurer le poids supporté par chaque foyer, la TVA – qui rapporte 144,7 milliards d’euros au budget de la nation – représentant maintenant une part importante de la contribution des plus modestes au budget général.

Nous devons en revanche nous interroger sur ce qu’est devenu l’impôt sur les sociétés, qui ne représente plus que 33 milliards d’euros dans le budget de l’État, alors que les entreprises bénéficient d’un CICE qui pèse toujours plus lourd dans le budget – 18,5 milliards d’euros en 2016 – et sans efficacité pour l’emploi ni pour l’attractivité économique.

Concernant la nouvelle ponction proposée par le Gouvernement de 3,7 milliards d’euros sur les collectivités locales, nous pouvons maintenant en apprécier les conséquences sur le terrain.
La majorité sénatoriale en propose l’étalement, mais nous pensons qu’elle est contre-productive. En ces journées troublées, où une nouvelle demande d’intervention publique est à l’ordre du jour, vous continuez d’amputer les capacités financières des collectivités sur le terrain.

Au-delà de l’action de l’État pour la protection des populations, l’intervention publique est nécessaire en bien des domaines et notamment en matière d’éducation, de prévention de la délinquance, de justice, d’action sociale, de logement, de sport ou de vie associative. Or nos collectivités ont perdu en capacité d’intervention et la diminution tant de leurs achats que de leurs investissements pèse lourd sur la vie économique et sur l’emploi.

En présentant nos amendements, nous avons fait apparaître la nécessité de renforcer les moyens de la puissance publique pour agir et intervenir auprès des populations, en lien avec l’action des collectivités territoriales. Si les amendements de la majorité sénatoriale ont conduit à la détérioration du solde budgétaire, en attendant peut-être de diminuer les dépenses,…

M. Philippe Dallier. Sûrement !

Mme Marie-France Beaufils. Puisque vous nous le confirmez…

Je poursuis donc en disant que nos propositions avaient probablement l’avantage de modifier ce solde dans le bon sens.

Nous ne voterons donc pas cette première partie du projet de loi de finances.

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