Pour le respect du droit à Calais

Monsieur le Ministre,

Après avoir rencontré le 15 février dernier, les associations de migrants, les syndicats de police et les différents acteurs économiques du Calaisis, je tiens à vous interpeller solennellement sur le droit au regroupement familial des migrants ainsi que sur l’arrêté préfectoral d’évacuation partielle du camp de Calais.
Malgré le dévouement continu des associations et les différentes mesures prises par le gouvernement, force est de constater que la situation des migrants et les conséquences économiques et humaines sur le port et la ville de Calais restent très préoccupantes.

Comme vous l’avez souligné dans différentes déclarations, les migrants ne peuvent pas continuer à vivre dans ce bidonville, ce camp de misère. Ce n’est tout simplement pas digne de la cinquième puissance économique mondiale.
Néanmoins, au regard de la population réelle habitant la partie sud du camp de Calais, tout tend à démontrer que cette évacuation risque de pousser les migrants sur les routes comme le craignent les autorités belges qui ont rétabli les contrôles aux frontières. Et pour les calaisiens, cela risque d’attiser les tensions et de signifier un véritable retour en arrière avec des migrants qui occupent les maisons vides et errent en ville.

Ainsi la question de la méthode se pose quand des témoignages de violences policières nous parviennent en parallèle de l’évacuation du camp, que vous aviez pourtant promise pacifique. Si je condamne bien sûr avec la même vigueur les actes des militants anarchistes No Border, je ne peux accepter que la parole de l’État soit bafouée.

Si le maintien de ce bidonville n’est ainsi évidemment pas une solution durable, une évacuation précipitée de la partie sud du camp ne réglera donc pas le problème mais ne fera que le déplacer.
Par ailleurs, dans le cadre de la coopération internationale, il me semble que la France devrait agir plus efficacement pour faire droit au regroupement familial au Royaume Uni des migrants des camps de Grande Synthe et Calais.

En effet, comme vous le savez, les côtes anglaises agissent comme une véritable obsession pour les migrants qui veulent, coûte que coûte, traverser la Manche au risque de leur vie et au prix d’une image destructrice pour le port et la ville de Calais.

Mais parmi eux, pour beaucoup cela constitue leur droit le plus strict au titre de l’unité familial consacrée par le règlement européen Dublin III ou des règles britanniques d’immigration.

Amnesty International a ainsi identifié de nombreux migrants qui sont en droit de gagner l’Angleterre pour retrouver un père, une mère, un mari, une épouse ou un membre de leur famille. Mais, seule une seule personne en 2015, un Syrien a pu faire valoir ce droit.

En cause se trouve la charge de la preuve ou les difficultés d’accès au droit auquel l’association répond par des mesures simples comme l’allégement des procédures administratives, des brochures d’informations à destination des migrants ou une assistance juridique.
Cela nécessiterait donc une meilleure coopération avec les autorités britanniques tout particulièrement pour les mineurs isolés dont la situation et parfois le dénuement ont alerté Madame Genevève Avenard, la Défenseure des enfants, qui réclament de les faire retrouver au plus vite un parent au titre de la Convention internationale des droits de l’enfant

Pour toutes ces raisons, je vous appelle à renoncer à l’usage de la force pour l’évacuation partielle de la jungle ainsi qu’à une meilleure application du regroupement familial avec les autorités britanniques pour ne pas laisser la région Nord-Pas-De-Calais-Picardie seule face au drame migratoire et humanitaire qui s’y joue.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’assurance de ma haute considération.

Dominique WATRIN
Sénateur du Pas-de-Calais

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