Il ne pourra y avoir de bien vivre ensemble sans redonner aux collectivités les moyens d’agir

Lettre adressée aux maires du Pas-de-Calais.

On commence à mesurer les effets désastreux de la baisse drastique de la Dotation Globale de Fonctionnement (soit 28 milliards d’euros cumulés en moins entre 2014 et 2017) conjuguée à de nouvelles dépenses obligatoires non compensées (ou partiellement), comme les activités périscolaires par exemple. L’élaboration des budgets des communes, des intercommunalités et des départements est ainsi devenue un véritable casse-tête. La baisse de l’épargne brute se traduit déjà par un moindre entretien du patrimoine, des hausses de fiscalité et la tarification ou la réduction de services publics locaux.

C’est maintenant qu’il nous faut encore plus nous rassembler pour refuser ces régressions et engager notre pays sur une autre voie.

En effet, le rapport de l’Observatoire des Finances Locales fait état d’une baisse de 11,4% des dépenses d’investissement du bloc communal bien au-delà de l’effet habituel du cycle électoral. Or comme le reconnaissait Marylise Lebranchu elle-même « toute baisse de la dépense publique est récessive ». Les conséquences sont même douloureuses ! Selon le Président de la Fédération Nationale des Travaux Publics « on ne voit pas comment la situation pourrait s’arranger dans les deux prochaines années car 45% de notre chiffre d’affaires vient des collectivités territoriales ». En réalité, la baisse de l’investissement devrait entraîner la perte de 40 000 à 50 000 emplois dans le BTP et générer 1 milliard d’euros d’allocations de solidarité en plus !

On pourra imaginer tous les plans d’accompagnement que l’on voudra, il ne pourra y avoir d’investissement sans une part d’autofinancement. Il ne pourra y avoir de bien vivre ensemble sans redonner aux collectivités territoriales les moyens d’agir. Or même en réduisant leur niveau de services, ce sont des milliers de communes qui risquent de ne plus respecter la règle de l’équilibre de la Section de Fonctionnement dès 2017.

Cependant, si chacun s’accorde à dire qu’il est essentiel de maîtriser le niveau de dépenses publiques, d’autres moyens sont disponibles.

Avec mes collègues du Groupe communiste, Républicain et Citoyen du Sénat, nous ne cessons de proposer une action résolue contre la fraude, l’évasion et l’optimisation fiscales pratiquées massivement par les plus grandes entreprises. Pourquoi ne pas remettre aussi en cause la part de Crédit Impôt Compétitivité Emploi affectée au secteur assuranciel, bancaire, de la Grande Distribution ? Gérard Mulliez lui-même ne déclarait-il pas avoir touché pour le Groupe Auchan un chèque de 165 millions d’euros, en ajoutant ce commentaire éclairant : « en fait je n’ai rien demandé et de toutes façons je n’en ai pas besoin » ?

Enfin faut-il rappeler que les collectivités locales n’ont aucune responsabilité dans l’endettement de notre pays, que la DGF est historiquement la compensation de taxes locales supprimées par l’État, que la suppression de la Taxe Professionnelle a elle aussi fortement déstabilisé les structures de recettes des collectivités ?

Jean Paul Delevoye aimait à dire, quand il était Président de l’Association des Maires de France, que lorsque la richesse était agricole, les collectivités locales avaient l’impôt foncier, lorsque la richesse était industrielle, elles avaient l’impôt sur les activités productives et maintenant que la richesse est financière, il convient de trouver l’impôt qui lui corresponde.

Pourquoi pas alors, comme le proposent depuis longtemps les élus communistes, la mise en place d’une véritable péréquation verticale assise sur une taxation des actifs financiers des entreprises (soit 25 à 30 milliards d’euros de recettes nouvelles par an au taux de seulement 0,5%).

Il me semble que la question qui doit être posée n’est pas tant celle d’une éventuelle atténuation (en volume ou par un étalement sur la durée) de cette baisse drastique des dotations de fonctionnement des collectivités mais celle de la remise en cause de ces logiques d’austérité, inspirées directement du Pacte de Stabilité Européen, dont chacun peut constater l’échec cinglant. Il faut en réalité redonner aux communes les moyens d’assumer pleinement leurs missions et en même temps sortir notre pays de la crise profonde dans laquelle il est engagé.

Pour 2017, c’est clairement et a minima l’annulation totale de la nouvelle ponction prévue de 3,7 milliards qu’il faut exiger !

Restant à votre disposition pour en discuter personnellement, veuillez agréer l’expression de mes salutations les plus cordiales

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