Situation en Côte d’Ivoire

Situation en Côte d'Ivoire (Artem Beliaikin - https://www.pexels.com/fr-fr/@belart84)

par Robert Hue

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes Cher(es) Collègues,

Des évènements d’une exceptionnelle gravité déchirent la Côte d’Ivoire. La France y est directement et gravement impliquée.

Permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour nos soldats, déployés dans le cadre du mandat de l’ONU, victimes du bombardement déclenché par les forces armées ivoiriennes. Comme nous tous ici je m’associe à la douleur de leurs familles et je transmets mes vœux de rétablissement à ceux qui ont été blessés dans le bombardement du cantonnement français.

Ma pensée va aussi à nos compatriotes qui vivent dans l’angoisse et la peur face aux manifestations et aux violences xénophobes. Je tiens à dire aussi ma tristesse et ma vive inquiétude face aux affrontements de ces derniers jours, qui d’après le Comité International de la Croix rouge ont fait des centaines de victimes ivoiriennes, et des dizaines de morts. Chaque heure qui passe porte son lot de nouvelles tragiques.

Le sang n’a que trop coulé. Maintenant, il n’est d’autre perspective que d’enrayer une escalade aux conséquences incalculables.

La responsabilité de tous est engagée pour l’arrêt des affrontements et dégager une issue politique à la crise. Le gouvernement ivoirien doit prendre toutes les mesures en son pouvoir pour que les appels au calme se traduisent effectivement par une baisse des tensions, pour que la sécurité des étrangers soit assurée. De leur côté, les autorités françaises ont la responsabilité de ne pas se laisser entraîner dans le cycle de la violence. Il est essentiel en effet, que la France préserve sa capacité de facilitateur de la paix et qu’elle reste dans le cadre multilatéral. Nous sommes très attentifs, aussi, aux efforts de médiation des gouvernements africains et tout particulièrement du Président de l’Union africaine , monsieur Thabo MBEKI. C’est également dans ce sens que doivent se situer les décisions de la communauté internationale à l’ONU. Ces décisions doivent s’imposer à tous.

Nous partageons la conviction qu’il n’y pas d’issue dans la violence à la crise qui secoue la Côte d’Ivoire. La base de la solution existe. Le compromis des accords de Marcoussis, confirmé à Accra par le Président Laurent GBAGBO a été accepté en son temps par toutes les parties, que ce soit par le gouvernement ivoirien ou par les mouvements rebelles.

On le sait le désarmement des factions qui devait intervenir le 15 octobre est resté lettre morte. Et seulement une partie des modifications législatives prévues par les accords a été adoptée. La mise en œuvre sincère des engagements pris solennellement pour ce qui concerne le désarmement, comme pour les réformes politiques. L’objectif doit être le retour à la légalité sur l’ensemble du territoire et la fin de la division du pays résultant du coup d’état de septembre 2002 avec en perspective la tenue des élections dans la période à venir.

Plus que jamais, dans cette situation difficile, la présence française et les initiatives que prendra le gouvernement de la France doivent s’inscrire dans la volonté de faciliter ce retour à la paix et à l’unité nationale ivoirienne.

Or la France est elle-même prise dans l’engrenage de la violence. On ne peut ignorer qu’elle est maintenant regardée avec méfiance, et sa présence est parfois présentée et perçue comme marquée par l’héritage colonial.

C’est dire s’il est urgent de redéfinir le sens, la mission de sa présence, notamment militaire. Nous pensons qu’il faudrait ré-envisager, dans le cadre du mandat de l’ONU, la recomposition de la force internationale, dans le sens d’un plus grand multilatéralisme, en relation avec les organisations africaines comme la CEDEAO et l’Union africaine, sur la base d’un mandat clair des Nations unies. L’objectif étant évidemment de déboucher le plus rapidement possible sur une solution politique et le désarmement permettant la pleine souveraineté du peuple ivoirien sur son devenir, et le retrait de toutes les forces étrangères.

J’ajoute, si vous me le permettez, monsieur le Ministre, que le débat que nous avons aujourd’hui, poussé par une actualité dramatique, devrait trouver son prolongement dans une réflexion associant la représentation nationale, sur le plan politique de la France envers et avec l’Afrique, ce continent auquel tant de liens nous rattachent.

Sur l’ensemble de ces points, pourriez vous me dire, monsieur le Ministre, les initiatives que compte prendre la France ?

Retour en haut