Un secteur miné par la libéralisation et l’abandon de toute notion de service public et d’aménagement du territoire

Contribution des élus du groupe CRC aux propositions du groupe de travail sur le financement des infrastructures de transport.

Une nouvelle fois, le Sénat s’est saisi de la question du financement des infrastructures de transport. Il s’agit d’un débat récurrent depuis plusieurs années, puisqu’une mission d’information a déjà été constituée sur ce sujet en 2008.

Aujourd’hui, le constat est partagé unanimement : les infrastructures de transport souffrent d’un sous financement chronique et de choix politiques qui ont asséchés ses sources de financements.

Ainsi, alors que l’AFITF a été créé pour sanctuariser ces ressources et être l’outil d’un rééquilibrage au profit des modes alternatifs à la route, cette structure est aujourd’hui moribonde.

La privatisation des concessions d’autoroutes, tout comme l’abandon de l’écotaxe, ont privé cette structure de ressources pérennes. La question du financement des infrastructures de transport est donc d’une actualité toujours évidente.

Sur les propositions faites par le groupe de travail, nous en partageons certaines.

Ainsi, nous sommes évidemment favorables à la proposition d’investir massivement pendant les quinze prochaines années en faveur de la maintenance, du renouvellement et de la modernisation des réseaux existants, comme le rapport Rivière en soulignait l’importance. Pour autant, cet investissement, si l’on considère qu’il doit être public, suppose de desserrer l’étau sur les finances publiques. Les politiques de rigueur et la baisse des dotations sont incompatibles avec l’effort désigné.

Bien sûr, nous sommes favorables aux éléments de transparence préconisés : à une loi de programmation qui donne la lisibilité à la programmation des infrastructures des transports, comme l’a fait, le rapport Duron, tout comme à la transmission du budget de l’AFITF au Parlement.

Sur les nouveaux financements

Nous partageons l’idée d’un meilleur encadrement des concessions autoroutières, dont l’abandon au privé a constitué une faute politique et stratégique majeure. Ne pas rallonger la durée des concessions semble de bon sens. Pour autant nous allons plus loin en proposant la renationalisation de ces sociétés. L’Etat doit dans un premier temps dénoncer les contrats de concession au regard de considérations d’intérêt général liées à la maitrise de ce réseau. A défaut, il restera pied et main lié aux concessionnaires, qui exigeront continuellement des hausses de tarifs, sur un patrimoine qui a été financé par l’impôt de tous. Avec ce schéma nous restons bien dans la définition d’une rente privée réalisée sur des investissements publics.

Nous partageons enfin, l’idée d’apporter de nouvelles ressources à l’AFITF, ce que permettrait d’ailleurs sur le long terme la renationalisation des concessions d’autoroutes au regard des taux d’intérêts pratiqués actuellement.

Sur les autres financements, les sénateurs du groupe CRC partagent également l’idée de trouver de nouvelles formes pour une écotaxe renouvelée, qui ne s’appuient pas sur un partenariat public privé, particulièrement avantageux pour le privé, comme c’était le cas avec la société Ecomouv. L’idée de faire payer les usagers de la route, et notamment les camions, afin de favoriser le rééquilibrage modal, est une exigence forte liée aux impératifs environnementaux réaffirmés lors de la COP 21. Alors que les usagers du rail payent les infrastructures, ils semblent normal que les usagers de la route en fassent de même.

Pour aller plus loin, il faut en finir avec les avantages fiscaux du secteur routier, notamment l’exonération de TIPP. Aujourd’hui, la route exerce une concurrence déloyale disposant d’un régime fiscal et social avantageux.

Pour cette raison notamment, les sénateurs du groupe CRC ont rejeté la loi Macron, qui ouvre la voie, à une nouvelle concurrence rail/route au profit de la route. L’urgence climatique commande pourtant de favoriser le rail et donc le financement de ces infrastructures.

La reprise de la dette de SNCF réseau est aussi une exigence que nous portons depuis de longues années, puisque cette dette plombe les investissements et les travaux sur le réseau ferroviaire. Les sénateurs du groupe CRC portent depuis longtemps cette exigence, comme en témoigne les propositions de loi qu’ils ont déposé. Ils regrettent donc que le gouvernement ai encore refusé de reprendre une partie au moins de la dette ferroviaire.

A l’inverse, les sénateurs du groupe ne partagent pas la proposition émise par le groupe de travail de rééquilibrer la participation de l’usager au financement du transport ferroviaire de proximité. Le financement des transports par les usagers ne peut être envisagée comme une source de ressources nouvelles, les sénateurs du groupe CRC estiment que les entreprises, qui bénéficient pour leurs salariés de bonnes conditions de transports, doivent également contribuer à l’effort de développement de l’offre ferroviaire. Pour cette raison, ils préconisent une augmentation du versement transport. Ils préconisent également la baisse du taux de TVA sur les transports pour que les autorités organisatrices disposent d’une marge de manœuvre renforcée.

Sur ce fond, et au-delà de ces considérations sur le financement, les sénateurs du groupe CRC estiment que ce qui mine aujourd’hui le secteur du transport public et donc son financement, c’est la libéralisation du secteur liée à l’abandon de toute notion de service public et d’aménagement du territoire. Progressivement, la SNCF a été démantelée, notamment dans son activité fret, la concurrence a été organisée, des lignes jugées trop peu rentables ont été abandonnées, les pans d’activités rentables ont été confiées au privé. L’Etat s’est désengagé du financement et de son rôle d’aménageur.

Ce qui a été placé au cœur de l’activité notamment ferroviaire, c’est la notion de rentabilité.

Les sénateurs du groupe CRC estiment donc, qu’il faut certes donner des financements nouveaux pour les infrastructures, mais qu’il est également important d’affirmer la nécessité d’une maîtrise publique du secteur, et donc l’abandon des lois de libéralisation et d’ouverture à la concurrence. Ce secteur, d’intérêt général, doit faire l’objet d’une politique publique à la mesure des enjeux environnementaux, sociaux et économiques ainsi que des enjeux d’aménagement du territoire.

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