Révision constitutionnelle (2)

Révision constitutionnelle (2) (Friedemann W.-W. - https://flickr.com/photos/e2/)

par François Autain

Le traité signé à Rome le 29 octobre 2004 ne peut préparer la France et les pays de l’Union à relever les défis politiques et économiques qui s’annoncent. Instrument de la mondialisation libérale, comme tous les traités depuis Maastricht, ce texte ne permettra pas à l’Europe de se battre à armes égales avec l’Inde ou la Chine.

Alors que sa part dans les exportations mondiales ne cesse de diminuer, l’objectif majeur de la Banque centrale européenne reste la lutte contre l’inflation, politique mortifère pour l’emploi et la croissance. Ce dogme, véritable camisole de force, nous laisse démunis devant un dollar dévalué de 30 % en un an et met en péril des milliers d’emplois. En outre, le principe de libre concurrence au sein du marché unique fait obstacle à toute politique industrielle, comme à toute restriction à la libre circulation des capitaux.

Faute d’un projet politique clair sur le sens de la construction européenne, ce traité est une fuite en avant sur la pente du déclin. Avec les élargissements successifs à 25, puis à 28 et demain à trente avec la Turquie, l’Europe politique se mue en une forme de Commonwealth : on comprend l’enthousiasme du Premier ministre de sa majesté…

La directive Barroso-Bolkestein témoigne de cette dérive. Elle accroît les risques de dumping social et de délocalisations des emplois. Demain, des pays à bas coûts pourront hisser le drapeau de complaisance dans les pays européens. Le gouvernement tente de nous rassurer, affirme que ce n’est pas pour demain, certains demandent que la santé soit exclue du champ de la directive, mais personne n’est dupe d’une manœuvre dilatoire. Cette directive, comme celle en préparation sur la libéralisation des ports maritimes, sera servie aux Français après le référendum. Les élus républicains n’ont qu’un seul mot d’ordre : retrait de la directive du moins-disant social !

Heureusement le traité de Nice permet le rejet de ce texte ; avec le traité constitutionnel, le poids de la France et de l’Allemagne sera réduit et leurs voix minoritaires. Ceux qui, à gauche, s’apprêtent à voter pour ce texte doivent savoir qu’ils auront les mains liées dès 2009.

Évidemment, la logique de nos institutions l’emportera sur la conviction. Au moment où le Parlement s’apprête à se dessaisir, j’aimerais qu’il se ressaisisse. Mais ne rêvons pas… C’est au peuple français de refuser, en juin prochain, cette Europe du déclin et de la fatalité. Je souhaite que tous les partis et toutes les sensibilités puissent s’exprimer. Des comités pour le « non » se constituent dans tous les départements, animés par des communistes, des socialistes, des Verts et des sans-partis.

C’est dans le sursaut et l’intelligence de notre peuple que je place tous mes espoirs ; pour l’heure, je ne voterai pas ce projet de loi constitutionnelle.

Retour en haut