Organismes génétiquement modifiés : explication de vote

Monsieur le ministre d’État, je ne vous cacherai pas que j’ai plus apprécié les dernières phrases de votre intervention que son début, même si vous avez su, avec le brio que l’on vous connaît, lui donner des accents très fédérateurs. (M. Jean Desessard applaudit.)

Les débats sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés n’ont pas été un combat, comme on voudrait le faire croire, entre pro-OGM et anti-OGM.

Ces débats ont été l’expression de deux visions politiques opposées : l’une prête à faire de l’argent au-delà de toute considération éthique, humanitaire et environnementale ; l’autre qui souhaite voir avancer la recherche dans le respect de la santé publique et de la biodiversité, en encourageant la mise au point d’OGM de deuxième génération socialement utiles.

La majorité parlementaire est restée muette, s’alignant systématiquement sur la commission. Ce silence en dit long !

Ce texte pourrait être intitulé : « projet de loi Monsanto ». (Mme Marie-Christine Blandin applaudit.) Même s’il traite de manière plus générale l’ensemble des OGM, sa logique est sous-tendue par le problème du maïs MON 810.

La coexistence entre les cultures OGM et non-OGM est impossible et les risques de dissémination présentent le double inconvénient d’être incontrôlables et irrémédiables. Pourtant, tout est en mis en oeuvre pour multiplier la présence d’OGM sur le territoire.

Ce projet de loi constitue, n’en déplaise au Gouvernement, une véritable négation des objectifs du Grenelle de l’environnement.

Quand aux conséquences sur la santé de nos concitoyens, si la communauté scientifique est encore partagée, nous pensons que les politiques doivent prendre leurs responsabilités et éviter au maximum d’exposer les personnes à des dangers même minimes.

Nous avons tenté d’encadrer ce texte en y introduisant certaines précautions, en renforçant les garanties de transparence. Mais, là encore, les accepter aurait sans doute représenté une trop grande contrainte pour la filière OGM.

Vous avez refusé l’étiquetage des semences et des produits alimentaires. L’opinion publique a été particulièrement méprisée dans ce débat.

Ce projet de loi n’améliorera pas non plus le revenu de nos paysans. Au contraire, la promotion des OGM va renforcer leur dépendance à l’égard des semenciers. Le débat sur les semences de ferme, toujours repoussé à plus tard, montre à quel point les parlementaires font peu de cas des dangers inhérents à la brevetabilité du vivant, qui est une aberration philosophique, éthique et économique.

Nous avons eu l’occasion, dans cet hémicycle, de dénoncer ensemble les dangers de l’uniformisation des saveurs, des produits et des pratiques agricoles imposée par l’OMC et l’Union européenne, qui sont deux cordes au cou de notre agriculture. Cette fois-ci - et c’est fort dommage ! -, la majorité sénatoriale n’a pas été sensible à ces dangers.

En réalité, ce projet de loi tend à imiter, sans en avoir les moyens, l’exemple des pays les plus productivistes du monde - qui ne s’encombrent pas, il est vrai, de considérations philanthropiques, environnementales ou humanitaires - ainsi qu’à asseoir définitivement le pouvoir de grandes multinationales et de grands États sur la souveraineté alimentaire des pays, qui devrait rester une priorité pour tous.

En l’état actuel des connaissances, comme nous n’avons cessé de le dire au cours des débats, le bilan coûts-avantages des OGM joue en leur défaveur.

Le Sénat s’apprête donc à voter un texte qui permettra, certes, de mettre notre législation en conformité avec les directives européennes, mais également de favoriser l’extension des cultures OGM. La France évitera une amende de 168 000 euros, mais à quel prix !

Au regard de l’importance et de la diversité des enjeux que présente le dossier des OGM, nous pensons qu’il serait essentiel de consulter nos concitoyens sur ce sujet. Puisque notre collègue Dominique Braye dénonçait le caractère peu représentatif des participants au Grenelle de l’environnement, nous sommes surpris qu’il n’ait pas voté notre amendement !

Pour conclure, comme l’a cyniquement résumé en une seule phrase le président de la Canadian seed growers’ association : « Partout dans le monde, il y a une telle résistance contre l’arrivée de n’importe quelle plante génétiquement modifiée, que le seul moyen de progresser, c’est de pratiquer la contamination. »

Avec ce projet de loi, cette logique a désormais officiellement traversé l’Atlantique ? C’est pourquoi nous ne le voterons pas.

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