Une culture qui a besoin d’être favorisée et non entravée

Au début du XXe siècle, la Réunion était le seul exportateur mondial de vanille avec le Mexique, mais cette filière décline depuis un siècle dans le département.

Aujourd’hui, l’île n’exporte plus de vanille, trop chère et dont elle n’a produit que 4,6 tonnes de variété noire en 2004. Alors que le kilogramme s’achète pour un euro à Madagascar, il faut payer 20 euros dans le département. Même l’autosuffisance du marché local n’est plus assurée.

Malgré ce constat désastreux, les professionnels ouvrent de nouvelles perspectives pour cet arôme, en misant sur la qualité et le haut de gamme. Une démarche de labellisation, identification géographique protégée (IGP) « Vanille de la Réunion » a donc été engagée il y a quelques années, en partenariat avec le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l’université de la Réunion, les coopératives et les 150 planteurs du département qui se partagent 200 hectares.

Toutefois, les obstacles à l’écoulement de leur production se cumulent avec l’évolution des concessions.

En effet, depuis des générations, l’Office national des forêts accorde des concessions de la forêt domaniale départementale aux planteurs de vanille des communes de Saint-Philippe et de Sainte-Rose. Les arbres servent de tuteurs aux lianes de vanille qui fournissent plus de la moitié de la production de l’île ; les producteurs acquittent une redevance. Dans cette région particulièrement déshéritée, la production de vanille apporte d’appréciables ressources d’appoint. S’ajoute un rôle identitaire considérable, puisque la fécondation de la vanille a été découverte par Edmond Albius, un esclave réunionnais.

Or, depuis quelques temps, l’ONF met fin sans explication aux contrats en cours et demande aux planteurs d’enlever leurs lianes dans les trois mois, sans proposer ni terrains de rechange, ni indemnité. La vanille replantée ne rapporte qu’au bout de trois ans et les planteurs ne disposent pas de foncier, alors que l’ONF gère 12 000 des 16 000 hectares de Saint-Philippe.

Ne pourrait-on accorder de nouveaux terrains aux planteurs qui le souhaitent et accompagner financièrement ceux qui doivent transplanter leurs cultures ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme. - Je souhaite d’abord rappeler combien les enjeux sociaux, économiques et identitaires de la production de vanille Bourbon sont pris en considération par le ministère de l’agriculture, puisque le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (Posei) contribue au maintien des surfaces plantées à la Réunion, ainsi qu’à la production de vanille verte. L’aide est majorée d’un tiers pour les producteurs engagés dans une démarche de labellisation.

En tant que gestionnaire du domaine, l’ONF octroie des concessions aux producteurs de vanille, en conciliant objectifs économiques et contraintes environnementales. Certaines concessions ont été résiliées, toujours pour des raisons clairement identifiées. Ainsi, certaines ont été résiliées au sein de la commune de Saint-Philippe après l’éruption volcanique survenue en avril 2007, car elles étaient situées dans le périmètre recouvert par la lave. Tous les concessionnaires ont été réinstallés dans les zones de repli proposées par l’ONF. La redevance due pour 2007 a fait l’objet d’une remise gracieuse. D’autre part, des objectifs spécifiques d’aménagement et de préservation ont concerné certaines concessions situées dans des zones à l’intérêt écologique particulièrement élevé. Il s’agit de la réserve biologique littorale de Saint-Philippe, des forêts de la Coloraie-du-Volcan et de Bois-des-Couleurs-des-Bas, ainsi que de Bois-Blanc et de l’Anse-des-Cascades, où se trouvent encore des reliques de forêts primaires très bien préservées. Sur les terrains de la réserve biologique de Bois-de-Couleurs-des-Bas, les concessions sont arrivées à expiration au cours de l’année 2008, ceux dont les planteurs avaient été informés dès la signature des concessions. Une situation analogue se présentera pour les autres réserves biologiques.

L’importance capitale du foncier pour les producteurs a motivé un examen attentif et individuel des situations par l’ONF, en vue de concilier la préservation harmonieuse du capital écologique et le développement de la Réunion. Il est ainsi apparu que trois des dix producteurs dont les concessions avaient pris fin en 2008 pouvaient assurer une bonne pratique de la culture de vanille en sous-bois et contribuer à régénérer des espèces indigènes dans leurs parcelles, en collaboration étroite avec l’ONF, qui a donc renouvelé leurs concessions. Mais il n’a pas pu renouveler les autres concessions et réalise actuellement une étude devant permettre soit de s’assurer que les intéressés pourront fournir les mêmes garanties que leurs trois collègues, soit d’identifier des solutions alternatives leur assurant des concessions à un horizon de vingt ans. En tout état de cause, il s’efforce de stabiliser la situation des producteurs dont l’activité ne serait pas compatible avec la préservation de reliques de forêts primaires particulièrement précieuses. Une condition suspensive à cette procédure serait évidemment un non-paiement des redevances antérieures.

Les aides versées à ses planteurs seront bien sûr maintenues.

Mme Gélita Hoarau. - Je retournerai sur le terrain voir ce qui se passe, tout en prenant acte des avancées positives que vous avez formulées.

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