La RGPP réduit la présence de l’État

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » connaît une stabilité budgétaire, par rapport à 2009, de 2,6 milliards d’euros de crédits de paiement.

Ce projet de budget est conforme aux dispositions de la RGPP, et confirme les profondes modifications architecturales des services déconcentrés de l’État dans le but d’améliorer « les gains de productivité ».

La RGPP réduit la présence de l’État par l’amoindrissement des services départementaux pour les reconcentrer sur la région, ce qui n’est guère innocent au regard de la réforme à venir des collectivités territoriales.

Ce budget confirme la tendance observée l’année dernière, avec 800 emplois supprimés, dont 736 pour le seul programme 307 « Administration générale ».

On parle d’ailleurs ici de trois départs en retraite sur quatre non remplacés. Que de zèle au regard de votre politique, déjà très contestable, qui vise le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite !

Réduire les effectifs au seul motif de maîtriser la masse salariale n’est guère valable, surtout en s’appuyant de manière équivoque sur l’amélioration de la qualité des services.

Il est d’ailleurs à craindre que cette réduction ne se poursuive l’année prochaine lorsque vous faites remarquer que la masse salariale augmente « encore » de 1,7 %. La création de l’Agence nationale des titres sécurisés et ses 128 postes est ainsi emblématique de votre politique, car cela s’est accompagné d’une réduction drastique des effectifs des agents de préfecture qui étaient chargés de la délivrance des titres.

On évoque 681 postes supprimés, ce qui fait donc 533 emplois détruits, alors même que cette agence doit faire face à la réforme du passeport biométrique et à l’immatriculation à vie des véhicules.

La nouvelle organisation des préfectures centralise le contrôle de légalité, mais celui-ci sera sélectif, privilégiant les actes les plus importants, en vertu de la loi du 12 mai 2009, qui vous permet de restreindre par voie d’ordonnance le champ des actes soumis à l’obligation de transmission aux préfets. On peut donc craindre une rupture d’égalité quant au service rendu dans les préfectures.

Mais ce sont surtout les sous-préfectures qui vont voir leur rôle axé sur celui de conseil aux collectivités territoriales, et ce dans le but, dites-vous, « d’optimiser l’efficacité des services présents aux niveaux régional et départemental ».

Or, bien que vous mettiez en avant le maintien des sous-préfectures, car elles sont l’incarnation de la proximité de l’État avec les citoyens, nous ne sommes pas dupes de vos ambitions, lorsque vous modifiez, par l’intermédiaire du préfet de région, qui voit ses prérogatives largement augmentées, les périmètres de quarante et un arrondissements dans dix-sept départements ; lorsque vous lancez des pistes quant au possible jumelage de deux sous-préfectures voisines ; ou encore lorsque vous transformez une sous-préfecture en « Maison de l’État », comme à Boulogne-Billancourt, au simple motif que la présence d’un haut fonctionnaire n’est pas indispensable, car les services d’accueil au public sont suffisamment importants.

À terme, il y a bel et bien le risque de voir disparaître de nombreuses sous-préfectures et donc, encore une fois, une présence amoindrie de l’État.

De fait, les personnels s’inquiètent de ces modifications, car ils sont dans le flou quant à leurs futures missions. Dans ma permanence départementale, j’ai mesuré réellement leur désarroi.

C’est pourquoi nous voulons un engagement ferme de votre part concernant la conservation de nos 250 sous-préfectures et la prise en compte des demandes du personnel.

Dans le même ordre d’idées, les conseillers d’administration créés pour remplacer les sous-préfets qui sont surtout concentrés, selon vous, dans des « territoires relativement peu peuplés et où les enjeux socio-économiques sont considérés plus faibles que ceux posés dans les départements urbains », ne seraient pas astreints à une obligation de permanence, ce qui est problématique, car la continuité de l’État doit être assurée par son représentant.

De même, ils n’auront pas l’autorité du corps préfectoral, ce qui peut, là encore, être dommageable dans leurs rapports avec les élus locaux, élus ruraux pour la plupart, qui s’inquiètent, eux aussi, de la nature de leurs relations.

Il est d’ailleurs étrange que l’un des objectifs de la création de ces conseillers d’administration soit d’offrir aux attachés principaux du ministère de l’intérieur « des perspectives élargies de promotion professionnelle et d’accès à des postes de responsabilité supérieure ».

Cette création se veut-elle donc comme une gratification offerte à des hauts fonctionnaires, les citoyens n’y gagnant rien, ni les élus locaux, d’ailleurs, quant aux services publics qu’ils sont en droit d’attendre de la part de l’État ?

Enfin, il m’apparaît important de suivre et d’appuyer les recommandations du rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Anziani, en matière de lutte contre les dérives sectaires. Les observations faites l’an dernier n’ont pas été entendues, mais j’ose espérer que les cinq recommandations seront suivies d’effet cette année.

En conclusion, le budget concernant cette mission est évidemment à mettre en relation avec la réforme des collectivités territoriales, qui va bientôt venir en examen devant notre assemblée.

La modification architecturale de l’État anticipe la réforme des collectivités territoriales. Nous nous dirigeons vers une régionalisation de l’administration déconcentrée, qui va voir les services de l’État s’éloigner des besoins de nos concitoyens et défigurer le maillage territorial, votre réforme se faisant donc au détriment des usagers.

Retour en haut