Exploitation des Schistes bitumineux en Seine-et-Marne : lettre ouverte au préfet du département

Exploitation des Schistes bitumineux en Seine-et-Marne : lettre ouverte au préfet du département

Monsieur le Préfet,

Le ministère de l’écologie a récemment octroyé de nombreux permis de recherche d’hydrocarbures liquides ou gazeux sur tout le territoire français et ce dans la plus grande opacité. La plupart d’entre eux concernent des gisements de gaz ou de pétrole dits « non conventionnels ».

La Seine-et-Marne est particulièrement concernée par cette nouvelle activité. Le permis, dit « Château-Thierry », autorise l’exploration aux alentours de Doue sur une superficie de 830 km2.

L’ensemble du pays de Meaux, une partie du pays Gressois et Fertois seront touchés. Il a été accordé le 4 septembre 2009 à la société Toreador, une société française, qui s’est associée avec Hess, une société nord-américaine, pour essayer de trouver et d’exploiter le pétrole présent dans les roches.

Les perspectives d’exploitation sont importantes selon ces sociétés, 90 millions de barils sont espérés, et les perspectives de profit le sont tout autant. L’inquiétude et la colère des habitants de ces secteurs et de leurs élus est légitime. Dans notre région, trois permis d’exploration ont déjà été accordés, et plus de vingt demandes déposées, sans aucune transparence ni concertation avec les collectivités concernées …

Dans cet esprit, nous soutiendrons et participerons à la manifestation nationale de ce samedi 5 mars pour la préservation des espaces naturels, du cadre de vie et contre les risques environnementaux induits par cette technique particulière d’exploitation. Et nous estimons urgent d’ouvrir, sur ce sujet, un débat public avec la société civile, les élus locaux et nationaux, pour dresser un inventaire complet des conséquences environnementales, sanitaires, économiques et sociales de cette nouvelle folie industrielle et des impacts pour notre département.

Nous ne pouvons accepter que des projets d’exploration des schistes bitumineux, première étape vers une future exploitation, aient lieu sur notre territoire, d’autant que les demandes de permis d’exploration concernent une part très significative de terres agricoles.

Or, vous le savez, l’extraction comporte des risques environnementaux très élevés : la technique dite, de « fracturation hydraulique » consiste à propulser à très haute pression des millions de litres d’eau mélangés avec des produits chimiques et du sable, afin de faire exploser la roche à plus de 2500 mètres de profondeur et ainsi récupérer l’huile ou les gaz de schiste. Il en résulte une pollution durable du sous-sol, un risque élevé de contamination des nappes phréatiques par des composés cancérigènes ou toxiques comme les métaux lourds, et donc un danger non négligeable pour la santé des habitants. Le processus de transformation des matières premières extraites est également très polluant et émetteur de gaz à effet de serre. Enfin, le 26 février dernier, le « New York Times » publiait des données triées parmi 30.000 documents confidentiels produits par l’agence de protection de l’environnement américaine. Ces documents ont révélé que les eaux rejetées par les forages de gaz de schiste sont radioactives à des taux pouvant atteindre 1.000 fois les limites autorisées pour l’eau de boisson.

Alors que notre pays est théoriquement engagé dans la lutte contre les changements climatiques avec un objectif de facteur 4 en 2050, nous estimons donc complètement contradictoire de chercher de nouveaux combustibles d’origine fossile, au moyen d’une technique extrêmement coûteuse en énergie. L’exploitation des gaz de schiste et schistes bitumineux est une véritable aberration climatique et environnementale.

Le 2 février dernier, Nathalie Kosciusko-Morizet a annoncé à l’Assemblée Nationale avoir commandé « une mission pour évaluer les enjeux, et d’abord les enjeux environnementaux », des gaz de schiste. Elle a assuré qu’ « aucune autorisation de travaux sur le gaz de schiste ne sera donnée ni même instruite avant le résultat de cette mission ». Dans ce contexte, nous vous demandons, monsieur le Préfet, d’appliquer le principe de précaution en suspendant l’attribution des permis d’exploration, d’abroger les permis de recherche en cours de validité et de décréter sur notre département un moratoire d’urgence sur tous les forages d’exploration prévus dans les prochaines semaines.

Vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien accorder à cette demande, nous vous prions de croire, Monsieur le Préfet, en l’expression de notre considération distinguée.

Réponse du Préfet de Seine-et-Marne

Michel Billout, sénateur de Seine-et Marne, président de l’association des élus communistes et républicains de Seine-et-Marne

La manifestation à Doue du samedi 5 mars 2011

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