Nous devons rompre avec les logiques marchandes et financières qui aggravent les risques et la pollution

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Il est grand temps d’avoir un débat public sur les questions énergétiques. L’accident majeur de Fukushima a révélé les inquiétudes fondées et légitimes de la société civile car l’énergie nucléaire a cristallisé les antagonismes.

Le président de la République, deux jours après le drame, a exclu toute sortie du nucléaire, tandis que d’autres militaient pour une sortie immédiate, oubliant les contraintes scientifiques et climatiques qui s’imposent à nous.

Quelle alternative au nucléaire, hors les énergies carbonées ? Ce ne sont pas les débats restreints organisés au Sénat qui ont permis d’ouvrir la discussion de fond. Toutefois, ils ont montré les méfaits de la politique de libéralisation, qui prônait, avec des conséquences délétères pour la société, la concurrence généralisée.

Plus de transparence, une meilleure association des citoyens, des salariés et des usagers s’imposaient. Au contraire de ses promesses, rappelons-nous les déclarations de Nicolas Sarkozy en 2004 ; la droite a décidé, seule, de privatiser GDF. Après le Grenelle de l’environnement, voilà que le débat rebondit sur la question de la prise de participation d’opérateurs privés dans le secteur nucléaire, rendue possible par la loi portant nouvelle organisation des marchés de l’électricité (Nome) ! Et cela tandis que le Gouvernement refuse de rendre public le rapport Roussely.

Nous devons rompre avec les logiques marchandes et financières qui aggravent, de surcroît, la pollution. On estime à 1,6 milliard le nombre d’hommes qui n’ont pas accès à l’électricité dans le monde. Cela emporte des conséquences dramatiques pour la santé et les politiques de transports, qui touchent les populations du sud.

La précarité énergétique est aussi une réalité au nord. L’Observatoire qui la mesure considère que 3,5 millions de citoyens en sont victimes. Et combien renoncent à se chauffer faute de moyens ? Le Gouvernement a supprimé la prime à la cuve, quand les factures augmentaient de 5 % par an. Et la contribution annoncée des compagnies pétrolières ne sera qu’une goutte d’eau, tandis que les grands groupes comme Total enregistrent des bénéfices record.

Les tarifs du gaz et de l’électricité ont augmenté de façon spectaculaire et les tarifs sociaux n’endiguent pas le problème. C’est la déréglementation au profit de la hausse des prix que vous organisez : plus de 61 % d’augmentation du prix du gaz depuis 2005 ! Et le Gouvernement se désengage, puisque le décret de 2009 permet à l’entreprise, entre la révision annuelle du tarif, de le modifier à sa seule initiative, après avis de la CRE.

La loi Nome organise, pour 2015, un dispositif similaire pour l’électricité. Quand cesserez-vous de faire payer aux consommateurs un déficit imaginé de toute pièce par l’entreprise, via un transfert de charges factice sur sa branche commerciale ?

Nous demandons qu’un comité associant élus, usagers et salariés ait à se prononcer sur les prix.

Selon la Commission européenne, le prix de l’électricité serait trop bas chez nous ! C’est bien plutôt le défaut d’investissement, imposé par la recherche de la rentabilité, qui a des conséquences dramatiques pour l’avenir. Et que dire de la loi Nome, qui dépouille l’usager d’un investissement que, comme citoyen, il a contribué à payer ?

Quant à la filière nucléaire, nous demandons l’arrêt de la sous-traitance qui externalise 80 % des risques professionnels. Et que l’on cesse de mettre en concurrence les opérateurs.

S’agissant de la sûreté des installations, une formation poussée des salariés s’impose. La sûreté a un aspect social : il faut revenir au modèle de l’entreprise intégrée.

Le réchauffement climatique, la raréfaction des ressources fossiles devraient être une raison suffisante de renoncer aux logiques marchandes. L’effort en faveur des économies d’énergies et du développement des énergies renouvelables est certes indispensable, mais les efforts ne sont pas à la hauteur -voir le fiasco du photovoltaïque.

Les énergies renouvelables doivent être associées à d’autres sources d’énergies et une vraie politique de l’énergie suppose un dispositif cohérent.

Le système électrique ? Vous l’avez fragilisé en le mettant à la merci des traders.

Les moyens dédiés à la recherche, notamment fondamentale, doivent être renforcés. Ceux qui sont alloués au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) ne sont pas à la hauteur.

Le rapport d’information de M. Billout dénonce le manque de réflexion sur la spécificité du système électrique et la notion de sécurité d’approvisionnement.

L’ensemble de la politique énergétique doit être revu : sécurité, accès pour tous, recherche, formation, autant d’enjeux incompatibles avec les logiques financières.

Il est temps de mettre en oeuvre, en coopération, des logiques supranationales cohérentes et solidaires, au profit de nos concitoyens. Nous voulons une politique énergétique publique au service de l’intérêt général et respectueuse de l’environnement, porteuse d’exigences sociales fortes pour les travailleurs du secteur.

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