La politique industrielle promise par le Président de la République n’a jamais vu le jour

La politique industrielle promise par le Président de la République n'a jamais vu le jour - Loi de finances pour 2012 : économie (Pixabay)

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Économie » marquent un net recul. Une fois encore, un amendement du Gouvernement a tendu à grever cette mission de plus de 12 millions d’euros.

Aucune véritable priorité ne semble se dégager, si ce n’est la nécessité de réconforter les agences de notations. Or cette mission contient des programmes essentiels, qui concernent aussi bien le développement des entreprises, des PME, de l’artisanat, des professions libérales et de l’emploi que l’industrie, la filière énergétique et le développement des télécommunications.

Monsieur le secrétaire d’État, ces domaines sont des secteurs clefs, fragilisés par la crise actuelle, qui a été provoquée par les marchés financiers, ces entités virtuelles opposées à la réalité productive et économique dont nous parlons ce matin. Comme l’a souligné M. le rapporteur spécial Christian Bourquin, comment pouvez-vous affirmer soutenir la croissance avec un tel budget ?

Ainsi, le programme emblématique « Développement des entreprises et de l’emploi » est en baisse de 7,3 % par rapport à 2011 et connaît un reflux de 12 % par rapport à 2009. Ce programme est celui qui est le plus affecté par la politique d’austérité annoncée par le Gouvernement. Cela vient d’être démontré, la diminution de sa dotation pénalise particulièrement les moyens d’intervention de la mission pour le soutien aux entreprises et le développement de leur activité et de l’emploi, moyens qui sont en baisse de 25 %.

Pis, en cette période critique, vous accentuez la fragilité de certaines entreprises et territoires. Ainsi, et ce n’est qu’un exemple, les crédits du FISAC, dont nous avons longuement parlé ce matin, diminuent d’année en année, avec une baisse de 33 % en 2011 et de 36 % annoncée pour 2012. C’est l’offre commerciale et artisanale de proximité dans des zones rurales ou urbaines fragilisées qui est touchée. Vous prenez le risque de faire disparaître des emplois non délocalisables, qui irriguent pourtant notre territoire. La lutte contre le chômage, qui connaît des hausses record, devrait pourtant être la priorité du Gouvernement !

De même, la dotation en faveur des politiques industrielles diminue de 9 %. La politique industrielle promise par le Président de la République n’a jamais vu le jour. Au contraire, la spirale de la fermeture de sites, des délocalisations, de la précarisation des emplois et de la hausse du nombre de travailleurs pauvres n’a pas été enrayée. La désindustrialisation que nous vivons met en danger notre pays. Pour rester dans une actualité alarmante, tout le monde à Peugeot, monsieur le secrétaire d’État, se souvient du triste épisode de Gandrange.

Selon l’INSEE, pour le seul mois de septembre dernier, la production de l’ensemble de l’industrie a diminué de 2 %. Pourtant, M. Baroin se félicitait que le solde en matière d’emplois nets dans l’industrie était positif, pour la première fois en dix ans. C’était oublier que plus de 700 000 emplois salariés directs ont été supprimés pendant cette même période !

Nous espérions que ce budget serait l’occasion d’affirmer l’émergence d’une politique volontariste destinée à soutenir la filière industrielle dans son ensemble et à faire émerger une filière liée aux énergies nouvelles. Nous espérions que ce budget permettrait à la France de « demeurer une grande nation industrielle », et de « pérenniser l’emploi industriel sur le long terme », comme l’annonçait le Président de la République l’an dernier. Il n’en est rien, et c’est même visiblement le contraire qui se produit. Or l’État ne peut continuer à se désintéresser à ce point de son tissu productif. Nous refusons d’abdiquer face à ce qui nous est présenté comme une fatalité.

Les crédits en direction du développement et régulation des télécommunications, des postes et de la société de l’information sont en baisse de 4 %. Or, monsieur le secrétaire d’État, c’est aujourd’hui que le déploiement du haut et très haut débit est indispensable pour assurer l’installation et la pérennité des entreprises sur les territoires. Le Président de la République a annoncé, à l’issue des Assises des territoires ruraux, que son objectif était d’assurer la couverture du territoire national à très haut débit en 2025. Il sera bien sûr trop tard ! C’est aujourd’hui que le territoire économique se construit et que la fracture numérique se creuse.

Pourtant, le Fonds d’aménagement numérique du territoire, créé par la loi du 17 décembre 2009, n’est toujours pas alimenté, alors que tout le monde, à droite comme à gauche, s’est prononcé en faveur d’un financement pérenne de ce fonds. Monsieur le secrétaire d’État, quand et comment sera-t-il alimenté ? Taxer les opérateurs privés est, selon nous, incontournable. Cette vérité n’est pas dangereuse : c’est un impératif d’aménagement du territoire et un enjeu industriel pour notre pays.

Pour conclure, alors que le Gouvernement présente un projet de loi renforçant le droit des consommateurs, les crédits en faveur de leur protection économique et de leur sécurité sont en baisse de 1 %. Cette incohérence pourrait prêter à sourire si elle ne caractérisait pas le budget de la mission « Économie » et si elle n’était pas contradictoire avec la mission d’accompagnement qui doit être celle de l’État pour aider nos entreprises à traverser cette crise sans précédent.

Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d’État, nous ne pouvons décemment pas voter ce projet de budget.

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