Cette proposition de loi est un progrès, mais il faudrait renforcer la recherche publique

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous achevons, après plusieurs semaines d’interruption, l’examen de la proposition de loi, déposée par le groupe écologiste, relative à l’indépendance de l’expertise en matière de santé et d’environnement et à la protection des lanceurs d’alerte.

Pour notre part, nous considérons que les objectifs visés par la proposition de loi sont intéressants, d’autant que la discussion en séance publique et l’adoption des nombreux amendements, en particulier ceux de la commission des affaires sociales, ont permis d’enrichir utilement le texte, lui donnant la cohérence qui manquait à la version initiale.

Aujourd’hui, si nous adoptons cette proposition de loi, les lanceurs d’alerte disposeront enfin d’un statut juridiquement reconnu et protecteur. Bien entendu, nous devrons observer l’évolution de la situation dans le temps : peut-être devrons-nous apporter des correctifs, en fonction de la manière dont ce dispositif vivra. Quoi qu’il en soit, le texte constitue une bonne base de départ et, rappelons-le, il permet enfin la mise en œuvre effective de l’article 52 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, dite « loi Grenelle 1 ».

La proposition de loi permet également d’étendre les compétences des membres des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, au sein des entreprises de plus de dix salariés, aux aspects environnementaux et sanitaires. Nous espérons maintenant que les membres élus des CHSCT pourront réellement bénéficier de formations et du temps nécessaire leur permettant d’appréhender efficacement leurs nouvelles prérogatives, puisqu’il n’est pas évident d’aborder ces questions sans préparation.

Par ailleurs, la création de la commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé et d’environnement permet de garantir, tout au long du traitement de l’alerte, le bon déroulement de la procédure, la « traçabilité » – pour reprendre l’expression de M. Dantec –, et la bonne coordination des acteurs. Une telle démarche est un gage d’efficacité et de transparence. Encore faudra-t-il que les subsides nécessaires à son bon fonctionnement soient accordés. Mme la ministre a évoqué quelques pistes, mais il est évident qu’un minimum de moyens est indispensable.

Sur le fond, comme nous l’avons tous déploré ici, l’expertise scientifique est largement soumise aux lobbies, aux conjonctions d’intérêts, en dépit et à rebours même de l’intérêt général. Nous considérons donc que l’adoption de la proposition de loi constituerait un premier pas encourageant, permettant de replacer l’intérêt général au centre de l’expertise scientifique en matière environnementale ou sanitaire. C’est pour cette raison que nous lui apporterons nos voix.

Mais il nous faut aller plus loin. Nous devons ainsi nous reposer collectivement la question du financement de la recherche et de sa soumission trop fréquente aux intérêts privés. Nous souhaitons que soit réhabilitée l’idée même de recherche publique.

Comme nous l’avions également demandé, nous souhaitons que soient redéfinis les contours du secret industriel, qui entrave souvent aujourd’hui la transparence des expertises et les pouvoirs de contrôle des instances concernées, comme des citoyens.

Nous vous l’avons dit, dans une volonté constructive, nous voterons la proposition de loi.

M. Christian Bourquin. Bravo, madame !

Mme Évelyne Didier. Notre position est claire depuis le début, mon cher collègue : sans passions ni discussions de tous genres, nous somme favorables à la proposition de loi. C’est la preuve que nous adoptons des démarches constructives ; je le dis pour vos collègues de l’Assemblée nationale !

Avant de conclure, et pour élargir un peu nos réflexions, je me permets de vous alerter, mes chers collègues, sur la situation réelle, aujourd’hui, des représentants des personnels au sein de l’entreprise, de tout citoyen qui fait le choix de l’engagement. En effet, des années de pouvoir de droite ont conduit à la criminalisation même de l’activité syndicale, comme en ont témoigné les poursuites contre les « cinq de Roanne ». Nous sommes particulièrement heureux à ce titre de la décision rendue en appel qui les a dispensés de peine.

Marquer l’idée de changement et rétablir la confiance entre les acteurs publics et les citoyens demandent des actes forts de la part du Gouvernement. Pour permettre à chacun de s’engager pour l’intérêt général et de devenir, le cas échéant, lanceur d’alerte, il est nécessaire qu’un climat apaisé existe et qu’une réelle liberté d’expression prévale. Cela signifie que l’on considère l’exercice de ce droit comme normal et faisant partie du rôle de tout citoyen.

Dans ce cadre, le Président de la République avait pris l’engagement, durant la campagne pour l’élection présidentielle, de faire adopter une loi d’amnistie pour les syndicalistes réprimés dans leur activité.

Mme Laurence Rossignol. C’est vrai !

Mme Évelyne Didier. Ce projet de loi utile doit être présenté rapidement au Parlement. Nous l’attendons !

C’est donc sur cette demande très officielle et symbolique que je souhaite conclure cette intervention, tout en réitérant le plein accord de mon groupe avec le texte qui nous est soumis.

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