La preuve que la France peut dire non aux accords transatlantiques !

Tribune parue dans le n°85 d’Initiatives, été 2013.

Le 15 juin dernier, le Conseil européen a validé le mandat de négociation proposé par la Commission européenne ouvrant les négociations de libre-échange commercial avec les États-Unis. À l’origine, ce mandat incluait les industries culturelles dans la discussion. Les biens et services culturels y étaient considérés au même titre que les autres biens commerciaux, remettant ainsi en cause le principe d’exception culturelle.

Celui-ci a pourtant permis à la France comme à l’Europe de maintenir l’existence et la vivacité d’une offre culturelle de qualité propre. Ce principe, vital pour la création, permet d’en assurer la diversité face à l’uniformisation culturelle. La libéralisation de ce secteur entraînerait de graves conséquences en matière de financement et de soutien à la création, de quotas de diffusion, de promotion des œuvres européennes et de présence de capitaux étrangers dans les médias.

La reconnaissance et le maintien de l’exception culturelle en Europe ont toujours été un combat. Il est le fruit de batailles acharnées contre le GATT en 1993 ou l’AMI en 1998. La France a chaque fois joué un rôle fondamental. C’est dans cet esprit, qu’avec l’ensemble des membres du groupe CRC, j’ai déposé le 18 avril dernier, une proposition de résolution européenne « relative au respect de l’exception culturelle dans les accords commerciaux Europe/États-Unis ». L’objet de cette PPRE était de rassembler les parlementaires contre cette offensive libérale et d’enjoindre le gouvernement français à défendre l’exception culturelle face à la Commission européenne, en exigeant le retrait des biens et services culturels de cet accord.

Notre PPRE exhortait le gouvernement à utiliser son droit de véto. Nous avons été entendus, et le gouvernement français a finalement obtenu gain de cause, avec le retrait du secteur audiovisuel de ces accords commerciaux. Nous nous en félicitons, même si nous avons bien conscience de la fragilité et du caractère partiel de cette victoire. Il nous faut maintenant prolonger notre mobilisation contre l’ensemble de cet accord.

Cette première victoire doit servir de tremplin à la remise en cause de la nature même de ces négociations. La France a le pouvoir et l’influence nécessaire pour mettre un terme à ce nouveau projet de libéralisation. Le scandale de l’espionnage américain nous donne une raison supplémentaire de refuser ce chantage commercial. Car au-delà des questions culturelles, le champ de cet accord est si large que son adoption entraînerait un profond démantèlement de nos systèmes de régulation des échanges à l’échelle internationale. L’agriculture, l’alimentation, les services publics, les droits sociaux sont concernés.

C’est une nouvelle étape vers la mondialisation déréglementée dont nous ne cessons de dénoncer les ravages. Nous en subissons actuellement les effets avec pour conséquence, un désastre économique et social et une désaffection pour le projet unitaire européen.

L’Union européenne doit mettre un terme à sa course en avant vers toujours plus de libéralisme. Alors, comme il l’a fait avec l’exception culturelle, le gouvernement doit peser de tout son poids pour, à l’instar de la quasi-unanimité des pays sud-américains, dénoncer cet accord, sortir des négociations et imposer un modèle d’échange équilibré fondé sur la coopération.

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