Madame la ministre, c’est au nom des valeurs de gauche que nous vous reprochons de ne pas prendre l’argent là où il est

Je pense que nous avons suffisamment expliqué le sens de cette motion tendant à opposer la question préalable.

Toutefois, je ne peux laisser passer certaines formules qui, j’en suis sûr, auront dépassé la pensée de ceux qui les ont exprimées sur certaines travées de gauche.

Ce n’est pas en parlant de « carpe » et de « lapin » ou en convoquant dans ce débat tout un bestiaire que l’on va régler ce problème de fond qui, effectivement, est posé au sein de la gauche, mais aussi dans tout le pays.

Je pense que cela mérite mieux que des formules à l’emporte-pièce qui ne font que nous égarer loin du vrai débat, que nous réclamons.

M. Alain Bertrand. Le débat, c’est vous qui le tuez !

Mme Annie David. Nous vous avons écouté ; écoutez donc à votre tour ce que nous avons à dire !

M. Dominique Watrin. Durant plus de quinze heures de débat, en première lecture, nous n’avons cessé de poser la question des financements. Oui, nous avons une divergence de fond sur le financement de notre protection sociale ! La gauche doit affronter cette question et, pour notre part, nous sommes prêts à le faire sur la base de valeurs de gauche !

La réalité, quelle est-elle ? Bruxelles, à travers les politiques ultralibérales qu’elle met en œuvre, est en train d’imposer des mesures d’austérité à tous les pays d’Europe. Lors de la campagne présidentielle, nous avons bien entendu le futur Président de la République s’engager à renégocier le pacte de stabilité européen,…

Mme Annie David. C’est vrai !

M. Dominique Watrin. … mais il ne l’a pas fait ! Désormais, c’est une politique d’austérité qui s’applique. Voilà la réalité, mes chers collègues ! Et sur qui pèsent les mesures décidées, sinon sur les classes moyennes et les couches populaires ? C’est ce que nous avons dénoncé, avec, je le crois, une certaine constance, au cours des nombreux débats que nous avons eus, que ce soit sur le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, sur le projet de loi de finances, ou encore sur la réforme des retraites, dont on a bien vu qu’elle n’était ni juste ni équilibrée.

La réalité est peut-être dure à entendre, chers collègues, mais la politique de santé actuellement menée ampute le budget des hôpitaux de 600 millions d’euros, alors qu’ils sont déjà en grande difficulté.

Madame la ministre, c’est au nom des valeurs de gauche que nous vous reprochons de ne pas prendre l’argent là où il est. Car l’austérité ne vaut pas pour tous, mes chers collègues. Les plus grandes fortunes ont vu leur revenu augmenter de 25 % !

Mme Annie David. Eh oui !

M. Dominique Watrin. Cela, il ne faut pas l’oublier ! De la même manière, les dividendes versés ont augmenté de 5 %. Je pourrai donner d’autres exemples, qui témoignent de ce que la manne financière n’est pas du tout entamée par les mesures prises par le gouvernement actuel. Nous le regrettons et, à notre sens, cela pose une question de fond.

J’indique, en outre, que ces mesures d’austérité tendent à réduire le pouvoir d’achat des Français, ce qui entraîne la baisse de la consommation et, partant, le ralentissement de l’activité économique, avec, comme conséquence logique que tout le monde constate, de moindres rentrées fiscales pour le budget de la Nation mais aussi de moindres cotisations, donc de moindres recettes pour la sécurité sociale.

C’est ce cercle vicieux que nous nous proposons de rompre. Et il serait pour le coup irresponsable de notre part, monsieur le rapporteur général, de ne pas poser ces questions et de vous laisser aller dans le mur ; les forces politiques de l’extrême droite n’attendent que cela ! Mes chers collègues, il n’y a pas, d’un côté, ceux qui sont responsables – au nom de quoi, d’ailleurs ? –, et, de l’autre, ceux qui ne le sont forcément pas.

C’est donc contraints et forcés, cela a été souligné par Laurence Cohen, que nous avons déposé et défendu cette motion tendant à opposer la question préalable. C’est un événement exceptionnel. C’est aussi une façon d’appeler la gauche à mener un débat de fond. Un débat sur les classes populaires, qui souffrent. Un débat pour imaginer un nouvel avenir, et inventer un destin meilleur, pour cette France que nous aimons tant !

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