La mise en oeuvre de ce pacte entraîne une perte de recettes de 6,4 milliards d’euros pour notre protection sociale

Comme vient de le rappeler notre collègue Yves Daudigny, l’article 21 constitue le cœur de la démarche de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, dont la conséquence est une perte de recettes de l’ordre de 6,3 milliards d’euros pour notre protection sociale.

Vous le savez, nous sommes opposés à ce pacte pour trois raisons : il est injuste, inefficace et illisible.

Ce pacte est injuste, car ce sont les plus modestes qui subissent les diminutions budgétaires et supportent le coût des exonérations patronales.

Ce pacte est inefficace, car on sait, même en l’absence de chiffres officiels, que faute de contreparties exigées des entreprises, celles-ci augmenteront non pas les embauches ou les investissements, mais leurs profits et les dividendes.

Enfin, ce pacte est illisible pour les finances de l’État et pour celles de la sécurité sociale. De fait, il dénature les missions de la protection sociale.

En effet, l’article 21 institue le transfert du financement de la sécurité sociale à l’État et consacre la fiscalisation des ressources de la sécurité sociale. Cela ne correspond pas à notre conception de la protection sociale. Ce transfert est loin d’être neutre, car la nature du financement de la sécurité sociale est un enjeu politique majeur, en ce qu’elle qualifie le choix de civilisation que reflète la protection sociale dans son ensemble.

Pour s’en convaincre, il suffit de revenir sur les raisons ayant justifié le choix de la cotisation sociale par les fondateurs de la sécurité sociale : « La cotisation sociale est un prélèvement sur la richesse produite par le travail dans l’entreprise. Ni affecté aux salaires, ni affecté aux profits, ce prélèvement est mutualisé pour répondre aux besoins sociaux des travailleurs résultant des aléas de la vie. Indépendant de l’État, il est géré par les travailleurs eux-mêmes, sources de la création des richesses. »

Partie de la valeur ajoutée soustraite du profit pour répondre à des besoins sociaux, la cotisation sociale ainsi définie fait donc du financement de la sécurité sociale un terrain essentiel de la bataille de classes pour l’appropriation des richesses produites, qui accompagne la bataille pour les salaires, mais sans se confondre avec elle. Assis sur les salaires versés dans l’entreprise, qui servent de base au calcul de la cotisation, ce mode de financement s’inscrit dans une dynamique économique lui assurant une croissance régulière, à partir de l’emploi et des salaires qui en sont les leviers.

Ainsi, la nature de la cotisation sociale, qui a justifié en 1946 le principe du pilotage des conseils d’administration des caisses de sécurité sociale principalement par les salariés, justifie encore aujourd’hui pleinement le droit d’intervention des salariés sur les choix et critères de gestion patronaux de l’entreprise, pour la défense et la promotion de l’emploi et des salaires, au nom de l’intérêt collectif et général.

Nous contestons donc la fiscalisation opérée par cet article, dont nous demandons la suppression.

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