L’État, c’est eux !

Chronique publiée dans Liberté Hebdo.

Les réunions de la commission des Finances du Sénat sont souvent d’un très grand intérêt, on y déniche parfois de véritables pépites illustrant parfaitement les méfaits du libéralisme concret. Ceci est particulièrement vrai des séances durant lesquelles nous auditionnons la Cour des comptes, non pas pour se délecter de leurs demandes incessantes formulées aux gouvernements de toujours rechercher plus d’économies, d’ailleurs je trouve dans ce cas-là qu’ils outrepassent leurs prérogatives, non, ils sont parfois très intéressants dans les constats qu’ils font sur le fonctionnement de l’État, ou plutôt ce qu’il en reste, vous allez comprendre...

Depuis plusieurs années, l’État fait appel à des cabinets privés, on appelle cela « le recours aux conseils extérieurs », ce sont ainsi en moyenne 150 millions d’euros par an qui ont été dépensés entre 2011 et 2013. La Cour des comptes déplore dans son rapport que « l’administration ne mobilise pas suffisamment les nombreuses compétences dont elle dispose en son sein ». Elle poursuit en disant ceci : « le recours à des conseils extérieurs peut ainsi révéler ou entraîner la perte de certaines compétences internes et utiles à l’État... plus contestable encore est l’utilisation des consultants comme cautions techniques des décisions de l’administration, parfois en doublons avec des avis internes... », enfin il est précisé que « l’action des consultants n’est pas suffisamment encadrée par l’administration ».

L’État achète par exemple des campagnes de communication ou des prestations de media training au bénéfice des ministres, histoire de bien causer à la télé... Le cabinet Clifford Chance a travaillé pour le Ministère des Transports pour un montant de 3,6 millions d’euros entre 2011 et 2013 sur, entre autres, la procédure de mise en concession d’autoroutes. Le rapport intitule un chapitre : « L’achat d’une mémoire qui n’existe plus dans l’administration », poursuit en disant : « il est regrettable que l’administration soit contrainte de se placer dans une relation de dépendance avec certains prestataires au motif que ceux-ci ont acquis une meilleure connaissance qu’elle de ses propres procédures » sic, vous avez bien lu, c’est absolument sidérant ! En fait, depuis des années on démantèle l’État pour ensuite faire appel au privé.

Qui a profité de cette manne financière ?

Capgemini pour 55 millions d’euros, Publicis 10,8 millions ou encore Ernst and Young 6,2 millions, etc.

Alors, c’est qui l’État ?

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