Le Gouvernement fait le choix d’une autorité de régulation indépendante, et non d’un réengagement de l’État

Nous considérons que l’un des principaux reculs de ce projet de loi concerne l’extension des compétences de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires aux activités routières. Il s’agit d’accorder encore plus de pouvoir à une autorité indépendante qui joue déjà aujourd’hui le rôle que l’État a renoncé à tenir depuis longtemps.

Les obligations d’information, en particulier du Parlement, avant la conclusion des contrats de concession et le suivi du volet économique de ces derniers ont été renforcés.

Des clauses de partage des profits devraient être inscrites lors de la remise à plat des contrats existants, ainsi que dans les contrats futurs. L’ARAFER exercerait un pouvoir de contrôle en matière de rentabilité des contrats. Cette autorité serait consultée sur tout allongement de la durée des concessions. Elle pourrait aussi contrôler les marchés de travaux et la transparence des marchés de sous-concession passés, par exemple, pour les stations-services.

Rappelons que c’est l’Autorité de la concurrence qui a formulé cette suggestion, tandis que, dans le même temps, de nombreux parlementaires ont soutenu des propositions fortes pour répondre à l’exigence d’encadrement des concessions futures, voire pour remettre en cause le régime des concessions présentes.

Le Gouvernement fait donc le choix d’une autorité de régulation indépendante, et non d’un réengagement de l’État, y compris en ce qui concerne les tarifs des autoroutes et les différents contrôles. A priori, le contrôle des sociétés d’autoroutes ne relèverait donc plus du ministère, mais de l’ARAFER, ce qui représente une délégation supplémentaire de puissance publique que nous ne pouvons cautionner.

Au-delà de ces considérations spécifiques, cet article 1er est révélateur de la cohérence globale de ce projet de loi, qui est inspiré par la volonté de laisser faire les acteurs du marché, animés par la seule recherche du profit. L’idée sous-jacente est donc que les acteurs privés pourraient être les garants de l’intérêt général et de la cohérence de l’aménagement du territoire, alors que nous savons pertinemment que, dans l’ordre naturel des choses, cela est antinomique.

Voyez-vous, monsieur le ministre, nous sommes convaincus que, comme le disait un philosophe que vous appréciez beaucoup, « une société où l’économique domine le politique – et dans l’économique, la compétition donc le calcul et l’appétit du gain, ce qui est la définition même d’une économie de marché – est une société qui crée des inégalités insupportables ». (M. le ministre sourit.) Votre sourire indique que vous avez reconnu l’auteur de cette citation ! Votre projet de loi tend précisément à l’instauration d’une telle société.

Aussi n’abordons-nous qu’avec une extrême méfiance cet article, notamment en ce qui concerne l’évolution des compétences de l’ARAFER, qui accompagne un bouleversement de l’organisation de la mobilité sur notre territoire et fait écho au renforcement d’autres autorités indépendantes par le biais du présent texte.

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