Garantissons aux salariés et aux travailleurs le droit au repos et à la famille

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons les dispositions du chapitre Ier du titre III du présent projet de loi, qui portent sur les « exceptions au repos dominical et en soirée ».

Depuis 1906 et la loi Sarrien, une loi républicaine, humaniste et laïque sur le repos dominical, de nombreuses modifications ont été apportées à ce droit, souvent de manière peu ordonnée, du reste, jusqu’à la loi de 2009, dite « loi Mallié », dont chacun ici a connaissance.

Ainsi, cohabitent actuellement, comme l’ont souligné les auteurs du rapport de la commission spéciale, des dérogations permanentes, lesquelles sont de droit, des dérogations conventionnelles, prises sur la base d’un accord d’entreprise, et des dérogations temporaires, accordées par le préfet ou le maire.

Néanmoins, les sénateurs communistes affirment que l’objectif visé reste d’actualité : garantir aux salariés et aux travailleurs le droit au repos et à la famille. L’enjeu est non pas de faire du dimanche un jour de repos en tant que tel, mais bien de garantir à tous nos concitoyens le droit de jouir d’un même jour chômé par semaine.

C’est pour nous, de même que pour une grande majorité des salariés, qui reste opposée au travail du dimanche, la garantie d’un temps commun pour soi, pour ses proches, pour la vie sociale, culturelle et sportive. Ce droit au repos dominical est d’ailleurs l’un des marqueurs de notre société, le dimanche étant devenu au fil du XXe siècle la journée consacrée à la famille, ainsi qu’à l’exercice des pratiques culturelles, sportives, touristiques et cultuelles.

Notre collègue Patricia Schillinger n’hésitait pas à dire, en 2011, lors de l’examen de la proposition de loi garantissant le droit au repos dominical déposée par le groupe CRC, et d’ailleurs adoptée par la Haute Assemblée, que « le travail du dimanche conduit à un délitement des liens humains et à une perte des valeurs, au seul bénéfice de la recherche du profit. » Elle ajoutait « qu’il ne représente en aucune façon une solution pour relancer la consommation » et qu’« il ne fait que fragiliser les petits commerces de proximité au profit des grandes surfaces ».

Pour autant, le principe du repos dominical a toujours été assorti de dérogations, je l’ai dit, qui se justifient soit par la nécessité d’assurer la continuité de nos services publics, soit par les contraintes techniques de certains secteurs industriels, qui doivent fonctionner en continu, soit pour répondre aux besoins de la clientèle, ainsi que le font certains des commerces de proximité.

À ce sujet, je précise bien qu’il n’a jamais été question pour nous de revenir sur ces dérogations, puisque, portant atteinte à la vie de ces salariés, à leur famille et à leur santé, elles sont strictement encadrées par le code du travail. Or cet encadrement permet de moins en moins aux salariés de profiter de contreparties en rapport avec leurs astreintes.

De plus, la loi Mallié a introduit des inégalités dans l’application de ces dérogations, en fonction de la zone dans laquelle travaillent les salariés concernés. Dès lors, ces salariés n’ont, de fait, pas les mêmes droits : selon qu’ils travaillent en zone touristique ou dans un périmètre d’usage de consommation exceptionnel, ou PUCE, leurs droits, ainsi que leurs compensations, sont différents. En zone touristique par exemple, les salariés ne peuvent prétendre ni au volontariat ni aux contreparties financières.

Du reste, même au sein d’un PUCE, les salariés sont soumis à des inégalités de traitement. En effet, si la loi Mallié a prévu des contreparties légales, celles-ci peuvent être inférieures à la loi en cas d’accord collectif.

Par les amendements que nous défendrons au cours de l’examen du présent chapitre, nous vous proposerons, mes chers collègues, de remédier à cette inégalité, sans pour autant renoncer aux valeurs qui nous sont chères, notamment le maintien du droit au repos dominical.

Nous ne pouvons vous suivre, monsieur le ministre, lorsque vous prétendez que ces dispositions reviennent justement sur les inégalités issues de la loi Mallié. Sur le fond, en effet, les arguments énoncés en 2011 restent criants de vérité.

Nous souhaitons non seulement « assurer une protection équivalente aux salariés employés dans ces deux catégories d’établissement », c’est-à-dire dans un périmètre d’usage de consommation exceptionnel et dans une zone touristique, ainsi que le préconise la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, instance de l’Organisation internationale du travail, l’OIT, mais également garantir un véritable droit au repos dominical, ainsi qu’il a été voulu à l’origine par le législateur, afin de préserver tant la santé et la vie quotidienne des salariés que les valeurs qui nous sont chères, ici, à gauche de l’hémicycle !

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