Quel projet de société voulons-nous pour demain ?

Monsieur le ministre, l’article 71 de votre texte, que vous défendez avec passion, prévoit de fixer une exception au repos dominical d’une durée maximale de trois ans.
Néanmoins, il existait déjà des dérogations temporaires.
Ce qui nous inquiète, c’est qu’initialement le chapitre du code du travail dans lequel s’inscrivait le titre dont nous débattons aujourd’hui s’intitulait « Dérogations temporaires au repos dominical ». Vous transformez cet intitulé en « Autres dérogations au repos dominical ». Le caractère temporaire de la mesure est donc gommé. Voilà pourquoi nous nous interrogeons.

Par ailleurs, ce point a déjà été souligné, le texte n’apporte aucune précision sur la façon dont seront renégociées les garanties pour les salariés, ni sur les éléments d’évaluation ouvrant droit à une dérogation pour trois ans. Nous n’avons donc pas la même lecture que vous de cet article.

Certes, le texte prévoit que, en l’absence d’accord, l’ouverture dominicale ne sera pas possible. Or nous savons tous qu’il pourra s’agir d’accords locaux, d’accords qui dérogent au droit du travail aujourd’hui déjà minimaliste, sans parler des accords qui se feront de gré à gré avec les salariés. En effet, il sera possible de demander au salarié lui-même s’il est d’accord, ou non, pour travailler le dimanche !

Certains salariés, face à la situation actuelle de l’emploi et au chômage – celui-ci, loin de décroître, continue au contraire à augmenter –, face également à la pression qui s’exerce en faveur du travail temporaire, pourront accepter de travailler le dimanche. Pour autant, il ne s’agira pas d’un véritable volontariat. Certes, un accord sera trouvé, mais de quoi s’agira-t-il exactement, puisque la loi ne prévoit aucune contrepartie minimum légale ? On pourra, par exemple, conclure un accord prévoyant une majoration de 10 % des heures travaillées, ce qui est pour moi inacceptable !

Cet article prévoit donc de réécrire toute une société. Quel projet de société voulons-nous pour demain ? Quelle société souhaitons-nous pour nos jeunes ? Le dispositif proposé sera-t-il une bonne solution pour les étudiants, qui sont la cible privilégiée du travail le dimanche ?

Ne serait-il pas préférable, comme le Gouvernement s’y était d’ailleurs engagé, de leur donner un statut, afin qu’ils puissent se consacrer totalement à leurs études ? Une telle loi de progrès social et de préservation des acquis aurait pu emporter notre assentiment. Avec cet article, nous sommes loin du compte. C’est la raison pour laquelle nous n’en voulons pas.

Nous maintenons donc notre amendement de suppression.

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