Chaque entreprise pourra avoir des accords différents

Chaque entreprise pourra avoir des accords différents - Loi Macron : Article 76

Nous avons évoqué ce matin l’article 76, qui est très important, puisque son adoption permettra de clarifier les accords qui doivent être passés en cas de mise en place du travail le dimanche.

Lors de votre audition par la commission spéciale, je vous avais interpellé, monsieur le ministre, sur ce sujet, et vous ne m’aviez pas apporté de réponse. Peut-être pourrez-vous le faire aujourd’hui.

Cet article renvoie en effet à différents articles du code du travail permettant la prise en compte des accords, qu’il s’agisse d’accords collectifs ou d’accords d’entreprise.

Concernant les salariés mandatés, il est fait référence à l’article L. 5125-4 du code précité qui évoque bien le mode d’élection et les prérogatives de ces salariés, mais s’inscrit dans la partie du code du travail relative aux accords de maintien de l’emploi, accords introduits, nous le savons, par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi et visant « les entreprises qui font face à de graves difficultés économiques conjoncturelles ». Dans ce cadre, les salariés mandatés interviennent dans un contexte difficile et exceptionnel pour l’entreprise.

Nous ne comprenons pas pourquoi vous avez choisi de renvoyer à cet article particulier, qui concerne les entreprises en difficulté, plutôt qu’aux articles L. 2232-24 à L. 2232-27 du code susvisé figurant dans la section relative aux accords et conventions collectifs de la partie consacrée aux relations collectives de travail.

Ces articles concernent également les salariés mandatés et définissent non seulement leur mode d’élection et d’exercice, mais aussi leurs prérogatives, pendant les périodes « normales » de la vie de l’entreprise. Ils sont donc mieux adaptés à la situation de négociation d’un accord relatif au travail dominical. Les dispositions de l’article que vous avez choisi de retenir et celles des articles L. 2232-24 à L. 2232-27 semblent identiques, si ce n’est que ces derniers précisent que le mode d’approbation de l’accord par les salariés doit être défini par décret, tandis que l’article L. 5125-4, auquel renvoie votre texte, monsieur le ministre, prévoit qu’il est défini par l’accord lui-même.

Ainsi, je le disais à M. Karoutchi, chaque entreprise pourra avoir des accords différents. Un magasin de la rue de Rivoli pourra avoir un accord différent de celui qui est situé juste à côté.

Surtout, l’article L. 2232-27 précise que, à défaut d’approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, l’accord est réputé non écrit. Ce point est « omis » des présentes dispositions. Or il est d’autant plus important que le rôle du salarié mandaté est délicat. Les représentants syndicaux sont formés, disposent d’une indépendance vis-à-vis de leur employeur, garantie par leur mandat syndical et, surtout, connaissent parfaitement leur entreprise, ce qui leur est nécessaire pour conclure des accords qui servent l’intérêt commun. Tel n’est pas toujours le cas des salariés mandatés, qui ne sont pas forcément très au fait de la situation économique de chacune des entreprises dans lesquelles ils interviennent.

Il est donc primordial que l’ensemble des salariés ait un rôle dans l’approbation de l’accord et qu’en cas de non-approbation, à la majorité des suffrages exprimés, l’accord soit réputé non écrit. Il nous semble nécessaire de ne pas retenir une définition « moins-disante », utilisée dans le cadre d’accords conclus à titre exceptionnel. Ces nouveaux accords sont en effet les seuls garde-fous qui protégeront les salariés contraints de travailler le dimanche.

Nous nous opposons d’ailleurs au fait que la droite sénatoriale ait exempté les établissements de moins de onze salariés d’une telle obligation. Par cette exemption, les deux tiers des salariés du secteur du commerce ne seront plus couverts par un accord, point qui fera sans doute l’objet d’une intervention ultérieure.

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