Loi d’orientation agricole : l’impasse de la compétitivité à tout prix

Explication de vote

Publié le 21 février 2025 à 11:33

Les hasards du calendrier ont voulu que nos débats coïncident avec les élections aux chambres d’agriculture. Dans le strict respect d’un scrutin qui appartient aux agriculteurs et aux salariés agricoles, on peut dire que la colère continue de s’exprimer dans le monde paysan, et c’est normal.

Leur revenu n’est jamais garanti, car les prix agricoles ont été anormalement bas depuis deux ans dans toutes les filières de production. Les aides à l’hectare de la PAC perçues par certains exploitants céréaliers expliquent la colère de nombre de paysans qui vivent sur de petites exploitations.

La loi d’orientation agricole aurait pu infléchir un certain nombre d’orientations et aller dans le sens du développement durable de notre agriculture. Mais il n’en a rien été. Pour ce texte, la planche de salut de notre agriculture serait la compétitivité à tout prix, en s’affranchissant de contraintes réglementaires et de préconisations scientifiques. Cela alimente une fracture entre la société et ses agriculteurs. Certes la paperasserie exaspère les agriculteurs et il faut supprimer les lourdeurs, mais n’en profitons pas pour réduire les normes. Les labellisations, ce sont aussi des normes !

Pour répondre à l’intensification de la productivité, on met à mal l’agroécologie et l’agriculture bio. Cela crée un clivage opposant agriculture et écologie. (M. Bruno Sido s’exclame.) Certes, l’agriculture de production est indispensable à la survie de l’humanité. Mais nous devons nous remettre en question : il n’est pas question de promouvoir un modèle industriel, avec des unités de 75 000 bêtes qui prennent un kilo par jour, comme au Texas !

Enfin, la mondialisation des prix est une aberration ; or la loi n’en dit rien. À défaut de remettre en cause l’intégration de l’agriculture dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC), il eût été pertinent de travailler sur de nouveaux mécanismes de régulation. Nous touchons aux limites des lois Égalim, mais l’origine des problèmes reste la loi de modernisation de l’économie (LME) de 2008.

Enfin, en matière d’installation et de renouvellement des générations, la question de l’accès au foncier et de sa gestion est essentielle ; pourtant, elle n’est même pas abordée.

Je regrette que la pêche soit très peu évoquée. Nombre de parlementaires bretons l’ont regretté. Je regrette aussi la trop faible place laissée à l’élevage. Un proverbe breton dit : la terre est faite pour être entre les pattes des animaux. Si la société a perdu confiance dans l’industrie agroalimentaire, nos concitoyens croient à la sincérité des éleveurs, qui travaillent au contact de la nature et qui façonnent nos paysages.

Voilà pourquoi nous nous opposons à ce texte.

GérardLahellec

Sénateur des Côtes-d'Armor
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