Ma parole ne pèse peut-être pas lourd dans cet hémicycle. Mais je tiens à rappeler que nous engageons à nouveau notre responsabilité collective sur un chemin qui n’a toujours pas mené au consensus ; un chemin qui marginalise le FLNKS, représentant légitime d’un peuple colonisé, dont la parole devrait être au centre de toute décision le concernant.
Ne nous imposez pas le moment ou la raison d’un report des élections selon vos critères. Il faut cesser de décider à notre place ! Ce cri, tous les territoires ultramarins l’ont déjà formulé, maintes fois : nous voulons être considérés comme des partenaires à part entière.
La Commission Mixte Paritaire a validé le report des élections provinciales et modifié l’intitulé du texte pour ne plus mentionner l’accord de Bougival. On nous explique qu’il faudrait donner du temps pour relancer les discussions en espérant un consensus. Mais qu’est-ce qui nous empêche de tenir les élections et de discuter plus sereinement avec des élus légitimes ?
Le Parlement ne devrait pas être un lieu où l’on fait taire les voix qui dérangent. À l’Assemblée nationale, une motion de rejet préalable a été utilisée pour bloquer tout débat. C’est, au mieux, un mauvais signal, au pire, un détournement de procédure. On a joué des règles pour neutraliser le Parlement.
La Kanaky n’est pas un chapitre secondaire de notre ordre du jour. C’est un pays où s’écrit, depuis des décennies, un processus de décolonisation encadré par nos accords de Matignon et Nouméa. Ils ont permis la reconnaissance des droits du peuple kanak, l’émergence d’une citoyenneté propre et une paix civile à laquelle nous tenons tous.
Chaque fois que nous avons voulu décider depuis Paris, sans consensus, nous avons ravivé les tensions. Qui peut oublier ce que l’entêtement des parlementaires a coûté l’année dernière ? Faut-il vraiment rejouer cette séquence ?
Reporter n’apaise rien. Reporter prolonge l’incertitude, délégitime les exécutifs en place et enfonce le pays dans la défiance. Reporter, ce n’est pas donner du temps au temps ; c’est confisquer le temps du peuple.
Ce qui fait défaut, c’est la volonté politique d’écouter le pays et de renouer avec l’esprit du consensus. Le texte n’est donc plus lié à Bougival - mais si les mots ont changé, la méthode demeure. Pour reprendre les mots d’Édouard Wamai, chanteur calédonien, « rien n’a sazé ». On demande au Parlement de couvrir une trajectoire déjà tracée, en évitant le débat et en neutralisant les amendements.
Le groupe CRCE-Kanaky refuse cette politique du fait accompli ! Notre devoir est simple : rendre la parole au peuple.