Vienne, le jeudi 23 février 2012
Monsieur le Président, mes chers collègues,
Je souhaite pouvoir intervenir concernant le futur traité régulant le commerce et le transfert des armes classiques. Il s’agit d’une question qui intéresse au premier chef notre commission, qui est chargée de traiter des questions politiques et de sécurité.
Voilà déjà plusieurs années que l’idée d’élaborer un tel traité a germé. Je veux d’ailleurs saluer le travail acharné mené par les ONG dans ce domaine, qui a peu à peu permis à la communauté internationale de prendre la mesure de la nécessité d’un tel instrument. C’est aussi grâce à elles que pourra s’ouvrir dans quelques mois la conférence des Nations unies.
Nous sommes donc dans la dernière ligne droite : les Etats ont défini la semaine dernière, non sans mal d’ailleurs, le règlement intérieur censé régir les négociations finales. Pour autant, nous sommes tous conscients que les négociations devraient être encore âpres en juillet prochain.
Je crois néanmoins que l’actualité internationale des derniers mois est venue une nouvelle fois démontrer la nécessité de conclure rapidement les négociations. La répression sanglante organisée par les dirigeants des pays de la rive sud de la Méditerranée à l’encontre des manifestants pacifistes du printemps arabe n’aurait pas été possible s’il n’avait pu acheter des armes. L’enjeu de ce traité est donc fondamental à l’heure où certains Etats membres du Conseil de sécurité poursuivent leurs transferts d’armes vers des pays où l’on sait parfaitement que leur utilisation est détournée à l’encontre des populations civiles !
Il faut donc un traité, nous en convenons tous. Mais pas n’importe quel traité : il faut un traité ambitieux pour qu’il soit efficace. Faute de quoi, nous ne parviendrons pas à limiter les violations des droits de l’homme auxquelles nous assistons quotidiennement.
Qui dit traité ambitieux dit forcément adoption de normes ambitieuses. J’identifie à ce titre plusieurs points sur lesquels il ne saurait être transigé.
Premièrement, le champ d’application. Il doit être le plus large possible, pour couvrir à la fois toutes les armes classiques, les munitions et les équipements de maintien de l’ordre et de police. Le traité doit par ailleurs couvrir non seulement la vente d’armes mais également le transfert de la propriété des armes ou le transfert de leur contrôle.
Deuxièmement, il faut s’assurer que le transfert sera interdit dès lors qu’il existe un risque substantiel que les armes soient utilisées pour commettre ou faciliter de graves violations du droit international. Ceci suppose la mise en place de mécanismes d’assurances concernant l’utilisation et l’utilisateur finaux.
Troisièmement, le traité devra mettre en place des obligations de transparence. A ce titre, il me paraîtrait important d’imposer aux Etats de publier des rapports publics pour que les obligations mises en place par le traité n’en restent pas au stade de voeux pieux.
J’espère qu’une minorité d’Etats ne sera pas en mesure de faire obstacle, au cours de la négociation, à l’introduction de ces trois éléments. A ce titre, je dois avouer qu’il me paraît dommage que le principe du consensus ait été retenu pour les questions de fond.
Quoi qu’il en soit, nous restons à la veille d’un évènement historique. A mon sens, il pourrait être intéressant que le rapport qui sera présenté à Monaco évoque cette question. En effet, puisque nous le recevons quelques semaines à l’avance, il nous fournira l’occasion de débattre et de rapprocher nos positions à la veille de la Conférence, tout en nous laissant la possibilité de convaincre nos gouvernements de l’enjeu fondamental que constitue l’adoption d’un tel traité.
Je vous remercie.